rasoir, tout ?a... Pourtant, il y a un truc qui m'a vraiment fait rigoler, l'autre jour. Imagine-toi que nous avons commencé l'Histoire Sainte.
--Et c'est l'Histoire Sainte...
--Qui m'a gondolé? Oui, c'est ?a.
--Il n'y a pourtant pas de quoi.
--Tu crois ?a, toi? Eh bien, moi je dis qu'il faut que les curés nous prennent sérieusement pour des poires, de nous envoyer des boniments comme ?a!
--Mon cher Georges, ton age ne t'autorise pas à tenir un tel langage!
--Qu'est-ce que tu veux, c'est mon caractère, à moi!... Ainsi, la création du monde, crois-tu que ?a s'est passé comme on le raconte dans l'Histoire Sainte?
--évidemment.
--Tiens, voilà l'effet que tu me fais. (Il hausse les épaules). Mais, mon pauvre vieux, ?a ne tient pas debout, tout ?a!--Par exemple, les lions, les tigres, les jaguars, de quoi qu'ils se sont nourris, un coup que le bon Dieu les a eu créés?
--Ma foi, je t'avouerai...
--Tu ne vas pas me dire qu'ils ont brouté de l'herbe, et mangé du pissenlit.
--Je ne dis pas cela.
--Alors quoi! Ils se sont donc mis à boulotter les pauvres moutons, les pauvres antilopes que le Seigneur venait de créer. En voilà une administration!
--Il y a évidemment là...
--Et les asticots qu'on trouve dans le fromage, et les espèces de petites anguilles que tu m'as montrées avec ton microscope dans le vinaigre! Où qu'ils étaient, tous ces petits animaux ridicules, avant qu'on ait inventé le fromage, le vinaigre et tout le reste?
--Bien s?r que...
--Et tous les sales microbes qui vous fichent un tas de maladies, ?a a beau être tout petit, c'est des bêtes comme les autres, créées par le bon Dieu en même temps que tous les animaux. Eh bien! qu'est-ce qu'ils faisaient, où nichaient-ils quand Adam et ève étaient bien portants, car s?r qu'ils en avaient, une santé, ces deux-là!
--Je ne sais pas.
--Et puis, il y a encore quelque chose qui me chiffonne dans toute cette histoire-là... Seulement, promets-moi de ne pas dire à maman que je t'ai causé de ?a.
--Je te le jure.
--Abel et Ca?n, ils n'avaient pas de femmes, dis?
--Je ne crois pas.
--Alors, dis-moi comment qu'ils ont fait pour avoir des gosses?
AU PAYS DE L'OR
(Extrait d'une lettre que je re?ois à l'instant même d'un de mes amis qui est au Klondyke.)
* * * * *
?Mais c'est surtout dans les industries à c?té qu'on réalise d'incroyables et rapides fortunes.
? Tel trafiquant de marchandises rares, tel tenancier de music-hall ou de maison de jeu et même tel porteur de colis, gagne plus d'argent que certains détenteurs d'excellents claims.
? Une bonne idée qui vous vient, et vous voilà une fortune parfois!
? C'est le cas d'un joyeux luron de Canadien fran?ais, installé ici depuis deux ou trois ans, un nommé Antoine Lescarbille, dont tu as peut-être connu jadis le père qui était charretier[3] à Cap-à-l'Aigle.
[Note 3: Au Canada, on appelle charretier les cochers de fiacre, et les fiacres, on les appelle des calèches.]
? Ce Lescarbille, après avoir gratté pendant quelques mois le rude terrain de Klondyke, s'était vite dégo?té de cette besogne: se rappelant son ancienne profession, il se construisit une hutte sur le bord du Greenpig Lake et s'établit pêcheur et marchand de poisson.
? Ses affaires prospéraient assez bien, quand un véritable coup de génie qu'il eut mit sa fortune au pinacle.
? Il faut te dire que, dans ce damné Klondyke, l'éclairage est une des plus fantastiques dépenses auxquelles on ait à faire face.
? Dawson-City est onéreusement éclairé à l'électricité et à l'acétylène; mais, en d'autres agglomérations moins importantes, ces moyens font défaut, et quand tu sauras qu'on a quatre bougies pour un dollar et que le pétrole ne se paye pas moins de cinq dollars le gallon, tu ne manqueras pas de reculer d'horreur.
? Notre ami Lescarbille roulait probablement ces pénibles réflexions dans sa tête quand, triant son poisson, ses yeux tombèrent sur une sorte d'anguille qui, jusqu'à présent, avait causé son désespoir.
? Ce poisson dont je ne saurais préciser le nom ni la classification (l'Alaska n'est pas fertile en Lacépèdes) est tellement gras, en effet, tellement saturé d'huile qu'il échappe à toute comestibilité, et, par conséquent, à tout trafic.
? Mais un éclair de génie venait de fulgurer le crane de Lescarbille.
?--Ah! cochon, s'écria-t-il, tu ne veux pas nous nourrir! eh bien, tu serviras à nous éclairer.
? Antoine Lescarbille avait son idée.
Il fuma, il boucana, comme on dit ici, un certain nombre de ces anguilles, et puis, quand elles furent bien sèches, certain d'avance du résultat, il fit sa petite expérience.
? Allumée à la queue, l'anguille br?la, se consumant lentement, produisant la lumière d'une excellente carcel et ne dégageant que peu d'odeur et une très légère fumée.
? à cette constatation, Lescarbille bondit de joie si prodigieusement qu'il en défon?a le rustique plafond de sa hutte, mais les Canadiens fran?ais ont, Dieu merci, le crane dur.
? Peu de jours après sa découverte et sans en
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