et des mois et des ann��es enti��res. Cr�� tonnerre! Eh bien! mais alors... et l'avancement, nom de Dieu!
Il est vrai que, depuis six mois, les terribles fi��vres d'El Meridj rongeaient le capitaine, ne lui laissant que le cuir sur les os.
S'il cassait sa pipe, ?a ferait une place; mais quand tournerait-il de l'oeil? On en voit comme ?a, des souffreteux, des faiblards, des moiti��-crev��s, qui semblent n'avoir plus qu'un souffle et qui enterrent les plus solides.
Ce n'est pas qu'il en voulait �� ce brave homme de capitaine Fleury; il l'aimait beaucoup, au contraire, il se serait fait trouer la peau pour lui dans une charge, mais que diable! puisqu'il n'y avait plus rien �� fricasser dans ce sacr�� pays, il fallait bien se demander si les anciens ne songeaient pas �� d��filer la grande parade.
Chacun pour soi, n'est-ce pas donc? Eh, nom de Dieu, non! plus rien �� faire, positivement. Ces animaux de B��doins deviennent doux comme des moutons et comme eux se laissent tondre. Tas d'idiots! S'ils se remuaient seulement un peu, de temps �� autre! Mais ils ne demandent qu'�� vivre en paix! Malheur! Vingt ans de services, et n'��tre que lieutenant en premier! Il avait sollicit�� un poste de la fronti��re, comptant sur des chevauch��es, des coups de sabre et des horions, et voil�� qu'il prenait du ventre. Quand donc ce gouvernement d'avocats et d'��piciers se d��cidera-t-il �� taper sur quelqu'un ou quelque chose? Avec l'empereur, ce serait d��j�� fait. Comment voulez-vous que des officiers deviennent r��publicains si on leur coupe les chances d'avancement! Autant faire du lard et rester chez soi. On gagnerait davantage �� vendre des chandelles. Le m��tier est perdu dans ces parages. Il n'y a pas encore dix mois, on n'aurait pas fait dix pas hors du bordj sans recevoir un pruneau, et le voici �� plus de deux cents m��tres. On est oblig�� de compter sur les fi��vres et les dyssenteries, puisqu'on n'entend plus siffler la moindre balle.
Comme si une f��e bienveillante e?t entendu ce monologue et e?t voulu satisfaire les souhaits de Fortescu, une d��tonation retentit et un sifflement strident vibra pr��s de son oreille, mais si pr��s qu'il en sentit le vent.
Il se retourna avec une vivacit�� et une prestesse que n'aurait pu faire soup?onner son ventre de cavalier bien nourri.
--Butor! maladroit! cria-t-il. C'est encore cet animal de marchef qui tire les li��vres. Eh! dites donc, vous, l��-bas! Faites attention o�� vous envoyez vos balles, nom de Dieu!
Mais un second coup qui, cette fois, troua son beau chapeau de palmier, lui prouva que, pr��cis��ment, le tireur pr��tait la plus grande attention �� l'endroit o�� il envoyait ses balles, et que le but n'��tait pas un li��vre; et tout pale d'��motion et de col��re, il aper?ut dans la fum��e bleuatre s'��levant en gracieuse spirale d'un fourr�� de tamarin, un burnous blanc qui s'agitait.
--A cheval! �� cheval!
Et encore essouffl�� de sa course, il montrait au capitaine le trou de son chapeau.
--Sont-ils nombreux? demanda l'autre, se jetant hors de son lit tout grelottant de fi��vre.
--Je n'ai pu les compter, mon capitaine; ils sont embusqu��s dans les broussailles; mais ils ont tir�� plusieurs coups de fusil.
--J'en ai entendu deux. J'ai cru que c'��tait cet empot�� de marchef qui chassait.
Mais le marchef accourait de la cantine o�� il ��tait en train de sirotter son sixi��me champoreau, tout en racontant l'histoire de la Pucelle enrag��e �� la petite maman Jardret qui avait mal au ventre �� force de rire.
--Un peloton, �� cheval!
Et cinq minutes apr��s, le peloton command�� par Fortescu d��valait au grand trot.
On battit les broussailles, on feuilla les halliers, on descendit jusque dans le lit encaiss�� de l'oued Horrirh: on ne d��couvrit que quelques petits patres et deux ou trois chaouias paisiblement assis, devisant des choses du temps.
L'ennemi avait disparu.
Une fillette qui s'��tait enfuie �� l'approche des spahis, et qu'on rattrapa bien vite en la mena?ant de lui couper la t��te si elle ne disait pas toute la v��rit��, d��clara affol��e et tremblante, avoir aper?u un grand n��gro traverser les broussailles et courir dans la direction du douar du ca?d Hamda-bel-Hassen des Ouled-Ali, de l'autre c?t�� de l'oued Horrirh, au pied de la montagne.
IV
Le ca?d Hamda-bel-Hassen ��tait mal not�� au bureau arabe. Il avait pris part autrefois �� tous les soul��vements des Nememchas et, bien qu'ayant fait sa soumission, dans les troubles r��cents de la fronti��re, il fut visible �� tous qu'il ne nous fournissait qu'�� regret son goum.
Cependant, depuis l'installation du camp d'El-Meridj et la construction du bordj coll�� comme une menace aux flancs de son territoire, il vivait paisiblement en philosophe, entre ses femmes et ses slouguis, se rendant deux fois chaque ann��e �� Tebessa avec son tr��sorier et son secr��taire pour y payer l'imp?t, et ne manquant jamais de se faire accompagner d'un mulet charg�� d'��toffes de Tunis, de djebiras soutach��es,
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