Le vicomte de Bragelonne, Tome IV. | Page 9

Alexandre Dumas
d��daigneux retroussa ses l��vres.
-- Oh! continua-t-elle, je vous en supplie, ne dites pas que vous avez ressenti contre moi autre chose que de la col��re. Raoul, attendez que je vous aie tout dit, attendez que je vous aie parl�� jusqu���� la fin.
Le front de Raoul se rass��r��na par la force de sa volont��; le pli de sa bouche s��effa?a.
-- Et d��abord, dit La Valli��re, d��abord, les mains jointes, le front courb��, je vous demande pardon comme au plus g��n��reux, comme au plus noble des hommes. Si je vous ai laiss�� ignorer ce qui se passait en moi, jamais du moins je n��eusse consenti �� vous tromper. Oh! je vous en supplie, Raoul, je vous le demande �� genoux, r��pondez-moi, f?t-ce une injure. J��aime mieux une injure de vos l��vres qu��un soup?on de votre coeur.
-- J��admire votre sublimit��, mademoiselle, dit Raoul en faisant un effort sur lui-m��me pour rester calme. Laisser ignorer que l��on trompe, c��est loyal; mais tromper, il para?t que ce serait mal, et vous ne le feriez point.
-- Monsieur, longtemps, j��ai cru que je vous aimais avant toute chose, et, tant que j��ai cru �� mon amour pour vous, je vous ai dit que je vous aimais. �� Blois, je vous aimais. Le roi passa �� Blois; je crus que je vous aimais encore. Je l��eusse jur�� sur un autel; mais un jour est venu qui m��a d��tromp��e.
-- Eh bien! ce jour-l��, mademoiselle, voyant que je vous aimais toujours, moi, la loyaut�� devait vous ordonner de me dire que vous ne m��aimiez plus.
-- Ce jour-l��, Raoul, le jour o�� j��ai lu jusqu��au fond de mon coeur le jour o�� je me suis avou�� �� moi-m��me que vous ne remplissiez pas toute ma pens��e, le jour o�� j��ai vu un autre avenir que celui d����tre votre amie, votre amante, votre ��pouse, ce jour-l��, Raoul, h��las! vous n����tiez plus pr��s de moi.
-- Vous saviez o�� j����tais, mademoiselle; il fallait ��crire.
-- Raoul, je n��ai point os��. Raoul, j��ai ��t�� lache. Que voulez- vous, Raoul! je vous connaissais si bien, je savais si bien que vous m��aimiez, que j��ai trembl�� �� la seule id��e de la douleur que j��allais vous faire; et cela est si vrai, Raoul, qu��en ce moment o�� je vous parle, courb��e devant vous, le coeur serr��, des soupirs plein la voix, des larmes plein les yeux, aussi vrai que je n��ai d��autre d��fense que ma franchise, je n��ai pas non plus d��autre douleur que celle que je lis dans vos yeux.
Raoul essaya de sourire.
-- Non, dit la jeune fille avec une conviction profonde, non, vous ne me ferez pas cette injure de vous dissimuler devant moi. Vous m��aimiez, vous; vous ��tiez s?r de m��aimer; vous ne vous trompiez pas vous-m��me, vous ne mentiez pas �� votre propre coeur, tandis que moi, moi!...
Et toute pale, les bras tendus au-dessus de sa t��te, elle se laissa tomber sur les genoux.
-- Tandis que vous, dit Raoul, vous me disiez que vous m��aimiez, et vous en aimiez un autre!
-- H��las! oui, s����cria la pauvre enfant; h��las! oui, j��en aime un autre; et cet autre... mon Dieu! laissez-moi dire, car c��est ma seule excuse, Raoul; cet autre, je l��aime plus que je n��aime ma vie, plus que je n��aime Dieu. Pardonnez-moi ma faute ou punissez ma trahison, Raoul. Je suis venue ici, non pour me d��fendre, mais pour vous dire: Vous savez ce que c��est qu��aimer? Eh bien, j��aime! J��aime �� donner ma vie, �� donner mon ame �� celui que j��aime! S��il cesse de m��aimer jamais, je mourrai de douleur, �� moins que Dieu ne me secoure, �� moins que le Seigneur ne me prenne en mis��ricorde. Raoul, je suis ici pour subir votre volont��, quelle qu��elle soit; pour mourir si vous voulez que je meure. Tuez-moi donc, Raoul, si, dans votre coeur, vous croyez que je m��rite la mort.
-- Prenez-y garde, mademoiselle, dit Raoul, la femme qui demande la mort est celle qui ne peut plus donner que son sang �� l��amant trahi.
-- Vous avez raison dit-elle.
Raoul poussa un profond soupir.
-- Et vous aimez sans pouvoir oublier? s����cria Raoul.
-- J��aime sans vouloir oublier, sans d��sir d��aimer jamais ailleurs, r��pondit La Valli��re.
-- Bien! fit Raoul. Vous m��avez dit, en effet, tout ce que vous aviez �� me dire, tout ce que je pouvais d��sirer savoir. Et maintenant, mademoiselle, c��est moi qui vous demande pardon, c��est moi qui ai failli ��tre un obstacle dans votre vie, c��est moi qui ai eu tort, c��est moi qui, en me trompant, vous aidais �� vous tromper.
-- Oh! fit La Valli��re, je ne vous demande pas tant, Raoul.
-- Tout cela est ma faute, mademoiselle, continua Raoul; plus instruit que vous dans les difficult��s de la vie, c����tait �� moi de vous ��clairer; je devais ne pas me reposer sur l��incertain, je devais faire parler votre coeur, tandis
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