Histoire de deux enfants douvrier | Page 4

Hendrik Conscience
ne vis que pour travailler et ��tre injuri��e du matin au soir. Ah bien, oui! s'il n'est pas content, il n'a qu'�� aller se faire pendre ailleurs. O�� reste-t-il, votre fameux p��re? �� la _Ch��vre bleue_, chez Pierre Lambin assur��ment. Il a re?u sa paye et l'ivrogne est d��j�� en train de se verser l'argent dans le gosier. Attendez un peu, je vais le tra?ner jusqu'ici. Ne touchez pas �� la casserole pendant mon absence, ou je vous casse le cou �� tous, tourments de vos parents que vous ��tes!
�� peine la m��re avait-elle quitt�� la maison, que les enfants commenc��rent �� danser �� pieds nus dans la lessive r��pandue �� terre, de sorte que le mur et les meubles furent enti��rement remplis de taches bourbeuses.
Ils se s��par��rent effray��s lorsque leur p��re se montra soudain sur le seuil. L'odeur des aliments br?l��s lui fit pousser un grognement de m��contentement; la vapeur de la lessive et l'eau fangeuse r��pandue sur le sol le firent fr��mir, et son visage prit une expression de d��go?t et de tristesse.
--O�� est la m��re? demanda-t-il.
�� la _Ch��vre bleue_, chez Pierre Lambin, r��pondirent les enfants.
--Chez Pierre Lambin?
--Pour vous chercher, papa.
--Ah! vous voil��, sale charogne! dit-il, lorsqu'il vit sa femme entrer. Qu'est-ce que cette ��curie-ci? Pourquoi lavez-vous ces linges sales le soir lorsque je reviens �� la maison? Vous avez sans doute couru toute la journ��e et ��t�� bavarder pr��s des voisines comme toujours?
--Tiste, va appeler ta soeur Godelive, dit la femme �� un des enfants, sans para?tre faire attention aux reproches de son mari.
--La fi��vre me prend d��s que je mets un pied dans ton ��table �� porcs, reprit celui-ci. J'ai envie de m'enfuir et de ne plus jamais revenir. Travaillez donc toute la semaine, ��chinez-vous et suez sang et eau pour apporter quelque argent dans le m��nage: puis, le samedi, vous trouvez des pommes de terre br?l��es et un bazar infect qui vous fait tourner le coeur de d��go?t. Vas-tu r��pondre!
--Bah! r��pondre, reprit la femme d'un ton railleur; je ris de tout ce que tu dis. Crois-tu que tu m'aies prise �� ton service et que je sois ta servante? Si la ch��re te d��pla?t, n'y touche pas; si la maison n'est pas assez propre �� ta guise, nettoie-la toi-m��me, si tu en as l'envie, stupide radoteur!
L'homme leva la main et fit un geste mena?ant.
--Tiens, tiens! dit-elle, le poing te d��mange. Allons, cher Wildenslag, calme-toi un peu... As-tu envie de retourner encore une fois �� la fabrique avec la figure pleine d'��gratignures? Tu n'as qu'�� le dire; je suis pr��te, si une petite peign��e peut te faire plaisir. Tais-toi et mange en paix: les pommes de terre ne sont qu'un peu br?l��es; d'ailleurs, les cris, les injures et les coups ne les rendront pas meilleures.
En ce moment, une jeune fille de sept ans entra lentement et doucement dans la chambre. Elle ��tait maigre et paraissait maladive; mais ses yeux bleus brillaient comme des perles, et sa fine petite bouche avait une expression ��trange: quelque chose de souffrant et de suppliant, comme si l'enfant ��tait une vivante pri��re. Quoique de forme ordinaire et d'��toffe commune, ses v��tements ��taient d'une grande propret��, et, dans cette sale maison, elle r��pandait comme un parfum d'innocence et de puret�� virginale.
Elle alla vers l'homme, mit d'un geste carressant sa main dans la sienne, le regarda avec un sourire muet mais profond, et murmura:
--Bonjour, cher p��re!
Le son argentin de cette petite voix et le regard d'amour de son enfant m��lancolique touch��rent l'ouvrier.
--Bonjour, ma bonne Godelive! r��pondit-il en pressant sa fille contre son coeur. Vas-tu un peu mieux? Es-tu encore malade?
--Encore un peu, papa, r��pondit-elle. Madame Damhout m'a fait boire de la tisane, et cela m'a rafra?chie.
--M. Damhout est-il d��j�� de retour de la fabrique? demanda Wildenslag.
--Non, papa, pas encore.
--Viens, assieds-toi, Godelive, et mange, mon enfant; car ces gloutons sont d��j�� en train. Ils ne laisseraient rien pour toi.
La petite fille se mit �� table, fit le signe de la croix et pria en silence; apr��s quoi, elle commen?a �� manger avec une r��serve remarquable et d'excellentes mani��res.
Wildenslag trouva les pommes de terre extr��mement mauvaises; il mangea sans app��tit, grommela �� voix basse et fit la mine; mais il comprima son d��pit et n'��clata plus en insultes, comme si la pr��sence de son enfant avait ��veill�� en lui l'instinct des convenances. Enfin, il dit avec un soupir:
--Mais, Lina, sans nous disputer, ne pourrais-tu pas tenir ta maison un peu plus propre, et donner �� tes enfants de meilleurs exemples? Vois comme madame Damhout sait s'arranger. Son mari est un ouvrier comme moi; il n'a rien de plus que son salaire journalier, et cependant, dans sa maison, on mangerait sur le carreau, tellement tout y est propre.
--Que parles-tu de madame Damhout? r��pondit-elle d'un ton aigre. C'est une bonne et brave femme, je ne le nierai
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