le comprendra ais��ment: �� la vue de cette araba, Van Mitten, si philosophe qu'il f?t, et Bruno, absolument ��reint��, ne purent dissimuler une certaine grimace qu'un simple regard du seigneur K��raban dissipa en un instant.
?Voil�� tout ce que j'ai pu trouver, mon oncle! dit Ahmet en montrant l'araba.
--Et c'est tout ce qu'il nous faut! r��pondit K��raban, qui, pour rien au monde, n'e?t voulu laisser voir l'ombre d'un regret �� l'endroit de son excellente chaise de poste.
--Oui ... reprit Ahmet, avec une bonne liti��re de paille dans cette araba....
--Nous serons comme des princes, mon neveu!
--Des princes de th��atre! murmura Bruno.
--Hein? fit K��raban.
--D'ailleurs, reprit Ahmet, nous ne sommes plus qu'�� cent soixante agatchs [Footnote: Environ soixante lieues.] de Tr��bizonde, et l��, j'y compte bien, nous pourrons nous refaire un meilleur ��quipage.
--Je r��p��te que celui-ci suffira!? dit K��raban, en observant, sous son sourcil fronc��, s'il surprendrait au visage de ses compagnons l'apparence d'une contradiction.
Mais tous, ��cras��s par ce formidable regard s'��taient fait une figure impassible.
Voici ce qui fut convenu: le seigneur K��raban, Van Mitten et Bruno devaient prendre place dans l'araba, dont l'un des chevaux serait mont�� par le postillon, charg�� du soin de relayer apr��s chaque ��tape; Ahmet et Nizib, tr��s habitu��s aux fatigues de l'��quitation, suivraient �� cheval. On esp��rait ainsi ne point ��prouver trop de retard jusqu'�� Tr��bizonde. L��, dans cette importante ville, on aviserait au moyen de terminer ce voyage le plus confortablement possible.
Le seigneur K��raban donna donc le signal du d��part, apr��s que l'araba eut ��t�� munie de quelques vivres et ustensiles, sans compter les deux narghil��s, heureusement sauv��s de la collision, et qui furent mis �� la disposition de leurs propri��taires. D'ailleurs, les bourgades de cette partie du littoral sont assez rapproch��es les unes des autres. Il est m��me rare que plus de quatre �� cinq lieues les s��parent. On pourrait donc facilement se reposer ou se ravitailler, en admettant que l'impatient Ahmet consentit �� accorder quelques heures de repos et surtout que les douckhans des villages fussent suffisamment approvisionn��s.
?En route!? r��p��ta Ahmet apr��s son oncle, qui avait d��j�� pris place dans l'araba.
En ce moment, Bruno s'approcha de Van Mitten, et d'un ton grave, presque imp��rieux:
?Mon ma?tre, dit-il, et cette proposition que vous devez faire au seigneur K��raban?
--Je n'ai pas encore trouv�� l'occasion, r��pondit ��vasivement Van Mitten. D'ailleurs, il ne me para?t pas tr��s bien dispos��....
--Ainsi, nous allons monter l��-dedans? reprit Bruno en d��signant l'araba d'un geste de profond d��dain!
--Oui.... provisoirement!
--Mais quand vous d��ciderez-vous �� faire cette demande d'argent de laquelle d��pend notre libert��?
--A la prochaine bourgade, r��pondit Van Mitten.
--A la prochaine bourgade?...
--Oui! �� Archawa!?
Bruno hocha la t��te en signe de d��sapprobation et s'installa derri��re son ma?tre au fond de l'araba. La lourde charrette partit d'un assez bon trot sur les pentes de la route.
Le temps laissait �� d��sirer. Des nuages, d'apparence orageuse, s'amoncelaient dans l'ouest. On sentait, au del�� de l'horizon, certaines menaces de bourrasque. Cette portion de la c?te, battue de plein fouet par les courants atmosph��riques venus du large, ne devait pas ��tre facile �� suivre; mais on ne commande pas au temps, et les fatalistes fid��les de Mahomet savent mieux que tous autres le prendre comme il vient. Toutefois, il ��tait �� craindre que la mer Noire ne continuat pas �� justifier longtemps son nom grec de _Pontus Euxinus_, le ?bien hospitalier?, mais plut?t son nom turc de _Kara Dequitz_, qui est de moins bon augure.
Fort heureusement, ce n'��tait point la partie ��lev��e et montagneuse du Lazistan que coupait l'itin��raire adopt��. L��, les routes manquent absolument, et il faut s'aventurer �� travers des for��ts que la hache du b?cheron n'a point encore am��nag��es. Le passage de l'araba y e?t ��t�� �� peu pr��s impossible. Mais la c?te est plus praticable, et le chemin n'y fait jamais d��faut d'une bourgade �� l'autre. Il circule au milieu des arbres fruitiers, sous l'ombrage des noyers, des chataigniers, entre les buissons de lauriers et de rosiers des Alpes, enguirland��s par les inextricables sarments de la vigne sauvage.
Toutefois, si cette lisi��re du Lazistan offre un passage assez facile aux voyageurs, elle n'est pas saine dans ses parties basses. L�� s'��tendent des mar��cages pestilentiels; l�� r��gne le typhus �� l'��tat end��mique, depuis le mois d'ao?t jusqu'au mois de mai. Par bonheur pour le seigneur K��raban et les siens, on ��tait en septembre, et leur sant�� ne courait plus aucun risque. Des fatigues, oui! des maladies, non! Or, si on ne se gu��rit pas toujours, on peut toujours se reposer. Et lorsque le plus ent��t�� des Turcs raisonnait ainsi, ses compagnons ne pouvaient rien avoir �� lui r��pondre.
L'araba s'arr��ta �� la bourgade d'Archawa, vers neuf heures du matin. On se mit en mesure d'en repartir une heure apr��s, sans que Van Mitten e?t trouv�� le joint pour toucher un mot de ses fameux projets d'emprunt �� son ami K��raban.
De l��,
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