de son règne, il s'appliqua assez exactement à suivre la règle de conduite que l'évêque de Comminges lui avait tracée, en lui transmettant les voeux de l'assemblée, générale du clergé: ?Nous ne demandons pas à Votre Majesté, disait ce prélat opportuniste, qu'elle bannisse dès à présent cette malheureuse liberté de conscience, qui détruit la véritable liberté des enfants de Dieu, parce que nous ne croyons pas que l'exécution en soit facile; mais nous souhaiterions au moins que le mal ne fit point de progrès; et que, si votre autorité ne le peut étouffer tout d'un coup, ou le rendit languissant, et le fit périr peu à peu, par le retranchement et la diminution de ses forces.?
En effet, dans les mémoires qu'il faisait rédiger pour l'instruction de son fils, mémoires qui ne s'étendent qu'aux dix premières années de son règne, Louis XIV expose ainsi son plan de conduite envers les huguenots:
?J'ai cru que le meilleur moyen; pour réduire peu à peu les huguenots de mon royaume, était de ne les point presser du tout par aucune rigueur nouvelle; de faire observer ce qu'ils avaient obtenu sous les règnes précédents, mais aussi de ne leur accorder rien de plus et d'en renfermer l'exécution dans les plus étroites bornes que la justice et la bienséance le pourraient permettre.
?Quant aux graces qui dépendaient de moi seul, je résolus, et j'ai assez ponctuellement observé depuis, de n'en faire aucune à ceux de cette religion, et cela par bonté, non par aigreur, pour les obliger par là à considérer de temps en temps d'eux-mêmes, et sans violence, si c'était par quelque bonne raison qu'ils se privaient volontairement des avantages qui pouvaient leur être communs avec mes autres sujets; je résolus aussi d'attirer par des récompenses ceux qui se rendraient dociles mais il s'en faut encore beaucoup que je n'aie employé tous les moyens que j'ai dans l'esprit, pour ramener ceux que la naissance, l'éducation, et le plus souvent un grand zèle sans connaissance, tiennent de bonne foi, dans ces pernicieuses erreurs.?
Nous verrons dans les chapitres de la liberté du culte et de la liberté de conscience ce que Louis XIV fit des droits religieux des protestants, sous prétexte de renfermer l'exécution des édits dans les plus, étroites bornes.
Il ne respecta pas davantage leurs droits civils, et finit par leur fermer l'accès de toutes les fonctions publiques et d'un grand nombre de professions, au mépris de la disposition de l'édit de Nantes qui stipulait l'égalité des droits, pour les protestants et pour les catholiques.
Voici, par exemple, comment il en arrive à exclure peu à peu les huguenots de toute charge de judicature. Il commence par interdire aux huguenots conseillers au parlement de conna?tre toute affaire dans laquelle sont intéressés des ecclésiastiques ou des nouveaux convertis; puis il prononce la même interdiction contre les conseillers catholiques, mariés à des huguenotes, attendu que les réformés trouvaient accès auprès de ces officiers de justice, par le moyen de leurs femmes, aux prières et aux sollicitations desquelles, ces officiers se laissaient souvent persuader; enfin il décide que les conseillers huguenots doivent tous donner leur démission, attendu qu'ils ne peuvent rester constitués en dignité, et donner un mauvais exemple à ses sujets par leur opiniatreté, au lieu de les exciter à quitter leurs erreurs pour rentrer dans le giron de l'église. Il défend aux huguenots de se faire nommer opinants ou assesseurs ce qui leur permettrait de se rendre ma?tres des affaires ainsi qu'auparavant; il leur interdit même d'accepter les fonctions d'experts, parce que ?les juges étant obligés de se conformer aux rapports des experts, lorsque ces experts sont réformés, les catholiques sont exposés aux jugements de ces réformés.?
Enfin, il assimile les fonctions d'avocat aux charges de la judicature, et défend aux huguenots d'exercer ces fonctions, considérant ?que les avocats ont beaucoup de part dans la poursuite des procès, en donnant aux parties leurs avis sur la conduite qu'elles ont à y tenir.?
à la veille de la révocation, sous les prétextes les plus vains et les plus fantaisistes, les huguenots se trouvaient légalement exclus des fonctions et professions de: ?Secrétaires du roi, conseillers au parlement, procureurs du roi, juges, assesseurs, greffiers, notaires, procureurs, recors, sergents, clercs, experts, avocats, docteurs ès lois dans les universités, monnayeurs, adjudicataires ou employés dans les fermes royales; employés dans les finances, fermiers des biens ecclésiastiques, revendeurs de consignations, commissaires aux saisies, lieutenants de louveterie, officiers de la maréchaussée, officiers ou domestiques de la maison du roi, de la reine ou des princes de la maison royale, marchands privilégiés suivant la cour, messagers publics, loueurs de chevaux, h?teliers, cabaretiers, cordonniers, orfèvres, marchandes lingères, apothicaires, épiciers, instituteurs, libraires, imprimeurs, ma?tres d'équitation, chirurgiens, médecins, accoucheurs ou sages-femmes...?
Un certain nombre de ces interdictions étaient basées, contrairement à une disposition formelle de l'édit de Nantes, sur la clause de catholicité; c'est ainsi,
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