Ida et Carmelita | Page 2

Hector Malot
dans une auberge d'un village ��loign��.
On ne le voyait gu��re, et le soir quand on entendait de gros souliers ferr��s r��sonner dans le corridor, on savait seulement qu'il rentrait; le matin, en entendant le m��me pas, on savait qu'il sortait.
Ceux qui occupaient les chambres situ��es sous les siennes entendaient aussi parfois, dans le silence de la nuit, la marche lente et r��guli��re de quelqu'un qui se promenait, et l'on savait que cette nuit-l��, ne pouvant rester au lit, il avait arpent�� son appartement.
Enfin ceux des pensionnaires qui, dans la soir��e, allaient respirer le frais sur l'esplanade qui domine le lac, apercevaient souvent, en se retournant vers l'h?tel, une grande ombre accoud��e �� une fen��tre. C'��tait le colonel, qui restait l�� �� regarder la lune brillant au-dessus des montagnes sombres de la Savoie et frappant les eaux tranquilles du lac de sa lumi��re argent��e.
C'��taient l�� les seuls signes de vie qu'il donnat, et souvent m��me on aurait pu penser qu'il ��tait parti, si l'on n'avait pas vu son valet de chambre promener m��lancoliquement, dans le jardin de l'h?tel et dans les prairies environnantes, son ennui et son impatience.
--Cela durera donc toujours ainsi? se disait Horace.
Mais ce mot, il le pronon?ait tout bas et lorsqu'il ��tait seul.
Car, bien qu'il s'ennuyat terriblement au Glion et qu'il regrettat Paris au point d'en perdre l'app��tit, il respectait trop son ma?tre pour se permettre une seule question sur ce s��jour.
S'il avait pu seulement ��crire �� Paris, au moins il aurait ainsi expliqu�� son absence, qui devait para?tre incompr��hensible. Que devait-on penser de lui? Il avait la religion de sa parole, et c'��tait pour lui un vrai chagrin d'y manquer. A vrai dire, m��me, c'��tait sa grande inqui��tude; car de croire qu'on pouvait l'oublier ou le remplacer, il ne le craignait pas.
Un jour qu'il avait ��t�� s'asseoir sur la route qui monte de Montreux au Glion, �� l'entr��e d'une grotte tapiss��e de foug��res qui se trouve �� l'un des d��tours de cette route, il vit venir lentement, au pas, une cal��che portant trois personnes: deux dames assises sur le si��ge de derri��re, un monsieur plac�� sur le si��ge de devant.
Et tout en regardant cette cal��che qui s'avan?ait cahin-caha, il se dit que les voyageurs qu'elle apportait allaient ��tre bien d��sappoint��s en arrivant, car il n'y avait pas d'appartement libre en ce moment �� l'h?tel.
Ah! comme il e?t volontiers c��d�� sa chambre et celles de son ma?tre, �� ces voyageurs, �� condition qu'ils lui auraient offert leur cal��che pour descendre �� la station, o�� il se serait embarqu�� pour Paris.
Cependant la voiture avait continu�� de monter la c?te et elle s'��tait rapproch��e.
Tout �� coup il se frotta les yeux comme pour mieux voir. L'une des deux dames ��tait vieille, avec des cheveux gris et une figure jaune; l'autre ��tait jeune, avec des cheveux noirs et un teint ��blouissant, qui renvoyait les rayons de la lumi��re.
Il semblait que ces deux femmes fussent la comtesse Belmonte et sa fille, la belle Carmelita.
Il s'��tait avanc�� sur le bord de la route pour mieux regarder au-dessous de lui. Mais �� ce moment la voiture ��tait arriv��e �� l'un des tournants du chemin, et brusquement les deux dames, qu'il voyait de face, ne furent plus visibles pour lui que de dos.
Seulement, par une juste compensation de cette d��ception, le monsieur qui lui faisait vis-��-vis devint visible de face.
C'��tait un homme de grande taille, avec une barbe noire, mais cette barbe ��tait tout ce qu'on pouvait voir de son visage; car, en regardant d'en haut, l'oeil ��tait arr��t�� par les rebords de son chapeau, qui le couvraient jusqu'�� la bouche.
A un certain moment, il releva la t��te vers le sommet de la montagne, et Horace le vit alors en face.
Il n'y avait pas d'erreur possible, c'��tait le prince Mazzazoli accompagnant sa soeur et sa ni��ce.
Pendant que la voiture avan?ait, Horace se demanda quel effet cette arriv��e allait produire sur son ma?tre.
Quelle heureuse diversion cependant pourrait jeter dans leur vie la belle Italienne, si le colonel voulait bien ne pas se sauver au loin comme un sauvage.
Quel malheur qu'il n'y e?t pas de chambres libres en ce moment �� l'h?tel du Rigi-Vaudois!
Pendant qu'il cherchait �� arranger les choses pour le mieux, c'est-��-dire �� trouver un moyen de garder le prince et sa ni��ce, la cal��che ��tait arriv��e vis-��-vis la grotte.
--Comment! vous ici, Horace? s'��cria le prince en se penchant en avant.
Horace s'��tait avanc��.
--Est-ce que le colonel est en Suisse? demanda la comtesse Belmonte.
A cette question de la comtesse, Horace se trouva assez embarrass��; car sans savoir si son ma?tre serait ou ne serait pas bien aise de voir des personnes de connaissance, il n'avait pas oubli�� la consigne qui lui avait ��t�� donn��e.
Comme il h��sitait, ce fut mademoiselle Belmonte qui l'interrogea.
--Comment se porte le colonel? dit-elle.
Il ��tait ainsi fait, qu'il ne savait ni r��sister, ni
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