retint avec force.
--Vous me faites mal! vous me brisez les doigts! dit-elle.
--Oh! la petite folle, la petite folle, pronon?a-t-il en riant et en allongeant son autre main pour la ressaisir par la ceinture.
--Je vous dis que vous me faites mal, et je vous ordonne de me lacher ou j'appelle vos gens, s'��cria Clotilde irrit��e.
Ses sourcils s'��taient fronc��s et elle tendait le bras vers le cordon d'une sonnette.
Le baron profita de ce qu'elle avait d��tourn�� la t��te pour l'��treindre brusquement, l'enlever du parquet et la placer sur ses genoux.
Avant qu'elle f?t revenue de sa surprise, il avait imprim�� un chaud baiser sur l'��paule nue de la jeune femme.
Elle bondit sous ce baiser comme sous une br?lure, et se pr��cipita au milieu du salon.
--Ah! monsieur, vous ��tes ignoble et lache! prof��ra-t-elle avec un accent d'horreur et de d��dain intraduisible.
Mais, enflamm�� par la luxure, le baron se leva et courut apr��s elle.
C'��tait un homme de soixante-cinq �� soixante dix ans, petit, maigre, bilieux, cacochyme; une figure de casse-noisettes, mont��e sur des membres gr��les, courts, dont toute la personne offrait le type de l'ancien rou�� de la R��gence, us��, perclus par les exc��s encore plus que par l'age, et r��duit �� l'��tat de satyre impotent.
--Vraiment, ma belle, balbutia-t-il entre des hoquets, en tr��buchant; vraiment, vos dr?leries passent les bornes! Pour une p��ronnelle de votre esp��ce, vous jouez trop �� la reine.
Clotilde se retrancha derri��re un gu��ridon, et, s'armant d'un sucrier, elle s'��cria:
--Je vous jure que si vous faites encore un pas, je vous brise cette porcelaine sur la t��te!
D��j�� grande de taille, malgr�� ses seize ans �� peine accomplis, bien faite, les traits agr��ables, d'une r��gularit�� antique, quoique un peu durs, notamment quand la passion l'excitait, Clotilde ��tait magnifique �� voir dans cette attitude.
L'ivresse pr��tait au vieux podagre une ardeur dont il n'��tait plus coutumier depuis longtemps. Cependant, il n'osa point avancer.
--Encore une fois, monsieur, je vous en conjure, laissez-moi m'en aller, reprit la jeune femme en adoucissant le timbre de sa voix.
--Non, r��pondit-il s��chement, non, vous ne vous en irez pas ainsi. Pendant une ann��e, j'ai jou�� le r?le de niais; c'est assez. Il faut que cela finisse. Imaginez-vous, madame, que je vous ai ��pous��e par amour platonique? que je vous ai constitu�� cinquante mille livres de rentes pour passer ma vie �� vous admirer comme on admire une peinture ou pour faire g��n��reusement cadeau de vos charmes �� mes amis...
--Monsieur! exclama Clotilde bless��e jusqu'au fond du coeur par ce trait, vous ��tes indigne...
--Ta, ta, ta, des grands mots!
--Oui, vous ��tes indigne du titre de gentilhomme. Vous traitez votre femme comme une courtisane, c'est infame!
--Ma femme! mais est-ce que vous l'��tes, ma femme? ricana-t-il. Nous sommes mari��s, voil�� tout.
--Eh! que m'avez-vous promis en nous mariant?
--Bah! des promesses qui n'en sont pas.
--Si vous oubliez, monsieur, moi je n'oublie pas. Vous m'avez ��pous��e contre mon gr��; j'en aimais un autre...
--Madame!... tonna M. de Grandfroy.
--Je vous r��p��te, dit-elle froidement, en scandant les syllabes, je vous r��p��te que j'en aimais un autre. Je vous le d��clarai, esp��rant que vous abandonneriez vos pr��tentions et m'aideriez �� d��jouer les projets de ma belle-m��re qui me sacrifiait �� son avarice, �� sa jalousie: car je vous croyais noble, je vous croyais homme de coeur, M. le baron. Mais je me trompais! ah! je me trompais terriblement, ajouta-t-elle avec un soupir; oui, je me trompais. Loin de vous d��sister, vous vous ��tes ligu�� avec mes ennemis. Vous m'avez arrach�� mon consentement; que dis-je, vous l'avez surpris... et vous m'aviez jur��, jur�� devant Dieu, de me traiter comme votre fille...
--Palsembleu, vous ��tes plaisante, madame, on se marie pour avoir des filles, et non pour poss��der une femme-fille!
Il accompagna ce pitoyable jeu de mots d'un bruyant ��clat de rire.
Clotilde haussa les ��paules.
--Eh bien, dit-elle d'un ton provocateur, j'ai votre parole, monsieur, et je vous obligerai �� la tenir si vous ne le voulez pas.
--Il ferait beau voir! riposta-t-il, en marchant sur la jeune femme.
--N'allez pas plus loin, monsieur; ne me d��fiez pas! dit-elle en brandissant le sucrier.
--A vaincre sans combat, on triomphe sans gloire! r��pliqua gaillardement le baron, qui avait recouvr�� sa hardiesse.
Et il se jeta vers le gu��ridon.
Mais, par malheur, ses pieds heurtant un tabouret, il tomba ��tendu tout de son long.
Clotilde saisit cette occasion pour quitter le salon, et gagna son appartement.
--Je me passerai de vous. Maria, dit-elle �� sa cam��riste qu'elle rencontra dans le vestibule, et qui se disposait �� l'accompagner pour l'aider �� faire sa toilette de nuit.
En entrant dans sa chambre �� coucher, elle s'enferma, s'enfon?a dans un fauteuil devant la chemin��e, o�� p��tillait un bon feu de h��tre, et se mit �� r��fl��chir.
Bient?t on frappa �� la porte.
--Ah! mon Dieu! dit-elle en fureur, il me poursuivra donc jusqu'ici!
--C'est moi, Clotilde, je ne vous tourmenterai pas, je veux seulement vous souhaiter le bonsoir, dit la voix du baron
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