Keraban Le Tetu, vol 1

Jules Verne






Keraban Le Tetu, vol 1 [with accents]

The Project Gutenberg EBook of Keraban Le Tetu, Vol. I, by Jules Verne #29 in our series by Jules Verne
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Title: Keraban Le Tetu, Vol. I
Author: Jules Verne
Release Date: May, 2005 [EBook #8174] [Yes, we are more than one year ahead of schedule] [This file was first posted on June 25, 2003]
Edition: 10
Language: French
Character set encoding: ISO-Latin-1
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KéRABAN-LE-TêTU par JULES VERNE

PREMIERE PARTIE

I
DANS LEQUEL VAN MITTEN ET SON VALET BRUNO SE PROMèNENT, REGARDENT, CAUSENT, SANS RIEN COMPRENDRE A CE QUI SE PASSE.
Ce jour-là, 16 ao?t, à six heures du soir, la place de Top-Hané, à Constantinople, si animée d'ordinaire par le va-et-vient et le brouhaha de la foule, était silencieuse, morne, presque déserte. En le regardant du haut de l'échelle qui descend au Bosphore, on e?t encore trouvé le tableau charmant, mais les personnages y manquaient. A peine quelques étrangers passaient-ils pour remonter d'un pas rapide les ruelles étroites, sordides, boueuses, embarrassées de chiens jaunes, qui conduisent au faubourg de Péra. Là est le quartier plus spécialement réservé aux Européens, dont les maisons de pierre se détachent en blanc sur le rideau noir des cyprès de la colline.
C'est qu'elle est toujours pittoresque, cette place,--même sans le bariolage de costumes qui en relève les premiers plans,--pittoresque et bien faite pour le plaisir des yeux, avec sa mosquée de Mahmoud, aux sveltes minarets, sa jolie fontaine de style arabe, maintenant veuve de son petit toit d'architecture célestienne, ses boutiques où se débitent sorbets et confiseries de mille sortes, ses étalages, encombrés de courges, de melons de Smyrne, de raisins de Scutari, qui contrastent avec les éventaires des marchands de parfums et des vendeurs de chapelets, son échelle à laquelle accostent des centaines de ca?ques peinturlurés, dont la double rame, sous les mains croisées des ca?djis, caressent plut?t qu'elles ne frappent les eaux bleues de la Corne-d'Or et du Bosphore.
Mais où étaient donc, à cette heure, ces flaneurs habitués de la place de Top-Hané; ces Persans, coquettement coiffés du bonnet d'astracan; ces Grecs balan?ant, non sans élégance, leur fustanelle à mille plis; ces Circassiens, presque toujours en tenue militaire; ces Géorgiens, restés Russes par le costume, même au delà de leur frontière; ces Arnautes, dont la peau, gratinée au soleil, appara?t sous les échancrures de leurs vestes brodées, et ces Turcs, enfin, ces Turcs, ces Osmanlis, ces fils de l'antique Byzance et du vieux Stamboul, oui! où étaient-ils?
A coup s?r, il n'aurait pas fallu le demander à deux étrangers, deux Occidentaux, qui, l'oeil inquisiteur, le nez au vent, le pas indécis, se promenaient, à cette heure, presque solitairement sur la place: ils n'auraient su que répondre.
Mais il y avait plus. Dans la ville proprement dite, au delà du port, un touriste e?t observé ce même caractère de silence et d'abandon. De l'autre c?té de la Corne-d'Or,--profonde indentation ouverte entre le vieux Sérail et le débarcadère de Top-Hané,--sur la rive droite unie à la rive gauche par trois ponts de bateaux, tout l'amphithéatre de Constantinople paraissait être endormi. Est-ce que personne ne veillait alors au palais de Sera?-Bournou? N'y avait-il plus de croyants, d'hadjis, de pèlerins, aux mosquées d'Ahmed, de Bayezidièh, de Sainte-Sophie, de la Sule?manièh? Faisait-il donc sa sieste, le nonchalant gardien de la tour du Séraskierat, à l'exemple de son collègue de la tour de Galata, tous deux chargés d'épier les débuts d'incendie si fréquents dans la ville? En vérité, il n'était pas jusqu'au mouvement perpétuel du port, qui ne par?t quelque peu enrayé, malgré la flottille de steamers autrichiens, fran?ais, anglais, de mouches, de ca?ques, de chaloupes à vapeur, qui se pressent aux abords des ponts et au large des maisons, dont les eaux de la Corne d'Or baignent la base.
était-ce donc là cette Constantinople tant vantée, ce rêve de l'Orient réalisé par la volonté des Constantin et des Mahomet II? Voilà ce que se demandaient les deux
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