Le Râmâyana | Page 3

Not Available
créatures dit au
fils d'Ikshwâkou avec une voix de la plus haute perfection: «Grand roi,
j'ai du plaisir à te donner cette liqueur toute composée avec des sucs
immortels: reçois donc ce vase, ô toi qui es la joie de la maison
d'Ikshwâkou!» Alors, inclinant sa tête, le monarque reçut la précieuse
amphore, et dit: «Seigneur, que dois-je en faire?»--«Roi, je te donne en
ce vase, répondit au monarque l'être émané du créateur même, je te
donne en lui ce bonheur qui est le cher objet de ton pieux sacrifice.

Prends donc, ô le plus éminent des hommes, et donne à tes chastes
épouses ce breuvage, que les Dieux eux-mêmes ont composé. Qu'elles
savourent ce nectar, auguste monarque: il fait naître de la santé, des
richesses, des enfants aux femmes qui boivent sa liqueur efficace.»
Ensuite, quand elle eût donné au monarque le breuvage incomparable,
cette apparition merveilleuse de s'évanouir aussitôt dans les airs; et
Daçaratha, se voyant maître enfin du nectar saint distillé par les Dieux,
fut ravi d'une joie suprême, comme un pauvre aux mains de qui
tomberait soudain la richesse. Il entra dans son gynoecée, et dit à
Kâauçalyâ: «Reine, savoure cette boisson génératrice, dont l'efficacité
doit opérer son bien en toi-même.»
Ayant ainsi parlé, son époux, qui avait partagé lui-même cette
ambroisie en quatre portions égales, en servit deux parts à Kâauçalyâ,
et donna à Kêkéyî une moitié de la moitié restante. Puis, ayant coupé
en deux sa quatrième portion, le monarque en fit boire une moitié à
Soumitrâ: ensuite il réfléchit, et donna encore à Soumitrâ ce qui restait
du nectar composé par les Dieux.
Suivant l'ordre où ces femmes avaient bu la nonpareille ambroisie,
donnée par le roi même au comble de la joie, les princesses conçurent
des fruits beaux et resplendissants à l'égal du soleil ou du feu sacré.
De ces femmes naquirent quatre fils, d'une beauté céleste et d'une
splendeur infinie: Râma, Lakshmana, Çalroughna et Bharata.
Kâauçalyâ mit au monde Râma, l'aîné par sa naissance, le premier par
ses vertus, sa beauté, sa force nonpareille et même l'égal de Vishnou
par son courage.
De même, Soumitrâ donna le jour à deux fils, Laksmana et Çatroughna:
inébranlables pour le dévouement et grands par la force, ils cédaient
néanmoins à Râma pour les qualités.
Vishnou avait formé ces jumeaux avec une quatrième portion de
lui-même: celui-ci était né d'une moitié, et celui-là d'une autre moitié
du quart.

Le fils de Kêkéyî se nommait Bharata: homme juste, magnanime, vanté
pour sa vigueur et sa force, il avait l'énergie de la vérité.
Ces princes, doués tous d'une âme ardente, habiles à manier de grands
arcs, dévoués à l'exercice des vertus, comblaient ainsi les voeux du roi
leur père; et Daçaratha, entouré de ces quatre fils éminents, goûtait au
milieu d'eux une joie suprême, comme Brahma, environné par les
Dieux.
Depuis l'enfance, Lakshmana s'était voué d'une ardente amitié à Râma,
l'amour des créatures: en retour, ce jeune frère, de qui l'aide servit
puissamment à la prospérité de son frère aîné, ce juste, ce fortuné, ce
victorieux Lakshmana était plus cher que la vie même à Râma, le
destructeur invincible de ses ennemis.
Celui-ci ne mangeait pas sans lui son repas ordinaire, il ne touchait pas
sans lui à quelque mets plus délicat; sans lui, il ne se livrait pas au
plaisir un seul instant même. Râma s'en allait-il, soit à la chasse, soit
ailleurs; aussitôt, prenant son arc, le dévoué Lakshmana y marchait
avec lui et suivait ses pas.
Autant Lakshmana était dévoué à Râma, autant Çatroughna l'était à
Bharata; celui-ci était plus cher à celui-ci et celui-ci à celui-là que le
souffle même de la vie.
Joie de son père, attirant les regards au milieu de ses frères comme un
drapeau, Râma était immensément aimé de tous les sujets pour ses
qualités naturelles: aussi, comme il savait se concilier par ses vertus
l'affection des mortels, lui avait-on donné ce nom de RÂMA,
c'est-à-dire, l'homme qui plaît, ou qui se fait aimer.
* * * * *
Un grand saint, nommé Viçvâmitra, vint dans la ville d'Ayodhyâ,
conduit par le besoin d'y voir le souverain.
Des rakshasas, enivrés de leur force, de leur courage, de leur science
dans la magie, interrompaient sans cesse le sacrifice de cet homme sage

et dévoué à l'amour de ses devoirs: aussi l'anachorète, qui ne pouvait
sans obstacle mener à fin la cérémonie, désirait-il voir le monarque,
afin de lui demander protection contre les perturbateurs de son pieux
sacrifice.
«Prince, lui dit-il, si tu veux obtenir de la gloire et soutenir la justice,
ou si tu as foi en mes paroles, prouve-le en m'accordant un seul homme,
ton Râma. La dixième nuit me verra célébrer ce grand sacrifice, où les
rakshasas tomberont, immolés par un exploit merveilleux de ton fils.»
Alors, ayant baisé avec amour
Continue reading on your phone by scaning this QR Code

 / 138
Tip: The current page has been bookmarked automatically. If you wish to continue reading later, just open the Dertz Homepage, and click on the 'continue reading' link at the bottom of the page.