La Dame aux Camelias | Page 9

Alexandre Dumas, fils
dans lequel avait ��t�� enterr��e Manon.
Marguerite, en effet, comme je l'avais appris de quelques amis inform��s des derni��res circonstances de sa vie, n'avait pas vu s'asseoir une r��elle consonlation �� son chevet, pendant les deux mois qu'avait dur�� sa lente et douloureuse agonie.
Puis de Manon et de Marguerite ma pens��e se reportait sur celles que je connaissais et que je voyais s'acheminer en chantant vers une mort presque toujours invariable.
Pauvres cr��atures! Si c'est un tort de les aimer, c'est bien le moins qu'on les plaigne. Vous plaignez l'aveugle qui n'a jamais vu les rayons du jour, le sourd qui n'a jamais entendu les accords de la nature, le muet qui n'a jamais pu rendre la voix de son ame, et, sous un faux pr��texte de pudeur, vous ne voulez pas plaindre cette c��cit�� du c?ur, cette surdit�� de l'ame, ce mutisme de la conscience que rendent folle la malheureuse afflig��e et qui la font malgr�� elle incapable de voir le bien, d'entendre le Seigneur et de parler la langue pure de l'amour et de la foi.
Hugo a fait Marion Delorme, Musset a fait Bernerette, Alexandre Dumas a fait Fernande, les penseurs et les po��tes de tous les temps ont apport�� �� la courtisane l'offrande de leur mis��ricorde, et quelquefois un grand homme les a r��habilit��es de son amour et m��me de son nom. Si j'insiste ainsi sur ce point, c'est que parmi ceux qui vont me lire, beaucoup peut-��tre sont d��j�� pr��ts �� rejeter ce livre, dans lequel ils craignent de ne voir qu'une apologie du vice et de la prostitution, et l'age de l'auteur contribue sans doute encore �� motiver cette crainte. Que ceux qui penseraient ainsi se d��trompent, et qu'ils continuent, si cette crainte seule les retenait.
Je suis tout simplement convaincu d'un principe que est que: Pour la femme �� qui l'��ducation n'a pas enseign�� le bien, Dieu ouvre presque toujours deux sentiers qui l'y ram��nent; ces sentiers sont la douleur et l'amour. Ils sont difficiles; celles qui s'y engagent s'y ensanglantent les pieds, s'y d��chirent les mains, mais elles laissent en m��me temps aux ronces de la route les parures du vice et arrivent au but avec cette nudit�� dont on ne rougit pas devant le Seigneur.
Ceux qui rencontrent ces voyageuses hardies doivent les soutenir et dire �� tous qu'ils les ont rencontr��es, car en le publiant ils montrent la voie.
Il ne s'agit pas de mettre tout bonnement �� l'entr��e de la vie deux poteaux, portant l'un cette inscription: Route de bien, l'autre cet avertissement: Route du mal, et de dire �� ceux qui se pr��sentent: Choisissez; il faut, comme le Christ, montrer des chemins qui ram��nent de la seconde route �� la premi��re ceux qui s'��taient laiss�� tenter par les abords; et il ne faut pas surtout que le commencement de ces chemins soit trop douloureux, ni paraisse trop imp��n��trable.
Le christianisme est l�� avec sa merveilleuse parabole de l'enfant prodigue pour nous conseiller l'indulgence et le pardon. J��sus ��tait plein d'amour pour ces ames bless��es par les passions des hommes, et dont il aimait �� panser les plaies en tirant le baume qui devait les gu��rir des plaies elles-m��mes. Ainsi, il disait �� Madeleine: "Il te sera beaucoup remis parce que tu as beaucoup aim��", sublime pardon qui devait ��veiller une foi sublime.
Pourquoi nous f��rions-nous plus rigides que le Christ? Pourquoi, nous en tenant obstin��ment aux opinions de ce monde qui se fait dur pour qu'on le croie fort, rejetterions-nous avec lui des ames saignantes souvent de blessures par o��, comme le mauvais sang d'un malade, s'��panche le mal de leur pass��, et n'attendant qu'une main amie qui les panse et leur rende la convalescence du c?ur?
C'est �� ma g��n��ration que je m'adresse, �� ceux pour qui les th��ories de M. de Voltaire n'existent heureusement plus, �� ceux qui, comme moi, comprennent que l'humanit�� est depuis quinze ans dans un de ses plus audacieux ��lans. La science du bien et du mal est �� jamais acquise; la foi se reconstruit, le respect des choses saintes nous est rendu, et si le monde ne se fait pas tout �� fait bon, il se fait du moins meilleur. Les efforts de tous les hommes intelligents tendent au m��me but, et toutes les grandes volont��s s'attellent au m��me principe: soyons bon, soyons jeune, soyons vrais! Le mal n'est qu'une vanit��, ayons l'orgueil du bien, et surtout ne d��sesp��rons pas. Ne m��prisons pas la femme qui n'est ni m��re, ni s?ur, ni fille, ni ��pouse. Ne r��duisons pas l'estime �� la famille, l'indulgence �� l'��go?sme. Puisque le ciel est plus en joie pour le repentir d'un p��cheur que pour cent justes qui n'ont jamais p��ch��, essayons de r��jouir le ciel. Il peut nous le rendre avec usure. Laissons sur notre chemin l'aum?ne de notre pardon �� ceux que les d��sirs
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