Le Pays de l'or
The Project Gutenberg EBook of Le Pays de l'or, by Henri Conscience
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Title: Le Pays de l'or
Author: Henri Conscience
Release Date: December 4, 2003 [EBook #10384]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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DE L'OR ***
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LE PAYS DE L'OR
Par Henri Conscience
I
LE BUREAU
Un matin du mois de mai de l'année 1849, un jeune commis, assis
devant un pupitre, était seul dans le bureau d'une maison de commerce
peu importante, à Anvers.
Il était haut de taille et blond de cheveux; sa figure fraîche et fine, avec
quelque chose de rêveur dans l'expression, paraissait indiquer un
caractère très-doux, quoique l'éclat de ses yeux bleus accusât une
certaine force d'âme ou du moins une nature enthousiaste.
Il était occupé à écrire; cependant il interrompait souvent son travail
pour jeter les yeux sur un journal ouvert à sa droite sur le pupitre. Le
contenu de cette feuille semblait l'attirer chaque fois avec une nouvelle
force, car c'était évidemment contre sa volonté qu'il détournait si
souvent son attention de son ouvrage. Il fixa une dernière fois le regard
sur ce journal et lut d'une voix sourde et émue:
«On y rencontre l'or presque à la surface de la terre, et en si grande
abondance, qu'on n'a qu'à se baisser pour ramasser des trésors. Un
matelot a trouvé dernièrement une pépite ou morceau d'or pesant plus
de vingt livres et d'une valeur d'au moins vingt-cinq mille francs.»
Un soupir s'échappa de la poitrine du commis, et il leva vers le ciel un
regard chagrin.
Quelqu'un ouvrit la porte du bureau. C'était un jeune homme assez
solidement bâti, aux joues rouges, aux yeux noirs et étincelants; sur son
visage ouvert brillaient la santé et la bonne humeur.
--Jean, mon ami, tu seras grondé, dit l'autre. Monsieur est déjà venu au
bureau, et il a manifesté son mécontentement de ton absence.
--Bah! cela m'importe peu, mon bon Victor, répondit Jean d'un ton
triomphant. C'est décidé: je dis adieu au métier de gratte-papier et à
cette obscure prison où j'ai si sottement usé les plus belles années de
ma vie. Hourra! Je vais courir le monde, libre comme un oiseau, et ne
reconnaissant plus d'autre maître que Dieu et le sort!
--Que veux tu dire? demanda son camarade stupéfait.
--Ce que je veux dire? reprit Jean en tirant un papier plié de sa poche.
Voici le prospectus d'une société française, la Californienne; elle a fait
faire toutes sortes d'instruments pour exploiter les meilleures mines d'or
en Californie. Là où l'on peut ramasser avec les mains le métal le plus
précieux, elle recueillera l'or par monceaux avec des outils excellents et
des procédés perfectionnés. Peut devenir actionnaire qui veut.
Moyennant deux mille francs, on obtient une traversée libre sur un
vaisseau de la société, comme passager de seconde classe, et on reçoit
deux actions qui donnent droit à une double part de l'or recueilli.
Là-bas, en Californie, on n'a à s'inquiéter de rien, la société procure à
ses membres une bonne nourriture et des maisons de bois confortables.
Comme passager de troisième classe, on ne verse que douze cents
francs; mais on ne reçoit alors qu'une seule action. Mon père a consenti
à sacrifier deux mille francs. Je deviendrai actionnaire de la
Californienne! Le navire le Jonas est équipé par _la Californienne_;
dans quinze jours, il partira d'Anvers pour le pays de l'or. La société
envoie encore quatre vaisseaux en Californie, entre autres un du Havre
de Grâce, avec les outils et les directeurs, qui doivent déjà être en mer
pour recevoir là-bas les actionnaires.
Victor regarda son camarade avec des yeux étincelants. Ce qu'il
entendait le frappait de stupeur; car un sourire d'admiration illuminait
son visage rayonnant.
--Tu pars pour le pays de l'or! tu vas en Californie! murmura-t-il.
--Dans deux semaines.
--Toi, toi, Jean! La soif de l'or t'a-t-elle pris ainsi tout à coup?
--Oh! non; toi-même, Victor, tu m'as mis la tête à l'envers en me parlant
sans cesse du pays extraordinaire qu'on vient de découvrir. Je vois dans
ce voyage un bon moyen d'échapper à l'étouffante vie de bureau; l'or
n'est qu'un prétexte pour obtenir le consentement de mon père... Ah! ah!
demain, je suis libre: demain, je deviens actionnaire de la Californienne;
demain, je retiens ma place sur le navire _le Jonas!_
--Que tu es heureux! dit Victor en soupirant. Mon Dieu, que ne
donnerais-je pas pour pouvoir être ton compagnon de voyage!
--Tu
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