La mer | Page 8

Jules Michelet
les r��gions, non par cha?nes de montagnes, mais par bassins maritimes.
L'Espagne du Sud ressemble au Maroc plus qu'�� la Navarre, la Provence �� l'Alg��rie plus qu'au Dauphin��; la S��n��gambie aux r��gions de l'Amazone plus qu'�� la mer Rouge, et l'Amazone a plus d'analogie avec les r��gions humides de l'Afrique qu'avec ses voisins qui lui sont adoss��s, le Chili et le P��rou, etc.
La sym��trie de l'Atlantique est encore bien plus, frappante dans les courants en dessous, dans les vents et brises en dessus. Leur action aide puissamment �� cr��er ces analogies et �� former ce qu'on peut dire: la fraternit�� des rivages.
Le principe d'unit�� g��ographique, l'��l��ment classificateur sera de plus en plus cherch�� dans le bassin maritime, o�� les eaux, les vents messagers fid��les cr��ent la relation, l'assimilation des bords oppos��s. On demandera moins cette id��e d'unit�� g��ographique aux montagnes, dont les deux versants, souvent en contradiction, vous offrent sous m��me latitude des flores et des populations absolument oppos��es, ici l'invariable ��t��, �� deux pas l'��ternel hiver selon les expositions. La montagne donne rarement l'unit�� de la contr��e, plus souvent sa dualit��, son divorce et ses discordances.
Cette vue de g��nie appartient �� Bory de Saint-Vincent. Les d��couvertes r��centes de Maury et les lois qu'il a pos��es la confirment de mille mani��res.
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Dans l'immense vall��e de la mer, sous la double montagne des deux continents, il n'y a, �� proprement parler, que deux bassins:
1o Le bassin de l'Atlantique;
2o Le grand bassin de la mer Indienne et Pacifique.
On ne peut appeler bassin la ceinture ind��termin��e de l'��norme oc��an Austral, qui n'a ni borne, ni rivage, qui vers le nord seulement vient envelopper la mer de l'Inde, la Mer de Corail et le Pacifique.
L'oc��an Austral, �� lui seul, est plus grand que toutes les mers. Il couvre presque la moiti�� de la surface du globe. Selon toute apparence, �� l'��tendue r��pond la profondeur. Tandis que les sondages r��cents de l'Atlantique indiquent 10 ou 12,000 pieds, dans l'oc��an Austral, Ross et Denham ont trouv�� 14,000, 27,000, et jusqu'�� 46,000 pieds. Ajoutez-y la masse des glaces antarctiques, infiniment plus vastes que nos glaces bor��ales. On n'est pas loin du vrai, si l'on simplifie en disant: L'h��misph��re Austral est le monde des eaux, et le Bor��al celui de la terre.
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Celui qui part d'Europe et veut traverser l'Atlantique, ��tant sorti heureusement de nos ports, trop souvent ferm��s par le vent d'Ouest, apr��s avoir franchi la zone variable de nos changeantes mers, entre bient?t dans le beau temps, la s��r��nit�� ��ternelle que les vents de N.-E., les doux vents aliz��s mettent sur la mer et dans le ciel. Tout sourit; nulle inqui��tude. Mais en avan?ant vers la Ligne; la brise vivifiante cesse, l'air devient ��touffant. On entre dans la zone des calmes qui dominent sous l'��quateur, et s��parent immuablement les Aliz��s de notre h��misph��re bor��al et les Aliz��s de l'h��misph��re Sud. De lourds nuages p��sent; de grandes pluies fondent �� chaque instant. On s'attriste, on se plaint, mais sans ce rideau sombre, de quelles fl��ches de feu le soleil frapperait les t��tes ��branl��es sur le miroir de l'Atlantique! Sans les d��luges qui assaillent l'autre face du globe, la mer Indienne et la Mer de corail, quelle serait leur fermentation aux crat��res de leurs vieux volcans! Cette masse noire de nuages, jadis la terreur, la barri��re de la navigation, cette nuit subite ��tendue sur les eaux, c'est pr��cis��ment le salut, la facilit�� protectrice qui nous adoucit le passage, et nous fait bient?t retrouver au sud le beau soleil et le ciel pur, la douceur des vents r��guliers.
Tout naturellement la chaleur de la Ligne ��l��ve l'eau en vapeurs, et forme cette bande sombre.
L'observateur qui, d'une autre plan��te, regarderait la n?tre, verrait planer sur elle un anneau de nuages, �� peu pr��s comme on voit l'anneau de Saturne. S'il en cherchait l'usage, on pourrait lui r��pondre: C'est le r��gulateur qui, absorbant et rendant tour �� tour, ��quilibre l'��vaporation, la pr��cipitation des eaux, distribue les pluies, les ros��es, modifie la chaleur de chaque contr��e, ��change les vapeurs des deux mondes, emprunte au monde Austral de quoi faire les rivi��res, les fleuves de notre monde Bor��al. Solidarit�� merveilleuse. L'Am��rique du sud, dans ses grandes for��ts, de leur respiration, condens��e en nuages, abreuve fraternellement les fleurs et les fruits de l'Europe. L'air qui nous renouvelle, c'est le tribut que cent ?les d'Asie, que la puissante flore de Java ou de Ceylan exhala, confia au grand messager des nuages qui roule avec la terre et lui verse la vie.
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Posez-vous (j'entends en esprit) sur une des ?les volcaniques que la mer Pacifique offre en si grand nombre et regardez au sud. Derri��re la Nouvelle-Hollande, vous verrez l'oc��an Austral assi��ger d'un flot circulaire les deux pointes extr��mes de l'ancien et du nouveau continent. Point de terre au monde Antarctique, ou de petites ?les,
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