abandonna, Bilitis quitta la Pamphylie, d'une fa?on assez myst��rieuse, et ne revit jamais le lieu de sa naissance.
Nous la retrouvons ensuite �� Mytil��ne o�� elle ��tait venue par la route de mer en longeant les belles c?tes d'Asie. Elle avait �� peine seize ans, selon les conjectures de M. Heim qui ��tablit avec vraisemblance quelques dates dans la vie de Bilitis, d'apr��s un vers qui fait allusion �� la mort de Pittakos.
Lesbos ��tait alors le centre du monde. �� mi-chemin, entre la belle Attique et la fastueuse Lydie, elle avait pour capitale une cit�� plus ��clair��e qu'Ath��nes et plus corrompue que Sardes: Mytil��ne, batie sur une presqu'?le en vue des c?tes d'Asie. La mer bleue entourait la ville. De la hauteur des temples on distinguait �� l'horizon la ligne blanche d'Atarn��e qui ��tait le port de Pergame.
Les rues ��troites et toujours encombr��es par la foule resplendissaient d'��toffes bariol��es, tuniques de pourpre et d'hyacinthe, cyclas de soies transparentes, bassaras tra?nantes dans la poussi��re des chaussures jaunes. Les femmes portaient aux oreilles de grands anneaux d'or enfil��s de perles brutes, et aux bras des bracelets d'argent massif grossi��rement cisel��s en relief. Les hommes eux-m��mes avaient la chevelure brillante et parfum��e d'huiles rares. Les chevilles des Grecques ��taient nues dans le cliquetis des periscelis, larges serpents de m��tal clair qui tintaient sur les talons; celles des Asiatiques se mouvaient en des bottines molles et peintes. Par groupes, les passants stationnaient devant des boutiques tout en fa?ade et o�� l'on ne vendait que l'��talage: tapis de couleurs sombres, housses broch��es de fils d'or, bijoux d'ambre et d'ivoire, selon les quartiers. L'animation de Mytil��ne ne cessait pas avec le jour; il n'y avait pas d'heure si tardive, o�� l'on n'entend?t, par les portes ouvertes, des sons joyeux d'instruments, des cris de femmes, et le bruit des danses. Pittakos m��me, qui voulait donner un peu d'ordre �� cette perp��tuelle d��bauche, fit une loi qui d��fendait aux joueuses de fl?tes trop fatigu��es de s'employer dans les festins nocturnes; mais cette loi ne fut jamais s��v��re.
Dans une soci��t�� o�� les maris sont la nuit si occup��s par le vin et les danseuses, les femmes devaient fatalement se rapprocher et trouver entre elles la consolation de leur solitude. De l�� vint qu'elles s'attendrirent �� ces amours d��licates, auxquelles l'antiquit�� donnait d��j�� leur nom, et qui entretiennent, quoi qu'en pensent les hommes, plus de passion vraie que de vicieuse recherche.
Alors, Sapph? ��tait encore belle. Bilitis l'a connue, et elle nous parle d'elle sous le nom de Psappha quelle portait �� Lesbos. Sans doute ce fut cette femme admirable qui apprit �� la petite Pamphylienne l'art de chanter en phrases rhythm��es, et de conserver �� la post��rit�� le souvenir des ��tres chers. Malheureusement Bilitis donne peu de d��tails sur cette figure aujourd'hui si mal connue, et il y a lieu de le regretter, tant le moindre mot e?t ��t�� pr��cieux touchant la grande Inspiratrice. En revanche elle nous a laiss�� en une trentaine d'��l��gies l'histoire de son amiti�� avec une jeune fille de son age qui se nommait Mnasidika, et qui v��cut avec elle. D��j�� nous connaissions le nom de cette jeune fille par un vers de Sapph? o�� sa beaut�� est exalt��e; mais ce nom m��me ��tait douteux, et Bergk ��tait pr��s de penser qu'elle s'appelait simplement Mna?s. Les chansons qu'on lira plus loin prouvent que cette hypoth��se doit ��tre abandonn��e. Mnasidika semble avoir ��t�� une petite fille tr��s douce et tr��s innocente, un de ces ��tres charmants qui ont pour mission de se laisser adorer, d'autant plus ch��ris qu'ils font moins d'efforts pour m��riter ce qu'on leur donne. Les amours sans motifs durent le plus longtemps: celui-ci dura dix ann��es. On verra comment il se rompit par la faute de Bilitis, dont la jalousie excessive ne comprenait aucun ��clectisme.
Quand elle sentit que rien ne la retenait plus �� Mytil��ne, sinon des souvenirs douloureux, Bilitis f?t un second voyage: elle se rendit �� Chypre, ?le grecque et ph��nicienne comme la Pamphylie elle-m��me et qui dut lui rappeler souvent l'aspect de son pays natal.
Ce fut l�� que Bilitis recommen?a pour la troisi��me fois sa vie, et d'une fa?on qu'il me sera plus difficile de faire admettre si l'on na pas encore compris �� quel point l'amour ��tait chose sainte chez les peuples antiques. Les courtisanes d'Amathonte n'��taient pas comme les n?tres, des cr��atures en d��ch��ance exil��es de toute soci��t�� mondaine; c'��taient des filles issues des meilleures familles de la cit��, et qui remerciaient Aphrodit�� de la beaut�� qu'elle leur avait donn��e, en consacrant au service de son culte cette beaut�� reconnaissante. Toutes les villes qui poss��daient comme celles de Chypre un temple riche en courtisanes avaient �� l'��gard de ces femmes les m��mes soins respectueux.
L'incomparable histoire de Phryn��, telle qu'Ath��n��e nous l'a transmise, donnera quelque id��e d'une telle v��n��ration. Il n'est
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