Les vaines tendresses | Page 2

Sully Prudhomme
l'extase, pareille �� ces bulles t��nues?Qu'un souffle patient et peureux all��gea,
S'��vanouit si pr��s des nues
Qui s'y miraient d��j��.
Sois g��n��reuse, ��pargne �� des songeurs cr��dules?Ta grace, et de tes yeux les appels d��cevants:
Ils chercheraient des cr��puscules
Dans ces soleils levants;
Il leur faut une amie �� s'attendrir facile,?Souple �� leurs vains soupirs comme aux vents le roseau,
Dont le coeur leur soit un asile
Et les bras un berceau,
Douce, infiniment douce, indulgente aux chim��res,?In��puisable en soins calmants ou r��chauffants,
Soins muets comme en ont les m��res,
Car ce sont des enfants.
Il leur faut pour t��moin, dans les heures d'��tude,?Une ame qu'autour d'eux ils sentent se poser,
Il leur faut une solitude
O�� voltige un baiser.
Jeune fille, crois-m'en, cherche qui te ressemble,?Ils sont graves ceux-l��, ne choisis aucun d'eux,
Vous seriez malheureux ensemble
Bien qu'innocents tous deux.
[Illustration]
[Illustration]
AU BORD DE L'EAU
S'asseoir tous deux au bord d'un flot qui passe,
Le voir passer;?Tous deux, s'il glisse un nuage en l'espace,
Le voir glisser;?�� l'horizon, s'il fume un toit de chaume,
Le voir fumer;?Aux alentours si quelque fleur embaume,
S'en embaumer;?Si quelque fruit, o�� les abeilles go?tent,
Tente, y go?ter;?Si quelque oiseau, dans les bois qui l'��coutent,
Chante, ��couter...?Entendre au pied du saule o�� l'eau murmure
L'eau murmurer;?Ne pas sentir, tant que ce r��ve dure,
Le temps durer;?Mais n'apportant de passion profonde
Qu'�� s'adorer,?Sans nul souci des querelles du monde,
Les ignorer;?Et seuls, heureux devant tout ce qui lasse,
Sans se lasser,?Sentir l'amour, devant tout ce qui passe,
Ne point passer!
[Illustration]
[Illustration: frise]
EN VOYAGE
Je partais pour un long voyage.?En wagon, tapi dans mon coin,?J'��coutais fuir l'aigu sillage?Du sifflet dans la nuit au loin;
Je go?tais la vague indolence,?L'��tat obscur et somnolent,?O�� fait tomber sans qu'on y pense?Le train qui bourdonne en roulant;
Et je ne m'apercevais gu��re,?Indiff��rent de bonne foi,?Qu'une jeune fille et sa m��re?Faisaient route �� c?t�� de moi.
Elles se parlaient �� voix basse:?C'��tait comme un bruit de frisson,?Le bruit qu'on entend quand on passe?Pr��s d'un nid le long d'un buisson;
Et bient?t elles se blottirent,?Leurs fronts l'un vers l'autre pench��s,?Comme deux gouttes d'eau s'attirent?D��s que les bords se sont touch��s;
Puis, joue �� joue, avec tendresse?Elles se firent toutes deux?Un oreiller de leur caresse,?Sous la lampe aux rayons laiteux.
L'enfant sur le bras de ma stalle?Avait laiss�� poser sa main,?Qui refl��tait comme une opale?La moiteur d'un jour incertain;
Une main de seize ans �� peine:?La manchette l'ombrait un peu;?L'azur d'une petite veine?La nuan?ait comme un fil bleu;
Elle pendait molle et dormante,?Et je ne sais si mon regard?Pressentit qu'elle ��tait charmante?Ou la rencontra par hasard,
Mais je m'��tais tourn�� vers elle,?Sollicit�� sans le savoir:?On dirait que la grace appelle?Avant m��me qu'on l'ait pu voir.
?Heureux, me dis-je, le touriste?Que cette main-l�� guiderait!??Et ce songe me rendait triste:?Un voeu n'��cl?t que d'un regret.
Cependant glissaient les campagnes?Sous les fougueux rouleaux de fer,?Et le profil noir des montagnes?Ondulait ainsi qu'une mer.
Force ��trange de la rencontre!?Le coeur le moins prime-sautier?D'un lambeau d'azur qui se montre?Improvise un ciel tout entier:
Une enfant dort, une ��trang��re,?Dont la main para?t �� demi,?Et ce peu d'elle me sugg��re?Un voeu de bonheur infini!
Je la r��ve, inconnue encore,?Sur ce peu de r��alit��,?Belle de tout ce que j'ignore?Et du possible illimit��...
Je r��ve qu'une main si blanche,?D'un si confiant abandon,?Ne peut ��tre que s?re et franche?Et se donnerait tout de bon.
Bienheureux l'homme qu'au passage?Cette main fine encha?nerait!?Calme �� jamais, �� jamais sage...?--Vitry! cinq minutes d'arr��t!
A ces mots cri��s sur la voie?Le couple d'anges s'��veilla,?Battit des ailes avec joie,?Et disparut. Je restai l��:
Cette enfant qu'un autre e?t suivie,?Je me la laissais enlever.?Un voyage! telle est la vie?Pour ceux qui n'osent que r��ver.
SONNET
A LA PETITE SUZANNE D...
En ces temps o�� le coeur ��cl?t pour s'avilir,?O�� des races le sang fatigu�� d��g��n��re,?Tu nous ��pargneras, Suzanne, enfant prosp��re,?De voir en toi la fleur du genre humain palir.
Deux artistes puissants sont jaloux d'embellir?En toi l'ame immortelle et l'argile ��ph��m��re:?Le dieu de la nature et celui de ta m��re;?L'un travaille �� t'orner, et l'autre �� t'ennoblir.
L'enfant de Bethl��em fa?onne �� sa caresse?Ta grace, o�� cependant des enfants de la Gr��ce?Sourit encore aux yeux le mod��le invaincu.
Et par cette alliance ing��nument profonde,?Dans une m��me femme auront un jour v��cu?L'un et l'autre Id��al qui divisent le monde.
ENFANTILLAGE
Madame, vous ��tiez petite,
J'avais douze ans;?Vous oubliez vos courtisans
Bien vite!
Je ne voyais que vous au jeu
Parmi les autres;?Mes doigts fr?laient parfois les v?tres
Un peu...
Comme �� la premi��re visite
Faite au rosier,?Le papillon sans appuyer
Palpite,
Et de feuille en feuille, h��sitant,
S'approche, et n'ose?Monter droit au miel que la rose
Lui tend,
Tremblant de ses premi��res fi��vres
Mon coeur n'osait?Voler droit des doigts qu'il baisait
Aux l��vres.
Je sentais en moi tour �� tour
Plaisir et peine,?Un m��lange d'aise et de g��ne:
L'amour.
L'amour �� douze ans! Oui, madame,
Et vous aussi,?N'aviez-vous pas quelque souci
De femme?
Vous faisiez beaucoup d'embarras,
Tr��s-occup��e?De votre robe, une poup��e
Au bras.
Si j'adorais, trop t?t po?te,
Vos petits pieds,?Trop t?t belle, vous me courbiez
La t��te.
Nous menames si bien, un soir,
Le badinage,?Que nous nous m?mes en m��nage,
Pour voir.
Vous parliez des bijoux de noces,
Moi du serment,?Car nous ��tions diff��remment
Pr��coces.
On fit la d?nette, on dansa;
Vous pr��tend?tes?Qu'il n'est noces proprement dites
Sans ?a.
Vous go?tiez la plaisanterie
Tant que
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