Poésies Allemandes | Page 2

Friedrich Gottlieb Klopstock
voix résonne: parmi l'obscurité des nuages le compagnon de l'éclair glorifie le Seigneur sur la cime des arbres et sur la crête des montagnes.
Son nom est célébré par le bocage qui frémit, et par le ruisseau qui murmure, les vents l'emportent jusqu'à l'arc céleste, l'arc de grace et de consolation que sa main tendit dans les nuages.
Et tu te tairas, toi que Dieu créa immortel! et tu resterais muet dans ce concert de louanges et d'admiration! Rends graces au Dieu qui te fait partager son éternité!... quels que soient tes efforts, ils seront toujours indignes de lui.
Cependant chante encore, et glorifie ton bienfaiteur. Choeur éclatant qui m'entourez, je viens et je m'unis à vous, je veux partager votre ravissement et vos concerts!
Celui qui créa l'univers, qui créa là haut le flambeau d'or qui nous éclaire, ici la poudre où s'agitent des millions de vers, quel est-il? C'est Dieu! c'est Dieu! notre père! nous l'appelons ainsi, et d'innombrables voix s'unissent à la n?tre.
Oui, il créa les mondes; et là bas, le lion, qui verse de son sein des torrents de lumière: bélier, capricorne, pléiades, scorpion, cancer, vous êtes son ouvrage; voyez la balance s'élever et descendre... le sagittaire vise... un éclair part.
Il se tourne; comme ses flèches et son carquois résonnent! et vous gémeaux, de quelle pure lumière vous êtes enflammés, vos pieds rayonnants se lèvent pour une marche triomphante. Le poisson joue et vomit des feux éclatants.
La rose jette un rayon de feu du centre de sa couronne; l'aigle au regard flamboyant plane au milieu de ses compagnons soumis; le cigne nage, orgueilleux, le col arrondi et les au vent.
Qui t'a donné cette mélodie, ? lyre qui donc a tendu tes cordes dorées et sonores? Tu te fais entendre, et les planètes s'arrêtent dans leur danse circulaire, viennent en roulant sur leurs orbites la continuer autour de toi.
Voici la vierge ailée en robe de fête, les mains pleines d'épis et de pampres joyeux. Voici le verseau d'où se précipitent des flots de lumière; mais Orion contemple la ceinture et non le verseau.
? si la main de Dieu te répandait sur l'autel, vase céleste! toute la création volerait en éclats, le coeur du lion se briserait auprès de l'urne desséchée, la lyre ne rendrait plus que des accents de mort, et la couronne tomberait flétrie.
Dieu a créé des signes dans les cieux: il fit la lune plus près de notre poussière. Paisible compagne de la nuit, son doux éclat répand sur nous la sérénité; elle revient veiller toujours sur le front de ceux qui sommeillent.
Je glorifie le Seigneur, celui qui ordonna à la nuit sainte du sommeil et de la mort d'avoir des voiles et des flambeaux. Terre, tombeau toujours ouvert pour nous, comme Dieu t'a parée de fleurs!
Lorsque Dieu se lèvera pour juger, il remuera le tombeau plein d'ossements, et la terre pleine de semences! Que tout ce qui dort se réveille! La foudre environne le tr?ne de Dieu; l'heure du jugement sonne, et la mort a trouvé des oreilles pour l'entendre.
LES DEUX MUSES
J'ai vu..., oh! dites-moi, était-ce le présent que je voyais, ou l'avenir? J'ai vu dans la lice la muse anglaise s'élancer vers une couronne.
à peine distinguait-on deux buts à l'extrémité de la carrière: des chênes ombrageaient l'un, autour de l'autre des palmiers se dessinaient dans l'éclat du soir.
Accoutumée à de semblables luttes, la muse d'Albion descendit fièrement dans l'arène, ainsi qu'elle y était venue; elle y avait jadis concouru glorieusement avec le fils de Méon, le chantre du Capitole.
Elle jeta un coup d'oeil à sa jeune rivale, tremblante, mais avec une sorte de noblesse, dont l'ardeur de la victoire enflammait les joues et qui abandonnait aux vents sa chevelure d'or.
Déjà elle retient à peine le souffle resserré dans sa poitrine ardente, et se penche avidement vers le but... La trompette déjà résonne à ses oreilles, et ses yeux dévorent l'espace.
Fière de sa rivale, plus fière d'elle-même, l'altière Bretonne mesure encore des yeux la fille de Thuiskon: ?Je m'en souviens, dit-elle, je naquis avec toi chez les Bardes, dans la forêt sacr ée;
? Mais le bruit était venu jusqu'à moi que tu n'existais plus: pardonne, ? muse, si tu es immortelle, pardonne-moi de l'apprendre si tard; mais au but j'en serai plus s?re.?
?Le voici là bas!... Le vois-tu dans le lointain avec sa couronne ?... Oh! ce courage contenu, cet orgueilleux silence, ce?regard qui se fixe à terre tout en feu... je le connais!
? Cependant réfléchis encore avant que retentisse la trompette du héraut... C'est moi, moi-même qui luttai naguère avec la muse des Thermopyles, avec celle des collines!?
Elle dit; le moment suprême est venu et le héraut s'approche: ?Muse bretonne, s'écrie, les ardents, la fille de la Germanie, je t'aime, oh! je t'aime en t'admirant...
? Mais moins que l'immortalité, moins que la palme de la victoire! Saisis-la
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