Lami Fritz

Erckmann-Chatrian
L'ami Fritz

The Project Gutenberg EBook of L'ami Fritz, by Erckmann-Chatrian
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Title: L'ami Fritz
Author: Erckmann-Chatrian
Release Date: May 7, 2006 [EBook #18340]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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FRITZ ***

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ERCKMANN-CHATRIAN
L'AMI FRITZ
(1864)
Table des matières

I. II. III. IV. V. VI. VII. VIII. IX. X. XI. XII. XIII. XIV. XV. XVI.
XVII. XVIII.

I
Lorsque Zacharias Kobus, juge de paix à Hunebourg, mourut en 1832,
son fils Fritz Kobus, se voyant à la tête d'une belle maison sur la place
des Acacias, d'une bonne ferme dans la vallée de Meisenthâl, et de pas
mal d'écus placés sur solides hypothèques, essuya ses larmes, et se dit
avec l'Ecclésiaste: «Vanité des vanités, tout est vanité! Quel avantage a
l'homme des travaux qu'il fait sur la terre? Une génération passe et
l'autre vient; le soleil se lève et se couche aujourd'hui comme hier; le
vent souffle au nord, puis il souffle au midi: les fleuves vont à la mer,
et la mer n'en est pas remplie; toutes choses travaillent plus que
l'homme ne saurait dire; l'oeil n'est jamais rassasié de voir, ni l'oreille
d'entendre: on oublie les choses passées, on oubliera celles qui
viennent:--le mieux est de ne rien faire... pour n'avoir rien à se
reprocher!»
C'est ainsi que raisonna Fritz Kobus en ce jour.
Et le lendemain, voyant qu'il avait bien raisonné la veille, il se dit
encore:
«Tu te lèveras le matin, entre sept et huit heures, et la vieille Katel
t'apportera ton déjeuner, que tu choisiras toi-même, selon ton goût.
Ensuite tu pourras aller, soit au Casino lire le journal, soit faire un tour
aux champs, pour te mettre en appétit. À midi, tu reviendras dîner;
après le dîner, tu vérifieras tes comptes, tu recevras tes rentes, tu feras
tes marchés. Le soir, après souper, tu iras à la brasserie du Grand-Cerf,
faire quelques parties de youker ou de rams avec les premiers venus. Tu
fumeras des pipes, tu videras des chopes, et tu seras l'homme le plus
heureux du monde. Tâche d'avoir toujours la tête froide, le ventre libre
et les pieds chauds: c'est le précepte de la sagesse. Et surtout, évite ces
trois choses: de devenir trop gras, de prendre des actions industrielles et
de te marier. Avec cela, Kobus, j'ose te prédire que tu deviendras vieux

comme Mathusalem; ceux qui te suivront diront: "C'était un homme
d'esprit, un homme de bon sens, un joyeux compère!" Que peux-tu
désirer de plus, quand le roi Salomon déclare lui-même que l'accident
qui frappe l'homme, et celui qui frappe la bête sont un seul et même
accident; que la mort de l'un est la même mort que celle de l'autre, et
qu'ils ont tous deux le même souffle!... Puisqu'il en est ainsi, pensa
Kobus, tâchons au moins de profiter de notre souffle, pendant qu'il
nous est permis de souffler.»
Or, durant quinze ans, Fritz Kobus suivit exactement la règle qu'il
s'était tracée d'avance; sa vieille servante Katel, la meilleure cuisinière
de Hunebourg, lui servit toujours les morceaux qu'il aimait le plus,
apprêtés de la façon qu'il voulait; il eut toujours la meilleure choucroute,
le meilleur jambon, les meilleures andouilles et le meilleur vin du pays;
il prit régulièrement ses cinq chopes de bockbier à la brasserie du
Grand-Cerf; il lut régulièrement le même journal à la même heure; il fit
régulièrement ses parties de youker et de rams, tantôt avec l'un, tantôt
avec l'autre.
Tout changeait autour de lui, Fritz Kobus seul ne changeait pas; tous
ses anciens camarades montaient en grade, et Kobus ne leur portait pas
envie; au contraire, lisait-il dans son journal que Yéri-Hans venait
d'être nommé capitaine de housards, à cause de son courage; que Frantz
Sépel venait d'inventer une machine pour filer le chanvre à moitié prix;
que Pétrus venait d'obtenir une chaire de métaphysique à Munich; que
Nickel Bischof venait d'être décoré de l'ordre du Mérite pour ses belles
poésies, aussitôt il se réjouissait et disait: «Voyez comme ces
gaillards-là se donnent de la peine: les uns se font casser bras et jambes
pour me garder mon bien; les autres font des inventions pour m'obtenir
les choses à bon marché; les autres suent sang et eau pour écrire des
poésies et me faire passer un bon quart d'heure quand je m'ennuie.... Ha!
ha! ha! les bons enfants!»
Et les grosses joues de Kobus se relevaient, sa grande bouche se fendait
jusqu'aux oreilles, son large nez s'épatait de satisfaction; il poussait un
éclat
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