La cité de Carcassonne | Page 7

Eugène-Emmanuel Viollet-le-Duc
les merlons primitifs ainsi englobés dans la ma?onnerie surélevée, afin de donner à cette courtine, jugée trop basse, un commandement plus considérable.
Or, cette surélévation est construite en pierres avec bossages, les créneaux sont plus espacés, l'appareil beaucoup plus soigné que dans la partie inférieure et parfaitement semblable, en tout, à l'appareil des constructions de 1280.
La différence entre les deux constructions peut être constatée par l'observateur le moins exercé: donc, la partie inférieure étant semblable, comme procédés de structure, à tout le reste de l'enceinte extérieure, et la surélévation conforme, comme appareil, à toutes les constructions dues à Philippe le Hardi, l'enceinte extérieure a été évidemment élevée avant les restaurations et les adjonctions entreprises par le fils de Louis IX.
Du c?té du sud-ouest, la muraille des Visigoths venait longer la fa?ade ouest de l'église cathédrale de Saint-Nazaire (fig. 16). Cette fa?ade, élevée, comme nous l'avons dit, à la fin du XIe siècle ou au commencement du XIIe n'est qu'un mur fort épais sans ouverture dans la partie inférieure. Elle dominait l'enceinte visigothe et augmentait sa force sur ce point attaquable. Son couronnement consistait en un crénelage dont nous avons retrouvé les traces et que nous avons pu rétablir dans son intégrité.
Les fortifications de Philippe le Hardi laissèrent entre elles et cette fa?ade (fig. 16) un large espace et la défense supérieure de la fa?ade de Saint-Nazaire demeura sans objet puisqu'elle ne commandait plus les dehors.
Depuis lors il ne fut entrepris aucun travail de défense dans la cité de Carcassonne et, pendant tout le cours du moyen age, cette forteresse fut considérée comme imprenable. Le fait est qu'elle ne fut point attaquée et n'ouvrit ses portes au prince Noir, Edouard, en 1355, que quand tout le pays du Languedoc se fut soumis à ce conquérant.

DESCRIPTION DES DéFENSES DE LA CITé.
J'ai voulu donner un résumé très-succinct de l'histoire des constructions qui composent l'enceinte de la cité de Carcassonne, afin d'expliquer aux voyageurs curieux les irrégularités et les différences d'aspect que présentent ces défenses dont une partie date de la domination romaine et visigothe et qui ont été successivement modifiées et restaurées, pendant les XIIe et XIIIe siècles, par les vicomtes et par le roi de France.
Quand on se présente devant la cité de Carcassonne, on est tout d'abord frappé de l'aspect grandiose et sévère de ces tours brunes si diverses de dimensions, de forme, et qui suivent, ainsi que les hautes courtines qui les réunissent, les mouvements du terrain pour obtenir un commandement sur la campagne et profiter autant que possible des avantages naturels offerts par les escarpements du plateau, au bord duquel on les a élevées. Du c?té oriental est ouverte l'entrée principale, la seule accessible aux charrois, c'est la porte Narbonnaise défendue par un fossé et une barbacane garnie de meurtrières et d'un crénelage avec chemin de ronde. L'entrée est biaise, de fa?on à masquer la porte de l'ouvrage principal. Un chatelet, qui peut être isolé de la barbacane, la précède, à cheval sur le pont qui était composé de deux tabliers mobiles en bois, dont les tourillons sont encore à leur place. Cette barbacane et le chatelet sont ouverts à la gorge afin d'être battus par les défenses supérieures de la porte Narbonnaise, si ces premiers ouvrages tombaient au pouvoir de l'ennemi.
Du c?té extérieur, les deux grosses tours entre lesquelles est ouverte la porte, sont renforcées par des becs, sortes d'éperons destinés à éloigner l'assaillant du point tangent le plus attaquable, de le forcer de se démasquer, à faire dévier le bélier (bosson en langue d'O?l), ou à présenter une plus forte épaisseur de ma?onnerie à la mine.
L'entrée était d'abord fermée par une cha?ne dont les attaches sont encore à leur place et qui était destinée à empêcher des chevaux lancés d'entrer dans la ville. Un machicoulis protège la première herse et la première porte en bois avec barres; dans la vo?te est percé un second machicoulis, puis on trouve un troisième machicoulis devant la seconde herse. Il n'était donc pas facile de franchir tous ces obstacles. Mais cette entrée était défendue d'une manière plus efficace encore en temps de guerre.
Au-dessus de l'arc de la porte, des deux c?tés de la niche occupée par la statue de la Vierge, se voient, sur les flancs de chacune des deux tours, trois entailles proprement faites; les deux voisines de l'angle sont coupées carrément et d'une profondeur de Om,20, la troisième est coupée en biseau comme pour recevoir le pied d'un lien de bois ou d'un chevron incliné. Au-dessus de la niche de la Vierge on remarque trois autres trous carrés profonds, destinés à recevoir des pièces de bois formant une forte saillie. Ces trous recevaient, en effet, les pièces de bois d'un auvent formant une saillie prononcée au-dessus de la porte, protégeant la niche et les gens de garde à l'entrée de
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