terrains et édifices ne soient jamais vendus sous
quelque prétexte que ce soit, mais au contraire qu'il y soit fait, par
souscription ou autrement, toutes les améliorations ou additions que le
temps et le nombre des enfants orphelins pourront exiger."
Par de malheureuses coïncidences trop longtemps prolongées, ce legs
était resté inutile, une grande partie en avait même été détournée du but
auquel il était destiné.
Barthélemy Rey, François Lacroix, Nelson Fouché, Emilien Brulé,
Adolphe Duhart et quelques autres patriotes, ayant appris l'existence de
ce bien et l'abus qu'on en faisait, se mirent à la tête d'un mouvement qui
avait pour objet de contraindre l'exécuteur testamentaire à rendre un
compte de sa gestion.
Ce n'était pas chose facile, car douze années s'étaient écoulées avant
que les protecteurs du droit des orphelins eussent ainsi songé à obtenir
justice.
Lanusse, quoique jeune, s'était joint à cette propagande et dans le cours
du temps, en avait pris la direction militante.
Son énergie, unie à son intelligence, avait imprimé au mouvement une
force irrésistible, et cette impulsion n'a pas peu contribué aux résultats
obtenus. Dans tous les cas, en 1848, la bonne oeuvre était sauvée, rien
ne pouvait empêcher l'exécution des volontés de Mme Couvent.
Mais ce n'était pas tout. Ces biens ayant été entamés par des procédés
irréguliers, il fallait leur restituer leur intégrité et les organiser de
manière à les rendre profitables et durables.
M. Lanusse ici encore se montra à la hauteur de la tâche. Il s'entoura
d'hommes de bonne volonté, et tous se mirent courageusement à
l'oeuvre. Dans un court espace de temps, on érigea un nouvel édifice,
qu'on appela: Institution Catholique des Orphelins Indigents.
Les propriétés provenant du legs de Mme Couvent ont servi à
l'entretien de l'établissement, avec quelques autres contributions
particulières et publiques.
Comme conséquence logique, M. Lanusse, en 1852, fut nommé
Principal de l'Institution. On peut dire que l'histoire de cette dernière
commence avec lui.
C'est lui qui en a créé le programme d'études; c'est lui qui a mis ce
programme en pratique et c'est de lui que ses adjoints ou sous-maîtres
ont appris la manière de procéder.
Pour le seconder dans son oeuvre, il avait fait choix de Joanni Questy,
Constant Reynès et Joseph Vigneaux-Lavigne, tous des hommes d'un
mérite supérieur et d'un dévouement admirable. Sous une telle direction,
l'École a prospéré et est devenue fameuse par les élèves qu'elle a
formés. On n'eut plus à aller puiser le savoir aux sources européennes.
La jeunesse pouvait recevoir les éléments d'une éducation solide dans
les classes établies par Lanusse et à des prix placés à la portée de toutes
les bourses. Les orphelins et les enfants de parents pauvres n'avaient
plus à redouter les désavantages de l'ignorance.
On a sévèrement blâmé M. Lanusse de ce qu'il ait refusé de placer le
drapeau de l'Union sur le toit de son École, conformément à l'ordre du
général Butler. C'était une faute, nous en convenons, mais il agissait là
dans un de ces mouvements de la conscience que l'homme sensible ne
peut pas toujours maîtriser. Quoiqu'il en soit, il ne faut pas oublier que
Lanusse avait été conscrit dans la Confédération. Bien qu'il fût
parfaitement au courant des circonstances qui l'avaient forcé à prendre
les armes, il éprouvait néanmoins une certaine répugnance à se montrer
sous un jour douteux.
Nous nous empressons de dire que plus tard il est revenu sur ses idées
erronées et que dès lors, sa loyauté fut entièrement acquise à la cause
de l'Union et de la liberté. Il est à la connaissance de tous ses amis qu'il
a regretté cet incident, et ce repentir loyal devrait suffire à l'exonérer.
D'ailleurs, toute la suite de sa vie a prouvé qu'il n'y eut là qu'une erreur
de sa part, et qu'on ne peut suspecter les motifs qui l'ont fait agir en
cette occasion.
Le public, nous voulons le croire, n'a plus de reproches à lui faire à ce
sujet.
Certaines paroles de M. Lanusse peignent bien sa noblesse et sa
grandeur d'âme. Par exemple, son célèbre--"Nous n'irons
pas?"--exclamation dont il s'est servi, en 1861, alors que la population
menacée devait choisir entre l'exil et le service militaire, sous peine de
châtiment. C'est encore lui qui, dans un moment de juste indignation,
s'était écrié: "Dans l'humble sphère où je circule, qui m'y cherche, m'y
trouve."
Un certain personnage déclarait que le contact de l'homme de couleur
lui inspirait de la répugnance; à quoi M. Lanusse répliqua:
"Répugnance et instinct, chez vous, c'est la même chose".
On a vu cet homme, dans sa jeunesse, servant loyalement ses amis dans
leurs petites ambitions, rendant hommage au beau sexe, par devoir
plutôt que par inclination. Plus tard, vers la même époque, on le
retrouve au théâtre jouant la comédie avec Orso, notre célèbre tragédien.
Plus tard encore, on l'aperçoit dans la foule, luttant
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