part de son gouvernement.
?Faites-moi donc, par le retour du même courrier que je vous envoie, très-excellent frère, cousin et neveu, allié et confédéré, savoir quelles sont vos dispositions pour la prochaine guerre, et surtout l'époque précise à laquelle vous comptez vous mettre en campagne, ne voulant absolument rien faire qu'en même temps que vous et d'accord avec vous.
?J'attendrai la réponse de Votre Majesté pour me régler en tout point sur les instructions qu'elle me donnera.
?La présente n'étant à autre fin, je me dis, en lui souhaitant toute sorte de prospérités, de Votre Majesté, le bon frère, cousin et oncle, allié et confédéré.?
--Ouf! fit le roi.
Et il leva la tête pour interroger le cardinal.
--Eh bien, c'est fini, sire, et Votre Majesté n'a plus qu'à signer.
Le roi signa, selon son habitude: Ferdinand B.
--Et quand je pense, continua le roi, que j'aurais mis la nuit tout entière à écrire cette lettre. Merci, mon cher cardinal, merci.
--Que cherche Votre Majesté? demanda Ruffo, qui voyait que le roi cherchait autour de lui avec inquiétude.
--Une enveloppe.
--Bien, dit Ruffo, nous allons en faire une.
--C'est encore une chose que San-Nicandro ne m'a point appris à faire, des enveloppes! Il est vrai qu'ayant oublié de m'apprendre à écrire, il avait regardé la science des enveloppes comme chose inutile.
--Votre Majesté permet-elle? demanda Ruffo.
--Comment, si je la permets! dit le roi en se levant. Asseyez-vous là à ma place sur mon fauteuil, mon cher cardinal.
Le cardinal s'assit sur le fauteuil du roi, et, avec une grande prestesse et une grande habileté, plia et déchira le papier qui devait recouvrir la lettre royale.
Ferdinand le regardait faire avec admiration.
--Maintenant, dit le cardinal, Votre Majesté veut-elle me dire où est son sceau?
--Je vais vous le donner, je vais vous le donner, ne vous dérangez pas, dit le roi.
La lettre fut cachetée, et le roi mit l'adresse.
Puis, appuyant son menton dans sa main, il demeura pensif.
--Je n'ose interroger le roi, demande Ruffo en s'inclinant.
--Je veux, répondit le roi toujours pensif, que personne ne sache que j'ai écrit cette lettre à mon neveu, ni par qui je l'ai envoyée.
--Alors, sire, dit en riant Ruffo, Votre Majesté va me faire assassiner en sortant du palais.
--Vous, mon cher cardinal, vous n'êtes pas quelqu'un pour moi; vous êtes un autre moi-même.
Ruffo s'inclina.
--Oh! ne me remerciez point, allez, le compliment n'est pas riche.
--Comment faire, alors? Il faut cependant que vous envoyiez chercher Ferrari par quelqu'un, sire.
--Justement, je m'oriente.
--Si je savais où il est, dit Ruffo, j'irais le chercher.
--Pardieu! moi aussi, fit le roi.
--Vous avez dit qu'il était dans le palais.
--Certainement qu'il y est; seulement, le palais est grand. Attendez, attendez donc! En vérité, je suis encore plus bête que je ne croyais.
Il ouvrit la porte de sa chambre à coucher et siffla.
Un grand épagneul s'élan?a du tapis où il était couché près du lit de son ma?tre, posa ses deux pattes sur la poitrine du roi, toute chamarrée de plaques et de cordons, et se mit à lui lécher le visage, occupation à laquelle le ma?tre paraissait prendre autant de plaisir que le chien.
--C'est Ferrari qui l'a élevé, dit le roi; il va me trouver Ferrari tout de suite.
Puis, changeant de voix et parlant à son chien comme il e?t parlé à un enfant:
--Où est-il donc, ce pauvre Ferrari, Jupiter? Nous allons le chercher. Ta?aut! ta?aut!
Jupiter parut parfaitement comprendre; il fit trois ou quatre bonds par la chambre, humant l'air et jetant des cris joyeux; puis il alla gratter à la porte d'un corridor secret.
--Ah! nous en revoyons donc, mon bon chien? dit le roi.
Et, allumant un bougeoir au candélabre, il ouvrit la porte du couloir en disant:
--Cherche, Jupiter! cherche!
Le cardinal suivait le roi, d'abord pour ne pas le laisser seul, ensuite par curiosité.
Jupiter s'élan?a vers l'extrémité du couloir et gratta à une seconde porte.
--Nous sommes donc sur la voie, mon bon Jupiter? continua le roi.
Et il ouvrit cette seconde porte, comme il avait ouvert la première; elle donnait sur une antichambre vide.
Jupiter alla droit à une porte opposée à celle par laquelle il était entré et se dressa contre cette porte.
--Tout beau! dit le roi, tout beau!
Puis, se tournant vers Ruffo:
--Nous br?lons, cardinal, dit-il.
Et il ouvrit cette troisième porte.
Elle donnait sur un petit escalier. Jupiter s'y élan?a, monta rapidement une vingtaine de marches, puis se mit à gratter la porte en poussant de petits cris.
--Zitto! zitto! dit le roi.
Le roi ouvrit cette quatrième porte comme il avait ouvert les trois autres; seulement, cette fois, il était arrivé au terme de son voyage: le courrier, tout vêtu et tout éperonné, dormait sur un lit de camp.
--Hein! fit le roi, tout fier de l'intelligence de son chien; et quand je pense que pas un de mes ministres, même celui de la police, n'aurait fait ce que vient de faire mon chien!
Malgré l'envie qu'avait Jupiter de sauter sur le lit de son
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