Les joyeuses Bourgeoises de Windsor | Page 4

William Shakespeare
vos bisbilles pour demander un mariage entre M. Abraham et mistriss Anne Page.
SLENDER.--Son grand-père lui a laissé sept cents livres?
EVANS.--Oui, et son père est bon pour lui donner une meilleure somme.
SHALLOW.--Je connais la jeune demoiselle; elle a d'heureux dons de la nature.
EVANS.--Sept cents livres avec les espérances, ce sont d'heureux dons que cela.
SHALLOW.--Eh bien! voyons de ce pas l'honnête M. Page.--Falstaff est-il dans la maison?
EVANS.--Vous dirai-je un mensonge? Je méprise un menteur comme je méprise un homme faux, ou comme je méprise un homme qui n'est pas vrai. Le chevalier, sir John, est dans la maison, et, je vous prie, laissez-vous conduire par ceux qui vous veulent du bien. Je vais frapper à la porte pour demander M. Page. (Il frappe.) Holà! holà! que Dieu bénisse votre logis!
(Entre Page.)
PAGE.--Qui est là?
EVANS.--Une bénédiction de Dieu, et votre ami, et le juge Shallow, et voici le jeune monsieur Slender qui pourra, par hasard, vous conter une autre histoire, si la chose était de votre go?t.
PAGE.--Je suis fort aise de voir Vos Seigneuries en bonne santé. Monsieur Shallow, je vous remercie de votre gibier.
SHALLOW.--Monsieur Page, je suis bien aise de vous voir. Grand bien vous fasse. J'aurais voulu que le gibier f?t meilleur. Il avait été tué contre le droit.--Comment se porte la bonne mistriss Page? et je vous aime toujours de tout mon coeur, là, de tout mon coeur.
PAGE.--Monsieur, je vous remercie.
SHALLOW.--Monsieur, je vous remercie: que vous le veuillez où non, je vous remercie.
PAGE.--Je suis bien aise de vous voir, mon bon monsieur Slender.
SLENDER.--Comment se porte votre lévrier fauve, monsieur? J'entends dire qu'il a été dépassé à Cotsale.
PAGE.--On n'a pas pu décider la chose, monsieur.
SLENDER.--Vous n'en conviendrez pas, vous n'en conviendrez pas.
SHALLOW.--Non, il n'en conviendra pas.--C'est votre faute, c'est votre faute.--C'est un beau chien.
PAGE.--Non, monsieur, c'est un roquet.
SHALLOW.--Monsieur, c'est un bon chien et un beau chien; on ne peut pas dire plus, il est bon et beau. Sir John Falstaff est-il ici?
PAGE.--Oui, monsieur; il est à la maison, et je souhaiterais pouvoir interposer mes bons offices entre vous.
EVANS.--C'est parler comme un chrétien doit parler.
SHALLOW.--Il m'a offensé, monsieur Page.
PAGE.--Monsieur, il en convient en quelque sorte.
SHALLOW.--Pour être avouée, la chose n'est pas réparée; cela n'est-il pas vrai, monsieur Page? il m'a offensé; oui offensé, sur ma foi: en un mot, il m'a fait une offense.--Croyez-moi: Robert Shallow, écuyer, dit qu'il est offensé.
(Entrent sir John Falstaff, Bardolph, Nym, Pistol.)
PAGE.--Voilà sir John.
FALSTAFF.--Eh bien! monsieur Shallow, vous voulez donc porter plainte au roi contre moi?
SHALLOW.--Chevalier, vous avez battu mes gens, tué mon daim et enfoncé la porte de ma réserve.
FALSTAFF.--Mais je n'ai pas baisé la fille de votre garde.
SHALLOW.--Ce n'est pas de cela qu'il s'agit.--Vous aurez à en répondre.
FALSTAFF.--Je vais répondre sur-le-champ: j'ai fait tout cela. Voilà ma réponse.
SHALLOW.--Le conseil conna?tra de l'affaire.
FALSTAFF.--Il vaudrait mieux pour vous que personne[8] n'en conn?t rien; on se moquera de vous.
EVANS.--Pauca verba, sir John, et de bonnes choses.
FALSTAFF.--De bonnes chausses? de bons-bas[9]?--Slender, je vous ai fracassé la tête: quelle affaire avez-vous avec moi?
SLENDER.--Vraiment je l'ai dans ma tête, mon affaire contre vous, et contre vos coquins de filous, Bardolph, Nym et Pistol. Ils m'ont conduit à la taverne, m'ont enivré, et puis m'ont pris tout ce que j'avais dans mes poches.
BARDOLPH.--Comment! fromage de Banbury?
SLENDER.--Bien, bien il ne s'agit pas de cela.
PISTOL.--Comment, Méphistophélès[10]?
SLENDER.--A la bonne heure, mais il ne s'agit pas de cela.
NYM.--Une balafre. Je dis: pauca, pauca. Une balafre, voilà la chose[11].
[Note 8: 'Twere better for you, if it were known in counsel. ?Il vaudrait mieux pour vous que cela ne f?t connu qu'en secret (counsel).? Falstaff joue ici sur le mot de council (conseil), dont s'est servi Shallow.]
[Note 9: Evans a dit, avec sa mauvaise prononciation: Good worts pour good words (de bonnes paroles). Falstaff répond: Good worts, good cabbage. Cabbage signifie chou, et worts est un vieux mot ayant la même signification. On a cherché à rendre ce jeu de mots par un équivalent.]
[Note 10: Nom d'un diable au service de Faust.]
[Note 11: That is my humour. Il para?t que le mot humour était une expression à la mode dont on faisait un grand abus du temps de Shakspeare. Il le met à tout propos, et hors de propos, dans la bouche de Nym. On n'a vu que le mot chose qui p?t le remplacer convenablement dans toutes les occasions.]
SLENDER.--Oh! où est Simple, mon valet? Le savez-vous, mon cousin?
EVANS.--Paix, je vous prie.--A présent, entendons-nous: il y a, comme je l'entends, les trois arbitres dans cette affaire, il y a M. Page, videlicet M. Page; et il y a moi, videlicet moi; finalement et dernièrement enfin, le troisième est l'h?te de la Jarretière.
PAGE.--Nous trois, pour conna?tre de l'affaire, et rédiger l'accommodement entre eux.
EVANS.--Parfaitement, j'écrirai un précis de l'affaire sur mes tablettes. Et nous travaillerons ensuite sur la chose avec une aussi grande prudence que nous le pourrons.
FALSTAFF.--Pistol?
PISTOL.--Il écoute de ses
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