La grande ombre | Page 4

Sir Arthur Conan Doyle
le c?té du crane avec le poing fermé.
à ce coup, le jeune gar?on laissa tomber sa tête sur sa poitrine comme s'il avait été étourdi.
Mon père hocha la tête, car il avait de l'affection pour Jim, et nous rentrames tous à la maison, en dodelinant du chef, et les yeux papillotants, pouvant à peine tenir les yeux ouverts, maintenant que nous savions tout danger passé.
Mais nous éprouvions en même temps au coeur un frisson de joie comme je n'en ai ressenti le pareil qu'une ou deux autres fois en ma vie.
Sans doute, tout cela n'a pas beaucoup de rapport avec ce que j'ai entrepris de raconter, mais quand on a une bonne mémoire et peu d’habileté, on n'arrive pas à tirer une pensée de son esprit sans qu'une douzaine d'autres s'y cramponnent pour sortir en même temps.
Et pourtant, maintenant que je me suis mis à y songer, cet incident n'était pas entièrement étranger à mon récit, car Jim Horscroft eut une discussion si violente avec son père, qu'il fut expédié au collège de Berwick et comme mon père avait depuis longtemps formé le projet de m'y placer aussi, il profita de l'occasion que lui offrait le hasard pour m'y envoyer.
Mais avant de dire un mot au sujet de cette école, il me faut revenir à l'endroit où j'aurais d? commencer, et vous mettre en état de savoir qui je suis, car il pourrait se faire que ces pages écrites par moi tombent sous les yeux de gens qui habitent bien loin au-delà du border, et n'ont jamais entendu parler des Calder de West Inch.
Cela vous a un certain air, West Inch, mais ce n'est point un beau domaine, autour d'une bonne habitation.
C'est simplement une grande terre à paturages de moutons, ou la bise souffle avec apreté et que le vent balaie.
Elle s'étend en formant une bande fragmentée le long de la mer.
Un homme frugal, et qui travaille dur, y arrive tout juste à gagner son loyer et à avoir du beurre le dimanche au lieu de mélasse.
Au milieu, s'élève une maison d'habitation en pierre, recouverte en ardoise, avec un appentis derrière.
La date de 1703 est gravée grossièrement dans le bloc qui forme le linteau de la porte.
Il y a plus de cent ans que ma famille est établie là, et malgré sa pauvreté, elle est arrivée à tenir un bon rang dans le pays, car à la campagne le vieux fermier est souvent plus estimé que le nouveau laird.
La maison de West Inch présentait une particularité singulière.
Il avait été établi par des ingénieurs et autres personnes compétentes, que la ligne de délimitation entre les deux pays passait exactement par le milieu de la maison, de fa?on à couper notre meilleure chambre à coucher en deux moitiés, l'une anglaise, l'autre écossaise.
Or, la couchette que j'occupais était orientée de telle sorte que j'avais la tête au nord de la frontière et les pieds au sud.
Mes amis disent que si le hasard avait placé mon lit en sens contraire, j'aurais eu peut-être la chevelure d'un blond moins roux et l'esprit d'une tournure moins solennelle.
Ce que je sais, c'est qu'une fois en ma vie, où ma tête d’écossais ne voyait aucun moyen de me tirer de péril, mes bonnes grosses jambes d'Anglais vinrent à mon aide et m'en éloignèrent jusqu'en lieu s?r.
Mais à l'école, cela me valut des histoires à n'en plus finir: les uns m'avaient surnommé Grog à l'eau; pour d'autres j'étais la ? Grande Bretagne ? pour d'autres, ? l'Union Jock ?.
Lorsqu'il y avait une bataille entre les petits écossais et les petits Anglais, les uns me donnaient des coups de pied dans les jambes, les autres des coups de poing sur les oreilles.
Puis on s'arrêtait des deux c?tés pour se mettre à rire, comme si la chose était bien plaisante.
Dans les commencements, je fus très malheureux à l'école de Berwick.
Birtwhistle était le premier ma?tre, et Adams le second, et je n'avais d'affection ni pour l'un ni pour l'autre.
J’étais naturellement timide, très peu expansif.
Je fus long à me faire un ami soit parmi les ma?tres, soit parmi mes camarades.
Il y avait neuf milles à vol d'oiseau, et onze milles et demi par la route, de Berwick à West Inch.
J'avais le coeur gros en pensant à la distance qui me séparait de ma mère.
Remarquez, en effet, qu'un gar?on de cet age, tout en prétendant se passer des caresses maternelles, souffre cruellement, hélas! quand on le prend au mot.
à la fin, je n'y tins plus, et je pris la résolution de m’enfuir de l'école, et de retourner le plus t?t possible à la maison.
Mais au dernier moment, j'eus la bonne fortune de m'attirer l'éloge et l'admiration de tous depuis le directeur de l’école, jusqu'au dernier élève, ce qui rendit ma vie d'écolier fort agréable et fort douce.
Et tout cela, parce que par suite d'un
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