Lettre a Louis XIV
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Title: Lettre a Louis XIV
Author: Fran?ois de Salignac de La Mothe F��nelon et Henri Guillemin
Release Date: November 1, 2004 [EBook #13914]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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LETTRE A LOUIS XIV
par
Fran?ois de Salignac de la Mothe F��nelon
La personne, Sire[1], qui prend la libert�� de vous ��crire cette lettre, n'a aucun int��r��t en ce monde. Elle ne l'��crit ni par chagrin, ni par ambition, ni par envie de se m��ler des grandes affaires. Elle vous aime sans ��tre connue de vous; elle regarde Dieu en votre personne. Avec toute votre puissance, vous ne pouvez lui donner aucun bien qu'elle d��sire, et il n'y a aucun mal qu'elle ne souffr?t de bon coeur pour vous faire conna?tre les v��rit��s n��cessaires �� votre salut. Si elle vous parle fortement, n'en soyez pas ��tonn��, c'est que la v��rit�� est libre et forte. Vous n'��tes gu��re accoutum�� �� l'entendre. Les gens accoutum��s �� ��tre flatt��s prennent ais��ment pour chagrin, pour apret�� et pour exc��s, ce qui n'est que la v��rit�� toute pure. C'est la trahir que de ne vous la montrer pas dans toute son ��tendue. Dieu est t��moin que la personne qui vous parle le fait avec un coeur plein de z��le, de respect, de fid��lit�� et d'attendrissement sur tout ce qui regarde votre v��ritable int��r��t.
[Note 1: Les indices historiques mentionn��s dans la lettre �� Louis XIV laissent pr��sumer qu'elle fut ��crite en 1694. F��nelon ��tait alors pr��cepteur du duc de Bourgogne, petit-fils de Louis XIV.]
Vous ��tes n��, Sire, avec un coeur droit et ��quitable; mais ceux qui vous ont ��lev�� ne vous ont donn�� pour science de gouverner que la d��fiance, la jalousie, l'��loignement de la vertu, la crainte de tout m��rite ��clatant, le go?t des hommes souples et rampants, la hauteur et l'attention �� votre seul int��r��t.
Depuis environ trente ans, vos principaux ministres ont ��branl�� et renvers�� toutes les anciennes maximes de l'Etat, pour faire monter jusqu'au comble votre autorit�� qui ��tait devenue la leur parce qu'elle ��tait dans leurs mains. On n'a plus parl�� de l'Etat ni des r��gles; on n'a parl�� que du Roi et de son bon plaisir. On a pouss�� vos revenus et vos d��penses �� l'infini. On vous a ��lev�� jusqu'au ciel, pour avoir effac��, disait-on, la grandeur de tous vos pr��d��cesseurs ensemble, c'est-��-dire pour avoir appauvri la France enti��re, afin d'introduire �� la cour un luxe monstrueux et incurable. Ils ont voulu vous ��lever sur les ruines de toutes les conditions de l'Etat, comme si vous pouviez ��tre grand en ruinant tous vos sujets, sur qui votre grandeur est fond��e. Il est vrai que vous avez ��t�� jaloux de l'autorit��, peut-��tre m��me trop, dans les choses ext��rieures; mais, pour le fond, chaque ministre a ��t�� le ma?tre dans l'��tendue de son administration. Vous avez cru gouverner, parce que vous avez r��gl�� les limites entre ceux qui gouvernent. Ils ont bien montr�� au public leur puissance, et on ne l'a que trop sentie. Ils ont ��t�� durs, hautains, injustes, violents, de mauvaise foi. Ils n'ont connu d'autre r��gle, ni pour l'administration du dedans de l'Etat, ni pour les n��gociations ��trang��res, que de menacer, que d'��craser, que d'an��antir tout ce qui leur r��sistait. Ils ne vous ont parl�� que pour ��carter de vous tout m��rite qui pouvait leur faire ombrage. Ils vous ont accoutum�� �� recevoir sans cesse des louanges outr��es qui vont jusqu'�� l'idolatrie, et que vous auriez d?, pour votre honneur, rejeter avec indignation. On a rendu votre nom odieux, et toute la nation fran?aise insupportable �� tous nos voisins. On n'a conserv�� aucun ancien alli��, parce qu'on n'a voulu que des esclaves. On a caus�� depuis plus de vingt ans des guerres sanglantes. Par exemple, Sire, on fit entreprendre �� Votre Majest��, en 1672, la guerre de Hollande pour votre gloire et pour punir les Hollandais qui avaient fait quelque raillerie, dans le chagrin o�� on les avait mis en troublant les r��gles de commerce ��tablies par le cardinal de Richelieu. Je cite en particulier cette guerre, parce qu'elle a ��t�� la source de toutes les autres. Elle n'a eu pour fondement qu'un motif de gloire et de vengeance, ce qui ne peut jamais rendre une guerre juste; d'o�� il s'ensuit que toutes les fronti��res que vous avez ��tendues par cette guerre, sont injustement acquises dans l'origine. Il est vrai, Sire, que les trait��s de
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