Manuel complet des fabricans de chapeaux en tous genres | Page 3

Jean-Sébastien-Eugène Julia de Fontenelle
d'une manière spéciale de l'éducation des bêtes à laine, a conseillé aux manufacturiers de soumettre ces filamens de laine à un micromètre placé dans un microscope. Ce micromètre, dit M. Tessier, représentait un petit réseau ou un composé de mailles. Il n'y avait qu'un 10e de ligne entre les deux c?tés parallèles des carrés du micromètre dont se servait M. Daubenton, et sa lentille grossissait quatorze fois. Ayant reconnu, par des observations soigneusement faites, que les gros filamens[2] de vingt-neuf échantillons de laine superfine, apportés de diverses manufactures, occupaient rarement plus des deux carrés du micromètre, il a fixé le dernier terme des laines superfines à celles dont les plus gros filamens remplissent par leur largeur un carré du micromètre, et dont le diamètre est la 70e partie d'une ligne. La largeur des plus gros filamens de la laine la plus grossière occupait jusqu'à six carrés du micromètre, qui équivalent à la 23e partie d'une ligne. 5 Les plus gros filamens du jarre remplissaient jusqu'à onze carrés du micromètre, qui font 1712 de ligne. Un pareil examen est presque impraticable par les bergers, dont l'oeil et l'habitude suffisent pour cette opération. Nous ajouterons que sans recourir au micromètre de Daubenton, on peut fort aisément s'assurer du degré de finesse des laines au moyen du microscope d'Amici ou d'Euler, perfectionné par MM. Vincent Chevalier et fils.
[Note 2: Toutes les laines sont composées de fils très fins, et de plus ou moins gros. Ces derniers, d'après l'observation de Daubenton, se trouvent au bout des mèches.]
L'état de santé de l'animal et l'époque de la tonte influent singulièrement sur la bonté et la beauté des laines. Ainsi les animaux malades non seulement perdent une partie de leur laine, mais l'autre manquant de nourriture est sèche et se détache aisément de la peau. Il en est de même de celle qu'on extrait de ces animaux qui ont succombé. Quant à celle provenant des peaux des moutons tués pour la boucherie, ces laines s'éloignent d'autant plus de leur point de maturité que ces animaux ont été égorgés à une époque plus ou moins rapprochée de celle de leur tonte. Il manque à ces laines ce moelleux que leur communique le suint et qui les nourrit; si l'on ajoute à cela la chaux ou les cendres qu'on emploie pour les détacher de la peau, on se rendra compte de leur rudesse. Quant aux peaux à laine longue, les bouchers les font tondre en toison.
Il est donc bien évident que l'époque la meilleure pour couper les laines est celle où elles sont en pleine maturité. On ne doit pas dépasser ce point parce qu'en France les animaux, surtout ceux qui sont faibles, en perdent une partie[3]. Si on les tond, au 6 contraire, avant cette maturité, les filamens semblent adhérer entre eux par leur base, et la laine est, comme on dit, tendre, c'est-à-dire qu'elle manque de nerf ou de force.
[Note 3: Il n'en est pas de même des mérinos; ceux-ci, hors les cas de maladie, peuvent conserver leur laine jusqu'à trois ans, presque sans en perdre. Tessier, Nouveau Cours complet d'agriculture.]
Dans le midi de la France on tond les laines de la mi-mai au 15 juin; dans les autres départemens, dans tout ce dernier mois. Il est une raison qui doit engager les propriétaires à ne pas dépasser cette époque, c'est qu'alors les chaleurs survenant, les toisons, outre leur poids, interceptent la transpiration, échauffent l'animal et permettent à la vermine de s'y fixer, etc.
Le volume et le poids des toisons est relatif à la taille de l'animal, à son espèce et au climat sous lequel il vit, indépendamment des soins et de la nourriture plus ou moins abondante qu'on lui donne. Nous allons faire conna?tre, par aper?u, le poids de la plupart des laines connues, tel que M. Tessier l'a donné.
1o La toison des moutons alen?ons, ardennois et de la Sologne, pèse de deux à quatre livres. Cette dernière laine est entre-mêlée de poils roux et est impropre à la chapellerie. On en fait des couvertures.
2o Celle des moutons briards, bourbonnais, champenois et de Langres, pèse également de deux à quatre livres; elle est employée pour la bonneterie, et très peu propre à la chapellerie.
3o Celle des moutons du Bar pèse trois livres. La première qualité sert pour la bonneterie et à faire des ratines.
4o Celle des moutons de Faux, Valières ou Bocagers, pèse de trois à quatre livres. La plus grande partie de ces laines est mêlée de blanc, de noir et de rouge, ce qu'en termes de bonneterie on nomme beige. On en fait de grosses étoffes sans avoir besoin de les teindre.
5o Celle des moutons du Cotentin pèse trois livres.
6o Celle des moutons de Cauchois, cinq livres. Elle est unie à quelques poils roux. On en fait des couvertures et des draps dits de
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