La main froide | Page 8

Fortuné Du Boisgobey
pourrons nous rencontrer.
Et vous ne croyez pas, je l'esp��re, que j'attends de vous d'autres services que ceux qu'un galant homme peut, sans d��choir, rendre �� une honn��te femme qui a recours �� son obligeance, sinon �� sa protection.
Ce langage ferme et net fit sur Paul une impression profonde.
Son consentement ne tenait plus qu'�� un fil et s'il h��sitait encore, c'est qu'un point �� ��claircir lui tenait au coeur.
--Eh! bien? demanda la dame; est-ce convenu?
--Oui... si...
--Quoi! il y a un: si!
--Ne vous fachez pas de ce que je vais vous dire...
--C'est donc bien terrible?
--Non... c'est enfantin... Donnez-moi votre parole d'honneur que vous n'aimez pas Jean de Mirande... que vous ne l'aimez pas... d'amour.
--Je vous la donne. Je n'ai pas d'amour pour lui et je n'en aurai jamais.
--Jamais, c'est beaucoup dire.
--Je ne puis pas l'aimer. Un jour je vous apprendrai pourquoi.
--C'est bien... je vous crois, dit gravement Paul Cormier. Je ferai tout ce que vous voudrez.
--Merci, Monsieur!... �� dater de cet instant vous pouvez compter sur moi comme je compte sur vous... et avant de nous s��parer...
--D��j��!...
--Il le faut. Nous approchons du rond-point et je vous prierai de descendre un peu avant d'y arriver.
--Vous craignez qu'on ne nous voie ensemble?
--Probablement.
--Votre mari, n'est-ce pas?
--Prenez garde!... voil�� que vous manquez �� nos conventions!
--C'est juste. Je retire ma question... et je ne recommencerai plus. Mais j'ai une grace �� vous demander... Je vais vous quitter et je ne sais quand je vous reverrai, mais vous ne me d��fendez pas de penser �� vous.
--Non certes.
--Eh! bien, quand j'y penserai, ne serez-vous jamais pour moi que Madame X...? ne pourrai-je jamais rattacher ma pens��e �� un petit nom... celui que vous choisirez, si vous tenez �� me cacher le v��ritable?
--C'est enfantin, comme vous disiez tout �� l'heure, r��pondit en riant la belle inconnue; mais je ne veux pas vous refuser cette satisfaction. Quand vous penserez �� moi... eh! bien... pensez �� Jacqueline.
--Jacqueline! murmura Paul qui trouvait ce nom charmant.
Je r��p��terai souvent: Jacqueline!... cela m'aidera �� prendre patience jusqu'au jour o�� vous voudrez bien vous souvenir de moi.
--Ne craignez pas que j'oublie, reprit vivement la dame. Mais le moment est venu de nous quitter. Il ne me reste qu'�� vous dire...
--Adieu?
--Non. Au revoir! faites arr��ter le cocher, je vous prie.
Paul tourna le bouton d'avertissement et demanda:
--Vous gardez la voiture, Madame?
--Oui... je la quitterai un peu plus loin.
Paul comprit qu'elle attendait qu'il part?t pour donner l'adresse de la maison o�� elle allait.
Il ouvrit la porti��re et il descendit.
Il esp��rait que Jacqueline allait lui tendre la main, et il l'aurait bais��e avec enthousiasme cette main, gant��e de Su��de.
Il n'eut m��me pas le plaisir de la serrer, car d��s qu'il fit le geste de la prendre, elle se retira vivement.
Cette premi��re d��ception n'��tait pas pour le mettre de bonne humeur.
Il s'��tait laiss�� enguirlander par les douces paroles de la dame et il venait d'accepter les conditions bizarres qu'elle lui imposait.
Il n'eut pas plut?t pris pied sur la chauss��e de la grande avenue des Champs-Elys��es qu'il changea de sentiment sur la soi-disant Jacqueline.
Ce fut un revirement complet.
Dans la voiture, il la trouvait adorable; il croyait �� ses serments et aux histoires pleines de r��ticences qu'elle lui racontait.
Depuis qu'il avait touch�� terre, elle lui faisait l'effet d'une intrigante et il ne se pardonnait pas de s'��tre laiss�� prendre �� ses mensonges.
--Non, disait-il entre ses dents, je ne me corrigerai jamais... les yeux d'une jolie fille m'emp��cheront toujours d'y voir clair. En voil�� une qui s'en va m'attendre �� la sortie du Luxembourg et qui me force �� monter en fiacre avec elle. Maria, l'apprentie accoucheuse, n'oserait pas en faire autant. Je me laisse emmener et au lieu de profiter de l'occasion, je la prends pour une femme du monde et j'��coute pieusement les balivernes qu'elle me d��bite sur mon ami Jean... Ah! ce qu'il me blaguerait, s'il me voyait lach�� sur l'asphalte, pendant qu'elle se fait conduire chez un amant qui l'attend du c?t�� du rond-point! Elle m'a jou�� l�� un bon tour, mais je la repincerai...
Tout en s'objurguant ainsi lui-m��me, Paul suivait des yeux la voiture.
Il en ��tait descendu �� la hauteur du Cirque d'Et�� et il s'��tait avanc�� jusqu'au coin de l'avenue Matignon. Il la vit s'arr��ter un peu plus loin, du c?t�� de la rue Montaigne.
La dame en sortit, paya le cocher et s'engagea, sans se retourner, mais sans trop se presser, dans l'avenue d'Antin.
--Parbleu! je saurai o�� elle va, grommela Paul Cormier.
Elle m'a fait jurer de ne pas l'interroger, mais elle ne m'a pas d��fendu de la suivre. Si elle s'en aper?oit, je la rattraperai et nous aurons une petite explication o�� je ne me g��nerai pas pour lui dire son fait. Si elle ne me voit pas, je ne la lacherai qu'�� la porte de la maison o�� elle entrera.
Et encore! non... je me sens tr��s capable d'y
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