toutes fra?ches ��taient celles des paysans d'origine bulgare, bien reconnaissables �� leurs costumes. Certains avaient d? se r��fugier chez eux pour attendre l'arriv��e des troupes du Nord, dont la venue avait ��t�� signal��e; d'autres ��taient sortis du village pour courir au-devant d'elles, mais les uns et les autres avaient ��t�� rejoints et atteints par les Turcs du village m��me et de la contr��e environnante, lesquels, avant de se retirer devant l'envahisseur, faisaient place nette et passaient au fil de l'��p��e ou du pal tout ce qui appartenait �� la race ennemie... Un petit ruisseau roulait, en chantant joyeusement, des troncs sans t��te... Mais ce fut en entrant dans le village m��me que nos jeunes gens qui, �� chaque instant, laissaient ��chapper des cris d'horreur, purent juger de l'importance du massacre et de l'ampleur prise par le sacrifice que MM. les Turcs avaient offert, en guise d'adieu, au Dieu de la guerre! T��tes abattues, troncs empal��s, femmes ��ventr��es, enfants embroch��s, mamelles coup��es, rien n'avait manqu�� �� cette f��te du sang. --C'est horrible!... c'est abominable!... hurlait La Candeur, derri��re Rouletabille qui ne disait rien et qui avait ��t�� pr��par�� �� toutes ces horreurs par ce qu'il avait vu de pr��s, au Maroc et au Caucase, particuli��rement �� Bakou et �� Balakani, lors des massacres entre Tatares et Arm��niens. Il n'avait d'yeux que pour une silhouette cavali��re qui venait de surgir au coin d'une ruelle... Ivana!... C'��tait elle!... Il ne pouvait en douter, c'��tait elle!... Les avait-elle vus? Elle ��tait soudain partie dans un galop de folie et avait enlev�� son cheval par-dessus un monceau de d��combres et de cadavres fumants... En m��me temps elle avait jet�� un grand cri sauvage, tir�� son sabre du fourreau et, le brandissant dans un moulinet stup��fiant au-dessus de sa t��te, avait disparu au coin d'une autre ruelle qui conduisait �� la place de la Mosqu��e, dont on apercevait le haut minaret envelopp�� de flammes. Rouletabille demanda un supr��me effort �� son cheval qui, depuis quelques instants, montrait des signes de fatigue... Il voulut l'enlever, lui aussi; mais la b��te buta au milieu des d��combres et le reporter roula sur le sol avec sa monture, contre laquelle vinrent donner La Candeur, Vladimir et Tondor. Ce fut une chute g��n��rale et fort brutale dont les reporters, ainsi que leur domestique, se relev��rent assez ��clop��s. Rouletabille n��anmoins se mit �� courir dans la direction suivie par Ivana. Ses camarades le suivirent cahin-caha. On entendit alors des coups de feu et un certain tumulte du c?t�� de la place du village. Ils allaient d��boucher sur celle-ci quand ils ne furent pas peu surpris d'��tre arr��t��s par Ivana elle-m��me qui se trouvait �� pied comme eux tous. Sa b��te fumante tomb��e aupr��s d'elle, au milieu de la rue, ruait des quatre fers, en agonie, le poitrail frapp�� d'une balle. Un bruit de bataille, le cr��pitement de la mousqueterie ��clatait �� quelques pas et des projectiles vinrent siffler �� leurs oreilles. Ivana ��tait dans une agitation extraordinaire. Elle leur ordonna, les bras ��tendus, de ne pas aller plus loin! --Les Turcs massacrent tout! Ils n'ont pas encore abandonn�� le village; m��fions-nous... ils ne nous ��pargneraient pas! --Et Gaulow? demanda Rouletabille. --Il a rejoint les Turcs! r��pondit-elle d'une voix sombre. Il s'en est fallu de quelques minutes que je ne le rattrape... --Gaulow s'est donc ��chapp��! gronda une voix bien connue. Tous se retourn��rent. Athanase Khetew venait d'arriver derri��re eux, tout juste pour entendre la phrase d'Ivana. Il eut un geste de mal��diction sur sa b��te fumante et regarda avec m��pris les reporters. --Je vous l'avais confi��... dit-il simplement. Ivana prit la parole: --Nous avons ��t�� trahis au dernier moment par le _Katerdjibaschi_ (chef des muletiers)... C'est lui qui lui a procur�� la corde pour s'��chapper du donjon. Aussit?t que nous nous en sommes aper?us, nous ne vous avons m��me pas attendu, Athanase Khetew! malgr�� tout le d��sir que nous avions de vous revoir et de vous f��liciter (ici une voix ��trangement douce et caline) et nous avons couru apr��s le monstre!... --C'est donc une revanche �� prendre! fit Athanase qui ��tait devenu singuli��rement rouge en regardant Ivana Vilitchkov... --Et une partie �� recommencer! d��clara-t-elle avec d��sinvolture. --Vous devez regretter de ne point lui avoir coup�� la t��te quand je vous l'ai amen��!... continua Athanase d'une voix sourde... --_��videmment, mon cher!_ Et elle lui tourna le dos pour s'int��resser �� autre chose. Athanase semblait tr��s occup�� �� dompter une irritation peu ordinaire. Rouletabille ��coutait et regardait. Le cynisme incroyable d'Ivana le mettait, lui aussi, en fureur. Les regards du reporter et du Bulgare se crois��rent. Les deux hommes se comprirent-ils? Athanase dit: --Nous retrouverons Gaulow!... --Oui, fit Rouletabille... et, cette fois, nous nous arrangerons pour ne pas le laisser ��chapper! Ivana tressaillit. Cependant elle demanda sur un ton qu'elle voulait rendre indiff��rent: --Qu'allons-nous
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