Sapho | Page 9

Alphonse Daudet
rassurer Machaume.
Elle se mit �� rire. Beau temps qu��elle courait, Machaume, et toute la maison avec. On avait tout vendu, les meubles, la d��froque, m��me la literie. Il lui restait la robe qu��elle avait sur le dos et un peu de linge fin, sauv�� par sa bonne... Maintenant s��il la renvoyait, elle serait �� la rue.
III
?Cette fois, je crois que j��ai trouv��... Rue d��Amsterdam, vis-��- vis la gare... Trois pi��ces, et un grand balcon... Si tu veux, nous irons voir, apr��s ton minist��re... c��est haut, cinq ��tages... mais tu me porteras. C����tait si bon, tu te rappelles...? Et tout amus��e de ce souvenir, elle se fr?lait, se roulait dans son cou, cherchait l��ancienne place, sa place.
�� deux, dans leur garni d��h?tel, avec les moeurs du quartier, ces tra?neries par l��escalier de filles en filets et en savates, ces cloisons de papier derri��re lesquelles grouillaient d��autres m��nages, cette promiscuit�� des cl��s, des bougeoirs, des bottines, la vie devenait intol��rable. Non pas �� elle certes; avec Jean, le toit, la cave, m��me l����gout, tout lui ��tait bon pour nicher. Mais la d��licatesse de l��amant s��effarouchait de certains contacts, auxquels, gar?on, il ne pensait gu��re. Ces m��nages d��une nuit le g��naient, d��shonoraient le sien, lui causaient un peu la tristesse et le d��go?t de la cage des singes au Jardin des Plantes, grima?ant tous les gestes et les expressions de l��amour humain. Le restaurant aussi l��ennuyait, ce repas qu��il fallait aller chercher deux fois par jour au boulevard Saint-Michel, dans une grande salle encombr��e d����tudiants, d����l��ves des Beaux-Arts, peintres, architectes, qui sans le conna?tre avaient l��habitude de sa figure, depuis un an qu��il mangeait l��.
Il rougissait -- en poussant la porte -- de tous ces yeux tourn��s vers Fanny, entrait avec la g��ne agressive des tout jeunes gens qui accompagnent une femme; et il craignait aussi la rencontre d��un de ses chefs du minist��re ou de quelqu��un de son pays. Puis la question d����conomie.
-- Que c��est cher!... disait-elle chaque fois, emportant et commentant la petite note du d?ner... Si nous ��tions chez nous, j��aurais fait marcher la maison trois jours pour ce prix-l��.
-- Eh bien, qui nous emp��che?...
Et l��on se mit en qu��te d��une installation.
C��est le pi��ge. Tous y sont pris, les meilleurs, les plus honn��tes, par cet instinct de propret��, ce go?t du ?home? qu��ont mis en eux l����ducation familiale et la ti��deur du foyer.
L��appartement de la rue d��Amsterdam fut lou�� tout de suite et trouv�� charmant, malgr�� ses pi��ces en enfilade qui ouvraient, -- la cuisine et la salle sur une arri��re-cour moisie o�� montaient d��une taverne anglaise des odeurs de rin?ure et de chlore, -- la chambre sur la rue en pente et bruyante, secou��e jour et nuit aux cahots des fourgons, camions, fiacres, omnibus, aux sifflets d��arriv��e et de d��part, tout le vacarme de la gare de l��Ouest d��veloppant en face ses toitures en vitrage couleur d��eau sale. L��avantage, c����tait de savoir le train �� sa porte, et Saint-cloud, Ville-d��Avray, Saint-Germain, les vertes stations des bords de la Seine presque sous leur terrasse. Car ils avaient une terrasse, large et commode, qui gardait de la munificence des anciens locataires une tente de zinc peinte en coutil ray��, ruisselante et triste sous le cr��pitement des pluies d��hiver, mais o�� l��on serait tr��s bien l����t�� pour d?ner au bon air, comme dans un chalet de montagne.
On s��occupa des meubles. Jean ayant fait part chez lui de son projet d��installation, tante Divonne, qui ��tait comme l��intendante de la maison, envoya l��argent n��cessaire; et sa lettre annon?ait en m��me temps le prochain arrivage d��une armoire, d��une commode, et d��un grand fauteuil cann��, tir��s de la ?Chambre du vent? �� l��intention du Parisien.
Cette chambre, qu��il revoyait au fond d��un couloir de Castelet, toujours inhabit��e, les volets clos attach��s d��une barre, la porte ferm��e au verrou, ��tait condamn��e, par son exposition aux coups du mistral qui la faisaient craquer comme une chambre de phare. On y entassait des vieilleries, ce que chaque g��n��ration d��habitants rel��guait au pass�� devant les acquisitions nouvelles.
Ah! si Divonne avait su �� quelles singuli��res siestes servirait le fauteuil cann��, et que des jupons de surah, des pantalons �� manchettes empliraient les tiroirs de la commode Empire... Mais le remords de Gaussin �� ce sujet se trouvait perdu dans les mille petites joies de l��installation.
C����tait si amusant, apr��s le bureau, entre chien et loup, de partir en grandes courses, serr��s au bras l��un de l��autre, et de s��en aller dans quelque rue de faubourg choisir une salle �� manger, -- le buffet, la table et six chaises, ou des rideaux de cretonne �� fleurs pour la crois��e et le lit. Lui acceptait tout, les yeux ferm��s; mais Fanny regardait pour deux, essayait les chaises, faisait, glisser les battants de la table, montrait une exp��rience marchandeuse.
Elle connaissait les maisons o�� l��on avait ��
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