��taient-ils pr��ts �� t��moigner des ��gards �� Alexandre P��trovitch, car il pouvait ��tre fort utile, au besoin, pour ��crire des placets. On croyait qu'il avait une parent�� fort honorable en Russie,--peut-��tre m��me dans le nombre y avait-il des gens haut plac��s,--mais on n'ignorait pas que depuis son exil il avait rompu toutes relations avec elle. En un mot, il se faisait du tort �� lui-m��me. Tout le monde connaissait son histoire et savait qu'il avait tu�� sa femme par jalousie,--moins d'un an apr��s son mariage,--et, qu'il s'��tait livr�� lui-m��me �� la justice, ce qui avait beaucoup adouci sa condamnation. Des crimes semblables sont toujours regard��s comme des malheurs, dont il faut avoir piti��. N��anmoins, cet original se tenait obstin��ment �� l'��cart et ne se montrait que pour donner des le?ons.
Tout d'abord je ne fis aucune attention �� lui; puis sans que j'en sus moi-m��me la cause, il m'int��ressa: il ��tait quelque peu ��nigmatique. Causer avec lui ��tait de toute impossibilit��. Certes, il r��pondait �� toutes mes questions: il semblait m��me s'en faire un devoir, mais une fois qu'il m'avait r��pondu, je n'osais l'interroger plus longtemps; apr��s de semblables conversations, on voyait toujours sur son visage une sorte de souffrance et d'��puisement. Je me souviens que par une belle soir��e d'��t��, je sortis avec lui de chez Ivan Ivanytch. Il me vint brusquement �� l'id��e de l'inviter �� entrer chez moi, pour fumer une cigarette; je ne saurais d��crire l'effroi qui se peignit sur son visage; il se troubla tout �� fait, marmotta des mots incoh��rents, et soudain, apr��s m'avoir regard�� d'un air courrouc��, il s'enfuit dans une direction oppos��e. J'en fus fort ��tonn��. Depuis, lorsqu'il me rencontrait, il semblait ��prouver �� ma vue une sorte de frayeur, mais je ne me d��courageai pas. Il avait quelque chose qui m'attirait; un mois apr��s, j'entrai moi-m��me chez Goriantchikof, sans aucun pr��texte. Il est ��vident que j'agis alors sottement et sans la moindre d��licatesse. Il demeurait �� l'une des extr��mit��s de la ville, chez une vieille bourgeoise dont la fille ��tait poitrinaire. Celle-ci avait une petite enfant naturelle ag��e de dix ans, fort jolie et tr��s-joyeuse. Au moment o�� j'entrai, Alexandre P��trovitch ��tait assis aupr��s d'elle et lui enseignait �� lire. En me voyant, il se troubla, comme si je l'avais surpris en flagrant d��lit. Tout ��perdu, il se leva brusquement et me regarda fort ��tonn��. Nous nous ass?mes enfin; il suivait attentivement chacun de mes regards, comme s'il m'e?t soup?onn�� de quelque intention myst��rieuse. Je devinai qu'il ��tait horriblement m��fiant. Il me regardait avec d��pit, et il ne tenait �� rien qu'il me demandat:--Ne t'en iras-tu pas bient?t?
Je lui parlai de notre petite ville, des nouvelles courantes; il se taisait ou souriait d'un air mauvais: je pus constater qu'il ignorait absolument ce qui se faisait dans notre ville et qu'il n'��tait nullement curieux de l'apprendre. Je lui parlai ensuite de notre contr��e, de ses besoins: il m'��coutait toujours en silence en me fixant d'un air si ��trange que j'eus honte moi-m��me de notre conversation. Je faillis m��me le facher en lui offrant, encore non coup��s, les livres et les journaux que je venais de recevoir par la derni��re poste. Il jeta sur eux un regard avide, mais il modifia aussit?t son intention et d��clina mes offres, pr��textant son manque de loisir. Je pris enfin cong�� de lui; en sortant, je sentis comme un poids insupportable tomber de mes ��paules. Je regrettais d'avoir harcel�� un homme dont le go?t ��tait de se tenir �� l'��cart de tout le monde. Mais la sottise ��tait faite. J'avais remarqu�� qu'il poss��dait fort peu de livres; il n'��tait donc pas vrai qu'il l?t beaucoup. N��anmoins, �� deux reprises, comme je passais en voiture fort tard devant ses fen��tres, je vis de la lumi��re dans son logement. Qu'avait-il donc �� veiller jusqu'�� l'aube? ��crivait-il, et, si cela ��tait, qu'��crivait-il?
Je fus absent de notre ville pendant trois mois environ. Quand je revins chez moi, en hiver, j'appris qu'Alexandre P��trovitch ��tait mort et qu'il n'avait pas m��me appel�� un m��decin. On l'avait d��j�� presque oubli��. Son logement ��tait inoccup��. Je fis aussit?t la connaissance de son h?tesse, dans l'intention d'apprendre d'elle ce que faisait son locataire et s'il ��crivait. Pour vingt kopeks, elle m'apporta une corbeille pleine de papiers laiss��s par le d��funt et m'avoua qu'elle avait d��j�� employ�� deux cahiers �� allumer son feu. C'��tait une vieille femme morose et taciturne; je ne pus tirer d'elle rien d'int��ressant. Elle ne sut rien me dire au sujet de son locataire. Elle me raconta pourtant qu'il ne travaillait presque jamais et qu'il restait des mois entiers sans ouvrir un livre ou toucher une plume: en revanche, il se promenait toute la nuit en long et en large dans sa chambre, livr�� �� ses r��flexions; quelquefois m��me, il parlait tout haut. Il
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