Les Aventures de John Davys | Page 7

Alexandre Dumas, père
le soir, au lieu de faire sa partie comme d��habitude, il se retirait dans sa chambre en d��fendant qu��on le suiv?t. Quant aux repas et, �� la lecture, il ne mangeait plus que juste ce qu��il fallait pour vivre, et ne lisait plus du tout?; il ��tait, d��ailleurs, devenu intraitable sous le rapport des jus d��herbes, et, depuis que sa r��pugnance pour ces sortes de boissons avait ��t�� pouss��e au point qu��il avait jet�� au nez de Georges une tasse de ce liquide que le pauvre valet de chambre voulait, dans une bonne intention, le forcer d��avaler, personne ne s����tait plus hasard�� �� reparler d��infusions am��res, et Tom les avait remplac��es par du th�� dans lequel il ��tendait, au lieu de cr��me, une cuiller��e et demie de rhum.
Cependant toutes ces rebellions contre l��ordonnance du docteur laissaient prendre au mal une intensit�� chaque jour plus grande?; sir ��douard n����tait plus que l��ombre de lui-m��me?: toujours solitaire et sombre, �� peine si l��on pouvait tirer de lui une parole qui ne f?t pas accompagn��e d��un signe visible d��impatience. Il avait adopt��, dans le parc, une all��e ��cart��e, au bout de laquelle ��tait un berceau ou plut?t une v��ritable grotte de verdure form��e par l��entrelacement des branches?: c����tait l�� qu��il se retirait et demeurait des heures enti��res, sans que personne osat le d��ranger?; c����tait inutilement que le fid��le Tom et le digne Sanders passaient et repassaient, avec intention, �� port��e de son regard?; il semblait ne pas les voir, pour n����tre pas oblig�� de leur adresser la parole. Ce qu��il y avait de pis dans tout cela, c��est que chaque jour ce besoin de solitude ��tait plus grand, et que le temps que le capitaine passait hors de la compagnie des commensaux du chateau ��tait plus consid��rable?; de plus, on allait atteindre les mois n��buleux, qui sont, comme on le sait, aux malheureux attaqu��s du spleen, ce que la chute des feuilles est aux phthisiques, et tout faisait pr��sager qu���� moins d��un miracle, sir ��douard ne supporterait pas cette ��poque fatale?: ce miracle, Dieu le fit par l��interm��diaire d��un de ses anges.
Un jour que sir ��douard, dans sa retraite accoutum��e, ��tait en proie �� une de ses r��veries mortelles, il entendit, sur le chemin qui conduisait �� la grotte, le froissement des feuilles s��ches sous un pas inconnu. Il leva la t��te, et vit venir �� lui une femme qu���� la blancheur de ses v��tements et �� la l��g��ret�� de sa d��marche, il pouvait, dans cette all��e sombre, prendre pour une apparition?; ses yeux se fix��rent avec ��tonnement sur la personne qui ne craignait pas de venir ainsi le troubler, et il attendit en silence.
C����tait une femme qui paraissait ag��e de vingt cinq ans, mais qui devait avoir un peu plus que cela, belle encore, non de cette premi��re et ��clatante jeunesse, si vive mais si passag��re, en Angleterre surtout, mais de cette seconde beaut��, si l��on peut s��exprimer ainsi, qui se compose d��une fra?cheur mourante et d��un embonpoint naissant. Ses yeux bleus ��taient ceux qu��un peintre e?t donn��s �� la Charit��?; de longs cheveux noirs qui ondulaient naturellement s����chappaient d��un petit chapeau qui semblait trop ��troit pour les contenir?; son visage offrait les lignes calmes et pures particuli��res aux femmes qui habitent la partie septentrionale de la Grande-Bretagne?; enfin son costume simple et s��v��re, mais plein de go?t, tenait le milieu entre la mode du jour et le puritanisme du XVII��me si��cle.
Elle venait solliciter la bont�� bien connue de sir ��douard en faveur d��une pauvre famille, dont le p��re ��tait mort la veille, apr��s une longue et douloureuse maladie, laissant une femme et quatre enfants dans la mis��re. Le propri��taire de la maison qu��habitaient cette malheureuse veuve et ces pauvres orphelins voyageait en Italie, de sorte que, pendant son absence, l��intendant, strict observateur des int��r��ts de son ma?tre, exigeait le payement de deux termes arri��r��s?; on mena?ait m��re et enfants de les mettre �� la porte. Cette menace ��tait d��autant plus terrible que la mauvaise saison s��avan?ait?: toute cette famille avait donc tourn�� ses regards vers le g��n��reux capitaine, et avait choisi pour interm��diaire celle qui venait solliciter le bienfait.
Ce r��cit fut fait avec une telle simplicit�� de gestes et d��une voix si douce, que sir ��douard sentit ses yeux se mouiller de larmes?; il porta la main �� sa poche, en tira une bourse pleine d��or qu��il donna �� la jolie ambassadrice sans dire un mot?; car, ainsi que le Virgile de Dante, il avait d��sappris de parler �� force de silence. De son cot��, la jeune femme, dans un premier moment d����motion dont elle ne fut pas ma?tresse, en voyant sa mission si promptement et si dignement remplie, saisit la main de sir ��douard, la baisa, et disparut sans lui adresser d��autres remerciements, press��e qu��elle ��tait d��aller rendre la s��curit��
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