mespris?Dont la feinte d'abord a troubl�� mes esprits?Mais apres cette peur maintenant je respire,?Puisque vous promettez d'alleger mon martyre.
LE CID.
Madame, ce desir excede mon pouvoir:?Mais attendez de moy tout ce que le devoir?Et que la courtoisie aux nobles naturelle?M'ordonneront pour vous.
CHERIFFE.
Quoy doncq Cid infidele?Tu retournes encor �� ton premier propos??O lettre, ? trahison fatale �� mon repos,?Descouvre tes secrets & montre �� c��t infame?Son infidelit��.
LE CID.
Je le veux bien, Madame.?Qu'on lise cet escrit, je ne m'en deffends point?Et je veux desormais l'observer de tout point.
LE ROY.
Cette condition me semble raisonnable,?Et Rodrigue en cela paroist tres-equitable,?Voyons en cet escrit quel est vostre interest.
LE CID.
Grand Prince je consens qu'il nous serve d'arrest.
CHERIFFE.
Je le veux bien aussi.
LE ROY.
Je vous rendray justice.
CHYMENE.
Dieux on va prononcer l'arrest de mon supplice,?Et je resiste encore �� ce cruel effort.
L'INFANTE.
J'attends de cette lettre ou ma vie ou ma mort.
LETTRE DE RODRIGUE A CHERIFFE.
Cheriffe si la tyrannie?D'un frere plein de cruaut��,?Au lieu de respecter son sang & ta beaut��?Se plaist �� te donner une peine infinie:
Porte tes genereux esprits?Aux sentimens que tu m'escris?Sors de ce rigoureux empire.?Mais avant ton depart qu'il sente ton courroux,
Et vien alleger ton martyre?Dans le camp d'un vainqueur qui te sera plus doux.
CHERIFFE continu?.
H��! bien traistre entends-tu le sens de ces paroles??Ces termes rendent-ils tes promesse frivolles??Ne suis-je pas Cheriffe? & n'es-tu pas vainqueur??Ne t'ay-je pas ouvert & Cordoue & mon coeur?Toutefois desloyal tu me veux mescognoistre?Et m'oster un espoir que ta main a faict naistre??Est-ce l�� ce destin si charmant & si doux?Que tu me preparois?
LE CID.
Dequoy vous plaignez-vous??Est-il quelque insolent qui vous ayt faict outrage,?N'estes vous pas, Madame, �� couvert de l'orage,?Que ce frere inhumain vous avoit prepar��:?Outre ce traitement qu'aviez-vous esper��,?Pensiez-vous que je deusse estre vostre conqueste??Cheriffe il n'est plus temps, un autre object m'arreste?Et mes fers sont si beaux que sans aveuglement?Je ne s?aurois changer un object si charmant.
CHERIFFE.
H��! bien ne changes point, mais finis ma misere,?Efface avec mon sang ce traistre caractere,?Et comme de ton crime il est desja noircy?Pour me punir du mien fay-le rougir aussi?Barbare qu'attens-tu? rends ta hayne assouvie,?Adjoute �� mes malheurs la perte de ma vie,?Et pour mieux contenter l'excez de ta rigueur?Arrache de mon sein, & ma flame & mon coeur.
CELIMANT.
Ah! que je suis content! & que cette vangeance?Faict gouster �� mes sens une douce allegeance,?Que mes yeux sont ravis de te voir en ce point,?O�� ton plus grand espoir est de n'en avoir point?Triomphe maintenant perfide, fay la brave?Pour n'avoir point de fers tu n'es pas moins esclave.
CHERIFFE.
Quoy! barbare.
LE ROY.
Tout beau moderez ce transport,?Je vous promets �� tous un favorable sort?Je suis Prince, & je veux vous obliger �� croire?Que je s?ay prudemment user d'une victoire,?Vous gardes ayez soin qu'en leurs appartemens?Ils ne re?oivent point de mauvais traitemens,?En quelque estat qu'ils soient je veux qu'on les revere,?[Parlant au Cid.]?Toy va-te delasser dans les bras de ton pere,?Qui brusle des long-temps du desir de te voir.
LE CID.
Je vay puis qu'il vous plaist luy rendre ce devoir.
[Tout rentre horsmis Chymene, l'Infante & le Cid.]
SCENE QUATRIESME.
LE CID, L'INFANTE, CHYMENE.
LE CID parlant �� l'Infante.
Mais, Madame, souffrez que je rende �� Chimene?L'honneur que je luy dois.
CHYMENE.
N'en prenez pas la peine.?Vous ne me devez rien, & Cheriffe en courroux?N'a que trop de sujet de se plaindre de vous?Sans que vous commettiez encore cette offence.
[Elle fait une humble reverence & sort.]
SCENE CINQUIESME.
LE CID, L'INFANTE.
LE CID.
Quelle raison bons Dieux me ravit sa presence!?Quel crime ay-je commis! quelle infidelit��?
L'INFANTE.
Je ne s?ay mais tu vois quelle est sa cruaut��;?Tu voy comme elle change �� son premier caprice,?Ne te lasse-tu point d'endurer ce supplice??Ah! Rodrigue tu dois tesmoigner plus de coeur,?Et montrer qu'on doit mieux recevoir un vainqueur:?Advou? avecque moy qu'elle est un peu trop vaine.
LE CID.
Je n'en murmure point, Madame, c'est Chimene?Toute ingrate qu'elle est je ne la puis ha?r.
L'INFANTE.
Cet excez de bont�� pourroit bien te trahir?Tu te rends malheureux pour estre trop fidele.
LE CID.
Madame, vous s?avez o�� mon devoir m'appelle?Souffrez que de ce pas j'aille m'en acquitter.
L'INFANTE.
Va. Tu prends ce pretexte, afin de me quitter?Mais je seray vangee, & pour croistre ta peine,?J'emploiray contre toy les rigueurs de Chimene.
ACTE III.
SCENE PREMIERE.
LE CID.
[Sortant de l'appartement de Chymene.]
Ouy, Chymene: vivez en repos desormais,?Rodrigue asseur��ment ne vous verra jamais,?Jamais doresnavant sa presence odieuse?N'aura plus le mal-heur de vous estre ennuyeuse,?Vous voulez qu'il endure, il est prest �� souffrir:?Et s'il ne s?ait vous plaire il s?aura bien mourir.?Quoy! Chymene bons Dieux! me traitter de la sorte??S'armer �� mon abord d'une rigueur si forte?Mespriser mes devoirs, tenir indifferens?Les soins & les honneurs qu'aujourd'huy je luy rens:?Ah! cette cruaut�� n'est pas imaginable!?Il est vray toutesfois que je suis miserable,?Et que par le malheur de mon triste retour?Je bannis de ces lieux la douceur & l'amour.?Ah! que ne suis-je mort au milieu des batailles?Toute une armee en deuil eust faict mes funerailles:?Je serois glorieux & j'aurois le bon-heur?D'avoir finy mes
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