LUscoque | Page 3

George Sand
��pars de sa fortune; le second, de se faire moine; le troisi��me, de mettre ordre �� ses affaires, et d'aller ensuite guerroyer contre les Turcs. Ce fut ce dernier parti qu'il prit, se disant qu'il valait mieux casser la t��te aux autres qu'�� soi-m��me, et que d'ailleurs il ��tait toujours temps d'en venir l��. Il vendit donc tous ses biens, paya ses dettes, et, avec ses derniers deniers, qui ne l'auraient pas fait vivre deux mois, il ��quipa et arma une gal��re, et partit �� la rencontre des infid��les. Il leur fit payer cher les folies de sa jeunesse. Tous ceux qui se trouv��rent sur sa route furent attaqu��s, pill��s, massacr��s. En peu de temps sa petite gal��re devint la terreur de l'Archipel. A la fin de la campagne, il revint �� Venise avec une brillante r��putation de capitaine. Le doge, voulant lui t��moigner la satisfaction de la r��publique pour tous les services qu'il avait rendus, lui confia, pour l'ann��e suivante, un poste important dans la flotte command��e par le c��l��bre Francesco Morosini. Celui-ci, qui l'avait vu en maintes occasions accomplir les plus ��tranges prouesses, enchant�� de ses talents et de son audace, l'avait pris en grande amiti��. Orio sentit d'abord tout le parti qu'il pouvait tirer de cette liaison pour son avancement personnel. Il ne n��gligea donc aucun moyen de la resserrer davantage, et, grace �� son esprit, il r��ussit �� devenir d'abord le favori du g��n��ral, et bient?t apr��s son parent.
Morosini avait une ni��ce ag��e d'environ dix-huit ans, belle et bonne comme un ange, sur laquelle il avait port�� toutes ses affections, et qu'il traitait comme sa fille. Apr��s la gloire de la r��publique, rien au monde ne lui ��tait plus cher que le bonheur de cette enfant ador��e. Aussi lui laissait-il en tout et toujours faire sa volont��. Et lorsque, traitant son extr��me complaisance de faiblesse dangereuse, on lui reprochait de gater sa ni��ce, il r��pondait qu'il avait ��t�� mis sur la terre pour batailler contre les Turcs, et non contre sa bien-aim��e Giovanna; que les vieillards avaient bien assez de leur age �� se faire pardonner, sans y ajouter l'ennui des longs sermons et des tristes remontrances; que d'ailleurs les diamants ne se gataient jamais, quoi qu'on f?t, et que Giovanna ��tait le plus pr��cieux diamant de toute la terre. Il laissa donc �� la jeune fille, dans le choix d'un mari comme dans toutes les autres choses, la plus compl��te libert��, ses grandes richesses lui permettant de ne pas regarder �� la fortune de l'homme qu'elle voudrait ��pouser.
Parmi les nombreux pr��tendants qui s'��taient pr��sent��s, Giovanna avait distingu�� le jeune comte Ezzelino, de la famille des princes de Padoue, dont le noble caract��re et la bonne renomm��e soutenaient dignement l'illustre nom. Toute jeune et tout inexp��riment��e qu'elle f?t, elle avait bien vite reconnu qu'il n'��tait pas pouss�� vers elle, comme tous les autres, par des raisons d'orgueil ou d'int��r��t, mais bien par une tendre sympathie et un amour sinc��re. Aussi l'en avait-elle d��j�� r��compens�� par le don de son estime et de son amiti��. Elle donnait m��me d��j�� le nom d'amour �� ce qu'elle ��prouvait pour lui, et le comte Ezzelino se flattait d'avoir allum�� une passion semblable �� celle qu'il nourrissait. D��j�� Morosini avait donn�� son consentement �� ce noble hym��n��e; d��j�� les joailliers et les fabricants d'��toffes pr��paraient leurs plus pr��cieuses et leurs plus rares marchandises pour la toilette de la mari��e; d��j�� tout le quartier aristocratique del Castello s'appr��tait �� passer plusieurs semaines dans les f��tes. De toutes parts on ornait les gondoles, on renouvelait les toilettes, et c'��tait �� qui se chercherait un degr�� de parent�� avec l'heureux fianc�� qui allait poss��der la plus belle femme et ouvrir la maison la plus brillante de Venise. Le jour ��tait fix��, les invitations ��taient faites; il n'��tait bruit que de l'illustre mariage. Tout d'un coup une nouvelle ��trange circula. Le comte Ezzelin avait suspendu tous les pr��paratifs; il avait quitt�� Venise. Les uns le disaient assassin��; d'autres pr��tendaient que, sur un ordre du conseil des dix, il venait d'��tre envoy�� en exil. Pourquoi donnait-on �� son absence des motifs sinistres? Le bruit et l'agitation r��gnaient toujours au palais Morosini; on continuait les appr��ts de la noce, et aucune invitation n'��tait retir��e. La belle Giovanna ��tait partie pour la campagne avec son oncle; mais au jour fix�� pour la c��l��bration de son mariage, elle devait revenir. Le g��n��ral ��crivait ainsi �� ses amis, et les engageait �� se r��jouir du bonheur de sa famille.
D'un autre c?t��, des gens dignes de foi avaient r��cemment rencontr�� le comte Ezzelin aux environs de Padoue, se livrant au plaisir de la chasse avec une ardeur singuli��re, et ne paraissant nullement press�� de retourner �� Venise. Une derni��re version donnait �� croire qu'il s'��tait retir�� dans sa villa, et qu'enferm��
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