La Daniella, Vol. I.
The Project Gutenberg EBook of La Daniella, Vol. I., by George Sand
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Title: La Daniella, Vol. I.
Author: George Sand
Release Date: November 1, 2004 [EBook #13917]
Language: French
Character set encoding: ISO-8859-1
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DANIELLA, VOL. I. ***
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George Sand
LA DANIELLA
INTRODUCTION
I
Ce que nous allons transcrire sera, pour le lecteur, un roman et un
voyage, soit un voyage pendant un roman, soit un roman durant un
voyage. Pour nous, c'est une histoire réelle; car c'est le récit, écrit par
lui-même, d'une demi-année de la vie d'un de nos amis: année pleine
d'émotions, qui mit en relief et en activité toutes les facultés de son âme
et toute l'individualité de son caractère.
Jusque-là, Jean Valreg (c'est le pseudonyme qu'il a choisi lui-même)
n'était connu ni de lui ni des autres. Il avait eu l'existence la plus sage et
la plus calme qu'il soit possible d'avoir, au temps où nous vivons. Des
circonstances inattendues et romanesques développèrent tout à coup en
lui une passion et une volonté dont ses amis ne le croyaient pas
susceptible. C'est par cet imprévu de ses idées et de sa conduite que son
récit, sous forme de journal, offre quelque intérêt. Ses impressions de
voyage ne présentent rien de bien nouveau; elles n'ont que le mérite
d'une sincérité absolue et d'une certaine indépendance d'esprit. Mais
nous devons nous abstenir de toute réflexion préliminaire sur son
travail: ce serait le déflorer. Nous nous bornerons à quelques détails sur
l'auteur lui-même, tel que nous le connaissions avant qu'il se révélât,
par son propre récit, d'une manière complète.
J.V. (soit Jean Valreg, puisqu'il a pris ce nom qui conserve les initiales
du sien) est le fils d'un de nos plus anciens amis, mort, il y a une
douzaine d'années, au fond de notre province. Valreg père était avocat.
C'était un honnête homme et un homme aimable. Son instruction était
sérieuse et sa conscience délicate; mais, comme beaucoup de nos
concitoyens du Berry, il manquait d'activité. Il laissa, pour toute fortune,
à ses deux enfants, vingt mille francs à partager.
En province, c'est de quoi vivre sans rien faire. Partout, c'est de quoi
acquérir l'éducation nécessaire à une profession libérale, ou fonder un
petit commerce. Les amis de M. Valreg n'avaient donc pas à se
préoccuper du sort de ses enfants, qui, d'ailleurs, ne restaient pas sans
protection. Leur mère était morte jeune; mais ils avaient des oncles et
des tantes, honnêtes gens aussi, et pleins de sollicitude pour eux.
Pour ma part, je les avais entièrement perdus de vue depuis longtemps,
lorsqu'un matin on m'annonça M. Jean Valreg.
Je vis entrer un garçon d'une vingtaine d'années dont la taille et la
figure n'avaient, au premier abord, rien de remarquable. Il était timide,
mais plutôt réservé que gauche, et, voulant le mettre à l'aise, j'y parvins
très-vite en m'abstenant de l'examiner et en me bornant à le
questionner.
--Je me souviens de vous avoir vu souvent quand vous étiez un enfant,
lui dis-je; est-ce que vous vous souvenez de moi?
--C'est parce que je m'en souviens très-bien, répondit-il, que je me
permets de venir vous voir.
--Vous me faites plaisir: j'aimais beaucoup et j'estimais infiniment votre
père.
--_Ton père_! reprit-il avec un abandon qui me gagna le coeur tout de
suite. Autrefois, vous me disiez _tu_, et je suis encore un enfant.
--Soit! ton pauvre père t'a quitté bien jeune! Par qui as-tu été élevé
depuis?
--Je n'ai pas été élevé du tout. Deux tantes se disputèrent ma soeur...
--Qui est mariée, sans doute?
--Hélas, non! Elle est morte. Je suis seul au monde depuis l'âge de
douze ans; car c'est être seul que d'être élevé par un prêtre.
--Par un prêtre? Ah! oui, je me souviens, ton père avait un frère curé de
campagne; je l'ai vu deux ou trois fois: il m'a paru être un excellent
homme. Ne t'a-t-il pas élevé avec tendresse?
--Physiquement, oui; moralement, le mieux qu'il a pu, prêchant
d'exemple; mais, intellectuellement, d'aucune façon. Absorbé par ses
devoirs personnels, ayant, sur toutes choses, et même sur la religion et
la charité, des tendances toutes positives, comme on pouvait les
attendre d'un homme qui avait quitté la charrue pour le séminaire; il m'a
recommandé le travail sans me diriger vers aucun travail, et j'ai passé
dix ans près de lui sans
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