milord, répondit Henry.
En effet, au même moment, une détonation se fit entendre et une colonne de fumée jaillit de la batterie supérieure.
Les cinq pavillons apportés par Henry montèrent en même temps à la drisse des signaux, transmettant l'ordre de Nelson dans toute sa brutalité.
Le coup de canon avait pour but d'attirer l'attention de la Minerve, qui hissa un pavillon pour indiquer qu'elle prêtait attention au signal du Van-Guard.
Mais, quelque effet que produis?t sur lui la vue des signaux, Caracciolo ne s'empressa pas moins d'obéir.
Il amena ses perroquets, cargua sa misaine et sa grande voile, et tint ses voiles en ralingue.
Nelson, la lunette à la main, suivait la manoeuvre ordonnée par lui. Il vit les voiles de la Minerve fasier: la brigantine et le foc seuls restèrent pleins, et la frégate perdit les trois quarts de sa vitesse, tandis qu'au contraire Nelson, voyant une espèce d'accalmie dans le temps, fit hisser toutes ses voiles, jusqu'à celles de perroquet.
En quelques heures, le Van-Guard eut rattrapé son avantage sur la Minerve. Ce fut alors seulement que celle-ci remit du vent dans ses voiles.
Mais, quoique, à son tour, Caracciolo ne naviguat plus que sous ses huniers, sa brigantine et son foc, tout en se tenant d'un quart de mille en arrière du Van-Guard, il ne perdit pas un pouce de terrain sur le lourd colosse chargé de toutes ses voiles.
CI
En voyant la facilité de la Minerve et comment, pareille à un bon cheval, elle semblait obéir à son commandant, Ferdinand, commen?ait à regretter de ne s'être point embarqué avec son vieil ami Caracciolo, comme il lui avait promis de le faire, au lieu de s'embarquer sur le Van-Guard.
Il descendit dans la grande chambre et trouva la reine et les jeunes princesses assez calmes. Depuis le jour venu, elles avaient pris quelque repos. Le jeune prince Albert seul, délicat de santé, avait été atteint de vomissements et était couché sur la poitrine d'Emma Lyonna, qui, admirable dans son dévouement, n'avait pas pris un instant de repos et ne s'était occupée que de la reine et de ses enfants.
On courut des bordées toute la journée; seulement, les bordées devenaient d'autant plus fatigantes que la mer était devenue plus dure. A chaque virement de bord, les souffrances du jeune prince redoublaient.
Vers trois heures de l'après-midi, Emma Lyonna monta sur le pont. Il ne fallait pas moins que sa présence pour dérider le front de Nelson. Elle venait lui dire que le prince était très-mal et que la reine faisait demander s'il n'y avait pas moyen d'atterrir quelque part ou de changer de route.
On était à la hauteur d'Amantea, à peu près: on pouvait relacher dans le golfe de Sainte-Euphémie. Mais que penserait Caracciolo? Que le Van-Guard n'avait pas pu tenir la mer, et que Nelson, ce vainqueur des hommes, avait été à son tour vaincu par la mer?
Ses désastres maritimes étaient célèbres presque à l'égal de ses victoires. Il y avait un mois à peine que, dans le golfe de Lyon, son batiment, dans un coup de vent, avait été dématé de ses trois mats, et était rentré dans le port de Cagliari rasé comme un ponton, à la remorque d'un autre de ses batiments, moins endommagé que lui.
Il interrogea l'horizon avec cet oeil profond du marin, à qui tous les signes du danger sont connus.
Le temps n'était point rassurant. Le soleil, perdu dans les nuages, qu'il teignait à grand'peine d'une lueur jaunatre, s'affaissait lentement à l'occident, en coupant le ciel de ces irradiations qui annoncent du vent pour le lendemain, et qui font dire aux pilotes: ?Gare à nous! le soleil est affourché sur ses ancres!? Le Stromboli, que l'on commen?ait d'entendre gronder dans le lointain, était complétement perdu, ainsi que l'archipel d'?les au-dessus desquelles il s'élève, dans une masse de vapeurs qui semblaient flotter sur la mer et venir au-devant des fugitifs. Du c?té opposé, c'est-à-dire vers le nord, le temps était assez dégagé; mais, aussi loin que l'oeil pouvait s'étendre, on ne voyait d'autre batiment que la Minerve, qui, opérant exactement les mêmes évolutions que le Van-Guard, semblait son ombre. Les autres vaisseaux, profitant de la permission donnée par Nelson, manoeuvre indépendante, ou s'étaient abrités dans le port de Castellamare, ou, prenant la bordée de l'ouest, s'étaient réfugiés dans la haute mer.
Si le vent tenait et que l'on continuat de faire route sur Palerme, il fallait courir des bordées toute la nuit et probablement toute la journée du lendemain.
C'était encore deux ou trois jours de mer à subir, et lady Hamilton affirmait que le jeune prince ne pouvait les supporter.
Si, au contraire, le même vent tenait et que l'on m?t le cap sur Messine, comme on naviguait avec du largue, on pouvait, en profitant du courant, malgré le vent contraire, entrer dans le port pendant la nuit.
En agissant ainsi, Nelson ne relachait point: il
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