de cesser désormais Un amour qu'un mari peut trouver fort mauvais, Et songez que les noeuds du sacré mariage...
- Lélie -
Quoi ? celle, dites-vous, dont vous tenez ce gage...
- Sganarelle -
Est ma femme, et je suis son mari.
- Lélie -
Son mari ?
- Sganarelle -
Oui, son mari, vous dis-je, et mari très marri (6) ; Vous en savez la cause, et je m'en vais l'apprendre Sur l'heure à ses parents.
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SCèNE X. - Lélie.
- Lélie -
Ah ! que viens-je d'entendre ! L'on me avait bien dit, et que c'était de tous L'homme le plus mal fait qu'elle avait pour époux. Ah ! quand mille serments de ta bouche infidèle Ne m'auraient pas promis une flamme éternelle, Le seul mépris d'un choix si bas et si honteux Devait bien soutenir l'intérêt de mes feux, Ingrate ! et quelque bien... Mais ce sensible outrage, Se mêlant aux travaux d'un assez long voyage, Me donne tout à coup un choc si violent, Que mon coeur devient faible, et mon corps chancelant.
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SCèNE XI. - Lélie, La femme de Sganarelle.
- La femme de Sganarelle -
(se croyant seule.)
Malgré moi mon perfide...
(Apercevant Lélie.)
Hélas ! quel mal vous presse ? Je vous vois prêt, Monsieur, à tomber en faiblesse.
- Lélie -
C'est un mal qui m'a pris assez subitement.
- La femme de Sganarelle -
Je crains ici pour vous l'évanouissement ; Entrez dans cette salle, en attendant qu'il passe.
- Lélie -
Pour un moment ou deux j'accepte cette grace.
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SCèNE XII. - Sganarelle, un parent de la femme de Sganarelle.
- Le parent -
D'un mari sur ce point j'approuve le souci ; Mais c'est prendre la chèvre un peu bien vite aussi (7) : Et tout ce que de vous je viens d'ou?r contre elle Ne conclut point, parent, qu'elle soit criminelle : C'est un point délicat, et de pareils forfaits, Sans les bien avérer, ne s'imputent jamais.
- Sganarelle -
C'est-à-dire qu'il faut toucher au doigt la chose.
- Le parent -
Le trop de promptitude à l'erreur nous expose. Qui sait comme en ses mains ce portrait est venu, Et si l'homme, après tout, lui peut être connu ? Informez-vous-en donc ; et si c'est ce qu'on pense, Nous serons les premiers à punir son offense.
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SCèNE XIII. - Sganarelle.
- Sganarelle -
On ne peut pas mieux dire ; en effet, il est bon D'aller tout doucement. Peut-être, sans raison Me suis-je en tête mis ces visions cornues (8), Et les sueurs au front m'en sont trop t?t venues. Par ce portrait enfin dont je suis alarmé, Mon déshonneur n'est pas tout à fait confirmé. Tachons donc par nos soins...
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SCèNE XIV. - Sganarelle, la femme de Sganarelle, sur la porte de sa maison, reconduisant Lélie ; Lélie.
- Sganarelle -
(à part, les voyant.)
Ah ! que vois-je ? Je meure ! Il n'est plus question de portrait à cette heure : Voici, ma foi, la chose en propre original.
- La femme de Sganarelle -
C'est par trop vous hater, Monsieur ; et votre mal, Si vous sortez si t?t, pourra bien vous reprendre.
- Lélie -
Non, non, je vous rends grace, autant qu'on puisse rendre Du secours obligeant que vous m'avez prêté.
- Sganarelle -
(à part.)
La masque encore après lui fait civilité !
(La femme de Sganarelle rentre dans sa maison.)
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SCèNE XV. - Sganarelle, Lélie.
- Sganarelle -
(à part.)
Il m'aper?oit ; voyons ce qu'il me pourra dire.
- Lélie -
(à part.)
Ah ! mon ame s'émeut, et cet objet m'inspire... Mais je dois condamner cet injuste transport, Et n'imputer mes maux qu'aux rigueurs de mon sort. Envions seulement le bonheur de sa flamme.
(En s'approchant de Sganarelle.)
Oh ! trop heureux d'avoir une si belle femme !
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SCèNE XVI. - Sganarelle ; Célie, à sa fenêtre, voyant Lélie qui s'en va.
- Sganarelle -
(seul.)
Ce n'est point s'expliquer en termes ambigus. Cet étrange propos me rend aussi confus Que s'il était venu des cornes à la tête.
(Regardant le c?té par où Lélie est sorti.)
Allez, ce procédé n'est point du tout honnête.
- Célie -
(à part, en rentrant.)
Quoi ! Lélie a paru tout à l'heure à mes yeux ! Qui pourrait me cacher son retour en ces lieux ?
- Sganarelle -
(sans voir Célie.)
Oh ! trop heureux d'avoir une si belle femme ! Malheureux bien plut?t de l'avoir cette infame, Dont le coupable feu, trop bien vérifié, Sans respect ni demi nous a cocufié ! Mais je le laisse aller après un tel indice, Et demeure les bras croisés comme un jocrisse (9) ! Ah ! je devais du moins lui jeter son chapeau, Lui ruer quelque pierre, ou crotter son manteau, Et sur lui hautement, pour contenter ma rage, Faire au larron d'honneur crier le voisinage.
(Pendant le discours de Sganarelle, Célie s'approche peu à peu, et attend, pour lui parler, que son transport soit fini.)
- Célie -
(à Sganarelle.)
Celui qui maintenant devers vous est venu, Et qui vous a parlé, d'où vous est-il connu ?
- Sganarelle -
Hélas ! ce n'est pas moi qui le conna?t, Madame
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