La maison de la courtisane | Page 3

Oscar Wilde
cha?nes de la servitude. O Salamine, ? plaines solitaires de Plat��e, ? vagues furieuses de la mer Eub��enne pleine de temp��tes, ? cimes des Thermopyles d��sertes que balaient les vents, il vous aima bien, et non point en paroles seulement, celui qui te donna si lib��ralement sa lyre et son ��p��e, comme fit Eschyle dans la bataille acharn��e de Marathon.
Et l'Angleterre, elle aussi, se r��jouira de son fils, de son guerrier po��te, le premier �� chanter et �� combattre. La calomnie, �� la rage empoisonn��e, n'osera plus ramper comme un serpent sur son nom accompli et d��figurer l'��cusson seigneurial de sa renomm��e.
Car, ainsi que la couronne d'olivier, r��compense de la course, illumine de joie la figure anim��e de tous les coureurs, comme la croix rouge qui sauve les hommes pendant la guerre, comme le phare empanach�� de flamme qu'aper?oivent de loin les marins sur une mer que soul��ve l'orage, tel ��tait son amour pour la Gr��ce et la Libert��.
Byron, tes couronnes sont ��ternellement fra?ches et vertes. Les p��tales rouges des roses de la Sapphique Mityl��ne ceindront ton front. Pour toi fleurit le myrte, dans des clairi��res myst��rieuses, pr��s de la solitaire Castalie. Les lauriers attendent ta venue, et ils sont tous �� toi, et leur entrelacement formera autour de ta t��te une couronne parfaite.
V
Les cimes des pins se balan?aient �� la brise du soir, au murmure enrou�� des flots de l'hiver, et les troncs ��lanc��s ��taient ray��s d'ambre brillante. Je me promenais par les bois, plein d'une joie emport��e. Un oiseau effarouch��, de ses ailes battantes et de ses pattes, faisait voler en neige toutes les fleurs. �� mes pieds, pareils �� des couronnes d'argent, ��taient les pales narcisses, et des oisillons chantaient sur toutes les branches entrelac��es. O arbres, flexibles, ? libert�� de la for��t, dans vos asiles, du moins un homme est libre, et oublie en partie le monde las de querelles. Le sang coule plus chaud, et une sensation de vie s'��veille dans les veines acc��l��r��es, pendant qu'une fois de plus, les bois s'emplissent de divinit��s que nous avions cru mises �� mort. Pendant longtemps j'attendis, et certainement j'esp��rai voir quelque Pan aux pieds de ch��vre chanter de joyeuses chansons parmi les roseaux, quelque vierge dryade surprise, et s'enfuyant pudiquement, ou bien les contours harmonieux et les membres bruns, la figure effront��e et trompeuse de quelque dieu des bois embusqu�� dans la clairi��re, la reine Diane chasseresse, aux membres blancs, impitoyable, �� l'air fier, tenant en laisse les chiens de meute bondissant �� ses c?t��s, ou bien Hylas r��fl��chi par les eaux pures du ruisseau.
O coeur oisif! O r��ve ch��ri de l'Hellade! Avant qu'il f?t longtemps, les vibrations croissantes et d��croissantes, aux sons m��lancoliques des carillons du soir, la cloche qui sonnait les v��pres dans un couvent, vinrent frapper mon oreille parmi ces fleurs d'amour. H��las! h��las! ces heures douces comme le miel, avaient englouti mon coeur comme une mer envahissante et noy�� tout souvenir du noir Gethsemani.
VI
O solitaire Ravenne, on fait plus d'un r��cit sur les grandes gloires de tes jours d'autrefois. Deux mille ans se sont ��coul��s, depuis que tu vis C��sar monter �� cheval pour aller remporter d'imp��riales victoires. Ton nom ��tait puissant lorsque les maigres aigles de Rome volaient des Iles Britanniques aux lointains flots bleus de l'Euphrate, et tu r��gnais en noble reine sur les peuples, jusqu'au jour o�� l'on vit dans les rues le Goth et le Hun. D��couronn��e par l'homme, d��sert��e par la mer, tu dors berc��e dans une pauvret�� solitaire. D��sormais, sur ta rive o�� s'enflait la mar��e, les milliers de gal��res, comme une for��t de pin, ne vogueront plus, car l�� o�� flottaient constamment des vaisseaux �� l'��peron de bronze, le berger morose joue ses airs pleins de tristesse, et les blanches brebis errent �� leur gr�� dans les lieux o�� coulaient les eaux empourpr��es de l'Adria.
Quelle beaut��! Quelle tristesse! O reine inconsol��e, tu gis morte au milieu du charme des ruines, seule parmi toutes tes soeurs, car du moins le roi guerrier de l'Italie a franchi la plus fi��re des portes de Rome et a port�� la couronne dans les temples orgueilleux de la Ville Eternelle et fait retentir de son nom les sept montagnes.
Et Naples a surv��cu �� son r��ve de douleur, et elle raille ses tyrans. Venise ressuscite et repara?t du fond des eaux, et le cri de Lumi��re et V��rit��, d'Amour et Libert��, se fait entendre dans G��nes l'imp��rieuse, et l�� o�� les clochers de marbre de Milan trouent l'air. Il r��sonne depuis les Alpes jusqu'aux rives siciliennes, et le r��ve de Dante n'est plus un r��ve maintenant.
Mais toi, Ravenne, toi qui fus la plus aim��e, tes palais en ruines ne sont plus qu'un voile fun��bre jet�� sur ta grandeur tomb��e, et ton nom brille comme la flamme terne et frissonnante d'une bougie, sous
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