trois ou quatre chapelets récités de la sorte, on se
délasse un peu en chantant quelque vieux Noël; puis on reprend la
prière, jusqu'à ce que soient achevés les vingt chapelets nécessaires
pour faire le total des mille Ave.
Voilà ce que devrait être, avec des variantes, selon les régions, la
veillée de Noël dans toute famille vraiment chrétienne: Ne prendre de
nourriture que ce qui est nécessaire pour soutenir le corps; puis, le repas
achevé, prier en union avec l'Ange, en saluant mille fois la Vierge qui,
dans quelques instants, sera la Mère de Dieu, mais qui, pour le moment,
erre encore dans les rues de Bethléem à la recherche d'un gîte qui lui
sera refusé. Tout à l'heure, au retour de la Messe de minuit, la nature
reprendra ses droits et on réveillonnera copieusement, pour se réjouir
de la naissance de Jésus et aussi pour réparer les fatigues de la marche
et de la veillée; mais alors la Sainte Famille aura reçu la visite des
bergers et ne sera plus dans le dénûment.»
Nous sommes bien de l'avis de notre aimable correspondant. Le
véritable esprit chrétien de la nuit de Noël doit consister dans la
mortification du repas maigre de la vigile et, après la Messe de minuit,
dans la joie exubérante du réconfortant réveillon auquel prend part la
famille tout entière.
II.--LES DIVERTISSEMENTS.
Nous allons citer quelques divertissements auxquels donne lieu la fête
de Noël.
Nous avons trouvé dans une notice sur Beaufort, commune de l'Anjou,
une très ancienne coutume dont il ne reste pas trace dans les traditions
du pays.
C'était, à Beaufort, un usage que tous les jeunes gens mariés dans
l'année se réunissent la veille de Noël, pour offrir au public un grand
divertissement.
A l'heure indiquée, ils se rendaient, escortés de toute la foule, sur un
pont situé sur une petite rivière, à l'extrémité de la ville. Là, au signal
donné par les premiers magistrats de la cité, et en présence du seigneur
du lieu qui présidait la cérémonie, ils se précipitaient dans l'eau pour y
saisir, en nageant, une pelote que l'on avait jetée dans le courant. Les
nageurs avaient la liberté d'arracher la pelote des mains de ceux qui
l'avaient saisie les premiers; c'était, on peut le penser, une lutte fort
longue et fort distrayante. Celui qui, le plus fort ou le plus adroit,
parvenait à se rendre maître de la pelote était proclamé le vainqueur. Il
recevait cinquante livres pour «monter son ménage» et était reconduit
chez lui au son de la trompe, au bruit des tambours, des fifres et des
hautbois.
Ceux des jeunes gens qui, n'étant pas malades, «ne voulaient pas
grelotter en nageant après la pelote», payaient une amende au profit du
vainqueur.
Une coutume à peu près semblable avait lieu en Normandie, au
Mesnil-sous-Jumièges et à Yville.
La dernière mariée de l'année--et c'était à qui se marierait la dernière
pour avoir cet honneur,--en présence de toute la paroisse assemblée,
jetait par-dessus l'église une boule ou une pelote où était enfermée une
somme d'argent. Chacun faisait ses efforts pour s'en emparer. Or, pour
en demeurer maître, il fallait rentrer chez soi et faire baiser la pelote à
la bûche de Noël, dans la cheminée. Quiconque touchait le porteur, lui
criait: «Lâche la pelote», et de nouveau la pelote était lancée.
Souvent cette partie de balle lancée durait fort longtemps, et parfois
l'heureux possesseur de la balle demeurait éloigné du village deux eu
trois jours avant de rentrer chez lui, attendant que ses adversaires,
lassés, aient abandonné la partie. Une sorte de superstition s'en mêlait,
la pelote portant bonheur au hameau qui la possédait. C'était un
talisman qui assurait de belles récoltes à celui qui pouvait la garder.
Tout cela était très inoffensif, mais les bousculades, les batteries qui
s'ensuivaient, l'étaient moins, et, en 1866, on a supprimé définitivement
cette originale coutume normande[8].
[Note 8: Journal de Rouen, suppl. du 25 déc. 1898.]
Voici, d'après M. J. Carnandet[9], ce qui se passait, la veille de Noël,
dans les villages champenois.
[Note 9: Bibliothécaire de la ville de Chaumont.]
C'est à la nuit tombante que commencent les réjouissances de la fête de
Noël. Dès que la dernière lueur du jour s'est fondue dans l'ombre, tous
les habitants du pays ont grand soin d'éteindre leurs foyers, puis ils vont
en foule allumer des brandons à la lampe de l'église. Lorsque ces
brandons ont été bénits par le clergé, ils les promènent par les champs:
c'est ce qu'on appelle la _fête des flambarts_. Ces flambarts sont le seul
feu qui brûle dans le village: ce feu bénit et régénéré jettera de jeunes
étincelles sur l'âtre ranimé dans quelques instants, image symbolique de
la renaissance spirituelle apportée au monde par Jésus-Christ.
Puis on allume la bûche de Noël.
Pendant la veillée, les paysans, sur
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