de t��n��bres, et je ne d��couvrais rien devant moi que la montagne �� perte de vue. Des tentes apparurent dans un vallon, j'y descendis et j'essayai de faire comprendre au premier Arabe rencontr�� la direction que je cherchais.
M'a-t-il devin��? je l'ignore; mais il me r��pondit longtemps, et moi je ne compris rien. J'allais, par d��sespoir, me, d��cider �� passer la nuit, roul�� dans un tapis, aupr��s du campement, quand je crus reconna?tre, parmi les mots bizarres qui sortaient de sa bouche, celui de Bordj-Ebbaba.
Je r��p��tai:--Bordj-Ebbaba.--Oui, oui.
Et je lui montrai deux francs, une fortune. Il se mit �� marcher, je le suivis. Oh! je suivis longtemps, dans la nuit profonde, ce fant?me pale qui courait pieds nus devant moi par les sentiers pierreux o�� je tr��buchais sans cesse.
Soudain une lumi��re brilla. Nous arrivions devant la porte d'une maison blanche, sorte de fortin aux murs droits et sans fen��tres ext��rieures. Je frappai, des chiens hurl��rent au dedans. Une voix fran?aise demanda: ?Qui est l��!?
Je r��pondis:
--Est-ce ici que demeure M. Auballe?
--Oui.
On m'ouvrit, j'��tais en face de M. Auballe lui-m��me, un grand gar?on blond, en savates, pipe �� la bouche, avec l'air d'un hercule bon enfant.
Je me nommai; il tendit ses deux mains en disant: ?Vous ��tes chez vous, monsieur.?
Un quart d'heure plus tard je d?nais avidement en face de mon h?te qui continuait �� fumer.
Je savais son histoire. Apr��s avoir mang�� beaucoup d'argent avec les femmes, il avait plac�� son reste en terres alg��riennes, et plant�� des vignes.
Les vignes marchaient bien; il ��tait heureux, et il avait en effet l'air calme d'un homme satisfait. Je ne pouvais comprendre comment ce Parisien, ce f��teur, avait pu s'accoutumer �� cette vie monotone, dans cette solitude, et je l'interrogeai.
--Depuis combien de temps ��tes-vous ici?
--Depuis neuf ans.
--Et vous n'avez pas d'atroces tristesses?
--Non, on se fait �� ce pays, et puis on finit par l'aimer. Vous ne sauriez croire comme il prend les gens par un tas de petits instincts animaux que nous ignorons en nous. Nous nous y attachons d'abord par nos organes �� qui il donne des satisfactions secr��tes que nous ne raisonnons pas. L'air et le climat font la conqu��te de notre chair, malgr�� nous, et la lumi��re gaie dont il est inond�� tient l'esprit clair et content, �� peu de frais. Elle entre en nous �� flots, sans cesse, par les yeux, et on dirait vraiment qu'elle lave tous les coins sombres de l'ame.
--Mais les femmes?
--Ah!... ?a manque un peu!
--Un peu seulement?
--Mon Dieu, oui... un peu. Car on trouve toujours, m��me dans les tribus, des indig��nes complaisants qui pensent aux nuits du Roumi.
Il se tourna vers l'Arabe qui me servait, un grand gar?on brun dont l'oeil noir luisait sous le turban, et il lui dit:
--Va-t'en, Mohammed, je t'appellerai quand j'aurai besoin de toi.
Puis, �� moi:
--Il comprend le fran?ais et je vais vous conter une histoire o�� il joue un grand r?le.
L'homme ��tant parti, il commen?a:
--J'��tais ici depuis quatre ans environ, encore peu install��, �� tous ��gards, dans ce pays dont je commen?ais �� balbutier la langue, et oblig�� pour ne pas rompre tout �� fait avec des passions qui m'ont ��t�� fatales d'ailleurs, de faire �� Alger un voyage de quelques jours, de temps en temps.
J'avais achet�� cette ferme, ce bordj, ancien poste fortifi��, �� quelques centaines de m��tres du campement indig��ne dont j'emploie les hommes �� mes cultures. Dans cette tribu, fraction des Oulad-Taadja, je choisis en arrivant, pour mon service particulier, un grand gar?on, celui que vous venez de voir, Mohammed ben Lam'har, qui me fut bient?t extr��mement d��vou��. Comme il ne voulait pas coucher dans une maison dont il n'avait point l'habitude, il dressa sa tente �� quelques pas de la porte, afin que je pusse l'appeler de ma fen��tre.
Ma vie, vous la devinez? Tout le jour, je suivais les d��frichements et les plantations, je chassais un peu, j'allais d?ner avec les officiers des postes voisins, ou bien ils venaient d?ner chez moi.
Quant aux... plaisirs--je vous les ai dits. Alger m'offrait les plus raffin��s; et de temps en temps, un arabe complaisant et compatissant m'arr��tait au milieu d'une promenade pour me proposer d'amener chez moi, �� la nuit, une femme de tribu. J'acceptais quelquefois, mais, le plus souvent, je refusais, par crainte des ennuis que cela pouvait me cr��er.
Et, un soir, en rentrant d'une tourn��e dans les terres, au commencement de l'��t��, ayant besoin de Mohammed, j'entrai dans sa tente sans l'appeler. Cela m'arrivait �� tout moment.
Sur un de ces grands tapis rouges en haute laine du Djebel-Amour, ��pais et doux comme des matelas, une femme, une fille, presque nue, dormait, les bras crois��s sur ses yeux. Son corps blanc, d'une blancheur luisante sous le jet de lumi��re de la toile soulev��e, m'apparut comme un des plus parfaits ��chantillons de la race humaine que j'eusse vus. Les femmes sont belles par
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