tous les matins une Sibylle ��tique :?On l'appelle Chicane ; et ce monstre odieux?Jamais pour l'��quit�� n'eut d'oreilles ni d'yeux.?La Disette au teint bl��me, et la triste Famine,?Les Chagrins d��vorants, et l'infame Ruine,?Enfants infortun��s de ses raffinements,?Troublent l'air d'alentour de longs g��missements.?Sans cesse feuilletant les lois et la coutume,?Pour consumer autrui, le monstre se consume ;?Et, d��vorant maison, palais, chateaux entiers,?Rend pour des monceaux d'or de vains tas de papiers.?Sous le coupable effort de ta noire insolence,?Th��mis a vu cent fois chanceler sa balance.?Incessamment il va de d��tour en d��tour.?Comme un hibou, souvent il se d��robe au jour :?Tant?t, les yeux en feu, c'est un lion superbe ;?Tant?t, humble serpent, il se glisse sous l'herbe.?En vain, pour le dompter, le plus juste des rois?Fit r��gler le chaos des t��n��breuses lois ;?Ses griffes vainement par Pussort accourcies,?Se rallongent d��j��, toujours d'encre noircies ;?Et ses ruses, per?ant et digues et remparts,?Par cent br��ches d��j�� rentrent de toutes parts.
Le vieillard humblement l'aborde et le salue,?Et faisant, avant tout, briller l'or �� sa vue :?Reine des longs proc��s, dit-il, dont le savoir?Rend la force inutile, et les lois sans pouvoir,?Toi, pour qui dans le Mans le laboureur moissonne,?Pour qui naissent �� Caen tous les fruits de l'automne :?Si, d��s mes premiers ans, heurtant tous les mortels,?L'encre a toujours pour loi coul�� sur tes autels,?Daigne encor me conna?tre en ma saison derni��re ;?D'un pr��lat qui t'implore exauce la pri��re.?Un rival orgueilleux, de sa gloire offens��,?A d��truit le lutrin par nos mains redress��.?Epuise en sa faveur ta science fatale :?Du digeste et du code ouvre-nous le d��dale;?Et montre-nous cet art, connu de tes amis,?Qui, dans ses propres lois, embarrasse Th��mis.
La Sibylle, �� ces mots, d��j�� hors d'elle-m��me,?Fait lire sa fureur sur son visage bl��me,?Et, pleine du d��mon qui la vient oppresser,?Par ces mots ��tonnants tache �� le repousser.
Chantres, ne craignez plus une audace insens��e.?Je vois, je vois au choeur la masse replac��e :?Mais il faut des combats. Tel est l'arr��t du sort,?Et surtout ��vitez un dangereux accord.
L�� bornant son discours, encor tout ��cumante,?Elle souffle aux guerriers l'esprit qui la tourmente ;?Et dans leurs coeurs br?lants de la soif de plaider?Verse l'amour de nuire, et la peur de c��der.
Pour tracer �� loisir une longue requ��te,?A retourner chez soi leur brigade s'appr��te.?Sous leurs pas diligents le chemin dispara?t,?Et le pilier, loin d'eux, d��j�� baisse et d��cro?t.
Loin du bruit cependant les chanoines �� table?Immolent trente mets �� leur faim indomptable.?Leur app��tit fougueux, par l'objet excit��,?Parcourt tous les recoins d'un monstrueux pat�� ;?Par le sel irritant la soif est allum��e :?Lorsque d'un pied l��ger la prompte Renomm��e,?Semant partout l'effroi, vient au chantre ��perdu?Conter l'affreux d��tail de l'oracle rendu.?Il se l��ve, enflamm�� de muscat et de bile,?Et pr��tend �� son tour consulter la Sibylle.?Evrard a beau g��mir du repas d��sert��,?Lui-m��me est au barreau par le nombre emport��.?Par les d��tours ��troits d'une barri��re oblique,?Ils gagnent les degr��s, et le perron antique?O�� sans cesse, ��talant bons et m��chants ��crits,?Barbin vend aux passants les auteurs �� tout prix.
L�� le chantre �� grand bruit arrive et se fait place,?Dans le fatal instant que, d'un ��gale audace,?Le pr��lat et sa troupe , �� pas tumultueux,?Descendaient du palais l'escalier tortueux.?L'un et l'autre rival, s'arr��tant au passage,?Se mesure des yeux, s'observe, s'envisage ;?Une ��gale fureur anime les esprits :?Tels deux fougueux taureaux, de jalousie ��pris?Aupr��s d'une g��nisse au front large et superbe?Oubliant tous les jours le paturage et l'herbe,?A l'aspect l'un de l'autre, embras��s, furieux,?D��j�� le front baiss��, se menacent des yeux.?Mais Evrard, en passant coudoy�� par Boirude,?Ne sait point contenir son aigre inqui��tude ;?Il entre chez Barbin, et, d'un bras irrit��,?Saisissant du Cyrus un volume ��cart��,?Il lance au sacristain le tome ��pouvantable.?Boirude fuit le coup : le volume effroyable?Lui rase le visage, et, droit dans l'estomac,?Va frapper en sifflant l'infortun�� Sidrac.?Le vieillard, accabl�� de l'horrible Artam��ne,?Tombe aux pieds du pr��lat, sans pouls et sans haleine.?Sa troupe le croit mort, et chacun empress��?Se croit frapp�� du coup dont il le voit bless��.?Aussit?t contre Evrard vingt champions s'��lancent ;?Pour soutenir leur choc les chanoine s'avancent.?La Discorde triomphe, et du combat fatal?Par un cri donne en l'air l'effroyable signal.
Chez le libraire absent tout entre, tout se m��le :?Les livres sur Evrard fondent comme la gr��le?Qui, dans un grand jardin, �� coups imp��tueux,?Abat l'honneur naissant des rameaux fructueux.?Chacun s'arme au hasard du livre qu'il rencontre :?L'un tient l'Edit d'amour, l'autre en saisit la Montre ;?L'un prend le seul Jonas qu'on ait vu reli�� ;?L'autre un Tasse fran?ais, en naissant oubli��.?L'��l��ve de Barbin, commis �� la boutique,?veut en vain s'opposer �� leur fureur gothique :?Les volumes, sans choix �� la t��te jet��s,?Sur le perron poudreux volent de tous c?t��s :?L��, pr��s d'un Guarini, T��rence tombe �� terre ;?L��, X��nophon dans l'air heurte contre un la Serre,?Oh ! que d'��crits obscurs, de livres ignor��s,?Furent en ce grand jour de la poudre tir��s !?Vous
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