Le dernier des mohicans | Page 6

James Fenimore Cooper
que ses rares talents militaires avaient fait choisir parmi une foule de guerriers exp��riment��s, honteusement mise en d��route par une poign��e de Fran?ais et d'Indiens, et n'ayant ��vit�� une destruction totale que par le sang-froid et le courage d'un jeune Virginien[7] dont la renomm��e, grandissant avec les ann��es, s'est r��pandue depuis jusqu'aux pays les plus lointains de la chr��tient�� avec l'heureuse influence qu'exerce la vertu[8].
Ce d��sastre inattendu avait laiss�� �� d��couvert une vaste ��tendue de fronti��res, et des maux plus r��els ��taient pr��c��d��s par l'attente de mille dangers imaginaires. Les colons alarm��s croyaient entendre les hurlements des sauvages se m��ler �� chaque bouff��e de vent qui sortait en sifflant des immenses for��ts de l'ouest. Le caract��re effrayant de ces ennemis sans piti�� augmentait au del�� de tout ce qu'on pourrait dire les horreurs naturelles de la guerre. Des exemples sans nombre de massacres r��cents ��taient encore vivement grav��s dans leur souvenir; et dans toutes les provinces il n'��tait personne qui n'e?t ��cout�� avec avidit�� la relation ��pouvantable de quelque meurtre commis pendant les t��n��bres, et dont les habitants des for��ts ��taient les principaux et les barbares acteurs. Tandis que le voyageur cr��dule et exalt�� racontait les chances hasardeuses qu'offraient les d��serts, le sang des hommes timides se gla?ait de terreur, et les m��res jetaient un regard d'inqui��tude sur les enfants qui sommeillaient en s?ret��, m��me dans les plus grandes villes. En un mot, la crainte, qui grossit tous les objets, commen?a �� l'emporter sur les calculs de la raison et sur le courage. Les coeurs les plus hardis commenc��rent �� croire que l'��v��nement de la lutte ��tait incertain, et l'on voyait s'augmenter tous les jours le nombre de cette classe abjecte qui croyait d��j�� voir toutes les possessions de la couronne d'Angleterre en Am��rique au pouvoir de ses ennemis chr��tiens, ou d��vast��es par les incursions de leurs sauvages alli��s.
Quand donc on apprit au fort qui couvrait la fin du portage situ�� entre l'Hudson et les lacs, qu'on avait vu Montcalm remonter le Champlain avec une arm��e aussi nombreuse que les feuilles des arbres des for��ts, on ne douta nullement que ce rapport ne f?t vrai, et on l'��couta plut?t avec cette lache consternation de gens cultivant les arts de la paix, qu'avec la joie tranquille qu'��prouve un guerrier en apprenant que l'ennemi se trouve �� port��e de ses coups.
Cette nouvelle avait ��t�� apport��e vers la fin d'un jour d'��t�� par un courrier indien charg�� aussi d'un message de Munro, commandant le fort situ�� sur les bords du Saint-Lac, qui demandait qu'on lui envoyat un renfort consid��rable, sans perdre un instant. On a d��j�� dit que l'intervalle qui s��parait les deux postes n'��tait pas tout �� fait de cinq lieues. Le chemin, ou plut?t le sentier qui communiquait de l'un �� l'autre, avait ��t�� ��largi pour que les chariots pussent y passer, de sorte que la distance que l'enfant de la for��t venait de parcourir en deux heures de temps, pouvait ais��ment ��tre franchie par un d��tachement de troupes avec munitions et bagages, entre le lever et le coucher du soleil d'��t��.
Les fid��les serviteurs de la couronne d'Angleterre avaient nomm�� l'une de ces citadelles des for��ts William-Henry, et l'autre ��douard, noms des deux princes de la famille r��gnante. Le v��t��ran ��cossais que nous venons de nommer avait la garde du premier avec un r��giment de troupes provinciales, r��ellement beaucoup trop faibles pour faire face �� l'arm��e formidable que Montcalm conduisait vers ses fortifications de terre; mais le second fort ��tait command�� par le g��n��ral Webb, qui avait sous ses ordres les arm��es du roi dans les provinces du nord, et sa garnison ��tait de cinq mille hommes. En r��unissant les divers d��tachements qui ��taient �� sa disposition, cet officier pouvait ranger en bataille une force d'environ le double de ce nombre contre l'entreprenant Fran?ais, qui s'��tait hasard�� si imprudemment loin de ses renforts.
Mais, domin��s par le sentiment de leur d��gradation, les officiers et les soldats parurent plus dispos��s �� attendre dans leurs murailles l'arriv��e de leur ennemi qu'�� s'opposer �� ses progr��s en imitant l'exemple que les Fran?ais leur avaient donn��, au fort Duquesne, en attaquant l'avant-garde anglaise, audace que la fortune avait couronn��e.
Lorsqu'on fut un peu revenu de la premi��re surprise occasionn��e par cette nouvelle, le bruit se r��pandit dans toute la ligne du camp retranch�� qui s'��tendait le long des rives de l'Hudson, et qui formait une cha?ne de d��fense ext��rieure pour le fort, qu'un d��tachement de quinze cents hommes de troupes d'��lite devait se mettre en marche au point du jour pour William-Henry, fort situ�� �� l'extr��mit�� septentrionale du portage. Ce qui d'abord n'��tait qu'un bruit devint bient?t une certitude, car des ordres arriv��rent du quartier g��n��ral du commandant en chef, pour enjoindre aux corps qu'il avait choisis pour ce service, de se pr��parer promptement �� partir.
Il ne
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