La mer, by Jules Michelet
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Title: La mer
Author: Jules Michelet
Release Date: November 1, 2007 [EBook #23279]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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J. MICHELET
LA MER
CINQUI��ME ��DITION
PARIS
MICHEL L��VY FR��RES
RUE AUBER, 3, PLACE DE L'OP��RA
LIBRAIRIE NOUVELLE
BOULEVARD DES ITALIENS, 15, AU COIN DE LA RUE DE GRAMMONT
1875
Droits de reproduction et de traduction r��serv��s
TABLE DES MATI��RES
LIVRE Ier.--UN REGARD SUR LES MERS.
I. La mer vue du rivage II. Plages, gr��ves et falaises III. Plages, gr��ves et falaises (suite) IV. Cercle des eaux, cercles de feux. Fleuves de la mer V. Le pouls de la mer VI. Les temp��tes VII. La temp��te d'octobre 1859 VIII. Les phares
LIVRE II.--LA GEN��SE DE LA MER.
I. F��condit�� II. La mer de lait III. L'atome IV. Fleur de sang V. Les faiseurs de mondes VI. Fille des mers VII. Le piqueur de pierres VIII. Coquilles, nacre, perles IX. L'��cumeur de mer (poulpe, etc.) X. Crustac��s. La guerre et l'intrigue XI. Le poisson XII. La baleine XIII. Les sir��nes
LIVRE III.--CONQU��TE DE LA MER.
I. Le harpon II. D��couverte des trois oc��ans III. La loi des temp��tes IV. Les mers des p?les V. La guerre aux races de la mer VI. Le droit de la mer
LIVRE IV.--LA RENAISSANCE PAR LA MER.
I. L'origine des bains de mer II. Choix du rivage III. L'habitation IV. Premi��re aspiration de la mer V. Bains.--Renaissance de la beaut�� VI. La renaissance du coeur et de la fraternit�� VII. Vita nuova des nations NOTES
FIN DE LA TABLE
LIVRE PREMIER
UN REGARD SUR LES MERS
I
LA MER VUE DU RIVAGE
Un brave marin hollandais, ferme et froid observateur, qui passe sa vie sur la mer, dit franchement que la premi��re impression qu'on en re?oit, c'est la crainte. L'eau, pour tout ��tre terrestre, est l'��l��ment non respirable, l'��l��ment de l'asphyxie. Barri��re fatale, ��ternelle, qui s��pare irr��m��diablement les deux mondes. Ne nous ��tonnons pas si l'��norme masse d'eau qu'on appelle la mer, inconnue et t��n��breuse dans sa profonde ��paisseur, apparut toujours redoutable �� l'imagination humaine.
Les Orientaux n'y voient que le gouffre amer, la nuit de l'ab?me. Dans toutes les anciennes langues, de l'Inde �� l'Irlande, le nom de la mer a pour synonyme ou analogue le d��sert et la nuit.
Grande tristesse de voir tous les soirs le soleil, cette joie du monde et ce p��re de toute vie, sombrer, s'ab?mer dans les flots. C'est le deuil quotidien du monde, et sp��cialement de l'Ouest. Nous avons beau voir chaque jour ce spectacle, il a sur nous m��me puissance, m��me effet de m��lancolie.
Si l'on plonge dans la mer �� une certaine profondeur, on perd bient?t la lumi��re; on entre dans un cr��puscule o�� persiste une seule couleur, un rouge sinistre; puis cela m��me dispara?t et la nuit compl��te se fait, c'est l'obscurit�� absolue, sauf peut-��tre des accidents de phosphorescence effrayante. La masse, immense d'��tendue, ��norme de profondeur, qui couvre la plus grande partie du globe, semble un monde de t��n��bres. Voil�� surtout ce qui saisit, intimida les premiers hommes. On supposait que la vie cesse partout o�� manque la lumi��re, et qu'except�� les premi��res couches, toute l'��paisseur insondable, le fond (si l'ab?me a un fond), ��tait une noire solitude, rien que sable aride et cailloux, sauf des ossements et des d��bris, tant de biens perdus que l'��l��ment avare prend toujours et ne rend jamais, les cachant jalousement au tr��sor profond des naufrages.
L'eau de mer ne nous rassure aucunement par la transparence. Ce n'est point l'engageante nymphe des sources, des limpides fontaines. Celle-ci est opaque et lourde; elle frappe fort. Qui s'y hasarde, se sent fortement soulev��. Elle aide, il est vrai, le nageur, mais elle le ma?trise; il se sent comme un faible enfant, berc�� d'une puissante main, qui peut aussi bien le briser.
La barque une fois d��li��e, qui sait o�� un vent subit, un courant irr��sistible, pourront la porter? Ainsi nos p��cheurs du Nord, malgr�� eux, trouv��rent l'Am��rique polaire et rapport��rent la terreur du fun��bre Gro?nland. Toute nation a ses r��cits, ses contes sur la mer. Hom��re, les Mille et une Nuits, nous ont gard�� un bon nombre de ces traditions effrayantes, les ��cueils et les temp��tes, les calmes non moins meurtriers o�� l'on meurt de soif au milieu des eaux, les mangeurs d'hommes, les monstres, le l��viathan, le kraken et le grand serpent de mer, etc. Le nom qu'on donne au d��sert, ?le pays de la peur,? on aurait pu le donner au grand d��sert maritime. Les plus hardis navigateurs, Ph��niciens et Carthaginois, les Arabes conqu��rants
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