de l'armée 1884, il y eut en Roumélie des meetings très nombreux et très enthousiastes en faveur de l'Union. Les Russes, les russophiles et même les consuls de Russie y prenaient part ou les encourageaient ouvertement.
En même temps s'étaient formés, dans les principales villes des deux Bulgaries, des comités macédoniens ayant pour but de secourir les réfugiés de la Macédoine et de réclamer les réformes promises à ce malheureux pays par le traité de Berlin. Dans l'été de 1885, les chefs de ces comités, entre autres MM. Zacharie Stoyanoff et D. Rizoff, se décidèrent à lancer le mouvement en Macédoine; mais ayant appris qu'ils ne seraient pas soutenus par la Russie, ils crurent devoir utiliser les forces dont ils disposaient pour faire la révolution en Roumélie. Ils trouvèrent un appui dévoué chez deux officiers très patriotes et très influents, le capitaine Panitza et le major Nikolaieff, son beau-frère. Ils sondèrent le consulat de Russie et les chefs militaires, et ne rencontrèrent nulle opposition.
On se rappelle comment le gouverneur Christovitch fut enlevé et la révolution faite en une seule nuit (19 septembre 1885), sans nulle violence et sans résistance. Ce n'était que l'accomplissement du voeu de la population tout entière. Le dénouement était prévu et croyait pouvoir compter sur l'approbation sans réserve de la Russie.
Le prince Alexandre n'avait pu être instruit d'avance de ce coup de main[1], puisque tout avait été improvisé, et il avait pu, en toute sincérité, garantir à M. de Giers, qu'il avait rencontré en Allemagne, le maintien de l'ordre établi. Mais trouvant, à sa rentrée dans le pays, la révolution faite, il avait d? l'accepter, et dans une proclamation datée de Tirnova, le 19 septembre, il reconnut l'union, en prenant le titre de prince de la Bulgarie du Nord et du Sud.
[Note 1: D'après un renseignement s?r, il aurait été instruit de ce qui se préparait sept jours à l'avance, mais il n'avait aucun moyen d'empêcher le mouvement en Roumélie.]
Aussit?t se révéla l'opposition entre l'Angleterre et la Russie. Faisant toutes deux complètement volte-face, la première approuva l'union, qu'elle avait tant combattue à Berlin, et la seconde l'attaqua, alors qu'elle avait failli risquer la guerre pour la maintenir cinq ans auparavant.
Dans une note collective en date du 13 octobre, les puissances déclarent ?qu'elles condamnent cette violation du traité et qu'elles comptent que le sultan fera tout ce qu'il pourra, sans abandonner ses droits de souveraineté, pour ne pas faire usage de la force dont il dispose?. Dans la conférence des ambassadeurs, qui se réunit le 5 novembre à Constantinople, la Russie se montra complètement hostile à l'union des deux Bulgaries. Contrairement aux intentions des autres puissances, elle alla même jusqu'à pousser la Porte à s'y opposer par les armes.
L'Angleterre était représentée alors en Turquie par un diplomate éminent, plein d'esprit et de ressources et connaissant à fond les hommes et les choses de l'Orient, sir William White. Il parvint à empêcher toute résolution décisive au sein de la conférence, et, en même temps, il ménagea une entente directe entre le prince Alexandre et la Porte, qui n'avait nulle envie d'intervenir en Roumélie.
L'Autriche et l'Allemagne avaient accepté, dès le début, l'union des deux Bulgaries comme un fait accompli. Le 22 septembre, le comte Kálnoky disait à l'ambassadeur anglais à Vienne: ?La reconnaissance par le prince Alexandre de la souveraineté du sultan est importante, parce qu'elle facilite la conduite à suivre par la Porte, si elle est disposée à reconna?tre le changement qui s'est effectué. Ce n'est pas l'union des deux provinces que chacun attendait t?t ou tard, mais la fa?on dont elle s'est faite qui a soulevé des objections.? (Blue Book anglais, Turkey, I, n°. 53.)
Le prince de Bismarck arrêta net toute velléité d'intervention militaire turque qui aurait pu se produire. ?Je viens de voir M. Thielman, le chargé d'affaires allemand, écrit sir William White le 25 septembre, et il m'informe qu'il a re?u du prince de Bismarck des instructions à l'effet de dissuader les Turcs de passer la frontière. Depuis le début, le sultan est disposé à s'abstenir?. (Blue Book, I, n° 50.)
Lorsque plus tard un accord intervint entre la Porte et le prince Alexandre, l'Autriche et l'Allemagne n'y firent d'objection que parce qu'on n'avait pas assez tenu compte des voeux des populations. Le comte Kálnoky dit à l'ambassadeur anglais à Vienne ?que cet accord pourrait être notifié avec avantage dans le sens d'une extension plut?t que d'une restriction, afin d'amener un règlement final satisfaisant, et il citait la clause nommant le prince Alexandre gouverneur général de la Roumélie pour cinq ans, alors qu'il aurait fallu le nommer à vie. Il exprima l'opinion que l'arrangement devait être de nature à satisfaire les populations de la Bulgarie et de la Roumélie, aussi bien que le prince, afin d'éviter une nouvelle agitation.? (Blue Book, II, n° 133.)
Tandis que l'Autriche et
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