en rue avec ses archers, se réfugie dans le forteresse du Temple, située hors de la ville. Il y est assiégé, en sort victorieux et fait pendre vingt-huit bourgeois aux quatre principales portes (Saint-Antoine, Saint-Denis, Saint-Honoré, Saint-Jacques). Cinq siècles après, un autre Capétien, chassé aussi de son palais par la fureur populaire, entrait dans la sombre tour du Temple, mais c'était en prisonnier; et il n'en sortit que pour être mené à l'échafaud par les petits-fils de ces bourgeois que Philippe IV avait attachés à la potence!
[Note 17: La juridiction de la Basoche fut étable en 1303; elle s'étendait sur tous les clercs du Parlement et du Chatelet, et connaissait de tous les différends des clercs entre eux. Le chef s'appelait roi, et avait ses grands officiers; chaque année il passait en revue ses sujets, et c'était l'occasion d'une magnifique montre dans Paris.]
Philippe, averti de ménager l'orgueil et l'argent des Parisiens,
remplit ses coffres par d'autres voies qui ne lui valurent que des applaudissements populaires. Ainsi, quelques jours après l'émeute, les Juifs furent saisis dans leurs maisons, chassés de la ville et dépouillés de leurs biens. L'année suivante, le roi fit arrêter les Templiers et alla lui-même s'emparer de leur manoir et de leurs trésors; l'Université et les bourgeois ayant été assemblés dans le Palais, approuvèrent sa conduite, et lorsque les chevaliers du Temple furent envoyés au b?cher, il y eut à peine quelques murmures.
Cependant, la puissance de la ville et son influence politique grandissaient sans cesse: ainsi, ce fut à sa haine que l'on sacrifia le ministre Enguerrand de Marigny, qui fut conduit à Montfaucon au milieu des cris de joie de tout le peuple; ce fut elle qui, deux fois, fit décider, dans une grande assemblée aux halles, où assistaient les barons et les clercs, ?qu'à la couronne de France les femmes ne succèdent pas;? ce fut encore elle qui fit résoudre, dans les états généraux de 1335, ?que le roy ne peut lever tailles en France sinon de l'octroy des gens des Estats.? En même temps, le bien-être et le luxe de Paris prenaient un égal accroissement. On en peut juger par les fêtes que la ville donna à Philippe le Bel lorsque ses fils furent armés chevaliers: outre les banquets qui se firent dans les h?tels des princes, il y eut dans les rues des spectacles et des jeux de tout genre. ?Là vit-on, dit un contemporain, des hommes sauvages mener grand rigolas, des ribauds en blanche chemise agacier par leur biauté, liesse et gayeté, les animaux marcher en procession, des enfants jouster en un tournoi, des dames carioler de biaux tours, des fontaines de vin couler, le grand guet faire la garde en habits uniformes, toute la ville baller, danser et se déguiser.? Dans les carrefours, il y avait des tréteaux ornés de courtines où l'on vit ?Dieu manger des pommes, rire avec sa mère, dire des paten?tres avec ses ap?tres, susciter et juger les morts; les bienheureux chanter en paradis, les damnés pleurer dans un enfer noir et infect, etc.? Enfin, il se fit, dans l'?le Notre-Dame (Saint-Louis), laquelle avait été jointe à la Cité par un pont de bateaux, une montre du grand guet, où toute la population virile de Paris apparut en beaux habits et en armes. Cette revue excita tant d'admiration qu'il fallut la répéter quelques jours après pour le roi d'Angleterre dans le Pré-aux-Clercs. Voici ce qu'en dit la chronique de Jean de Saint-Victor:
.....Esbahi si grandement Furent Anglois plus qu'onques mès; Car ils ne cuidassent jamès Que tant de gent riche et nobile Povist saillir de une ville. A cheval bien furent vingt mille, Et à pié furent trente mille; Tant ou plus ainsi les trouvèrent Cils qui de là les extimèrent....
Cinquante mille hommes de grand guet sont évidemment une exagération poétique du chroniqueur, mais il n'en est pas moins certain que la population de Paris, à cette époque, avait pris un grand accroissement; il est pourtant presque impossible de l'évaluer avec quelque certitude, les documents étant tout à fait insuffisants ou contradictoires. Ainsi, le r?le de la taille levée en 1292 donne 15,200 contribuables et une somme de 12,218 l. 14 sous[18]. L'aide levée en 1313 donne 5,955 contribuables et une somme de 13,021 l. 19 sous. Enfin, dans le r?le du subside levé pour ?l'ost de Flandres,? en 1328, les villes de Paris et de Saint-Marcel figurent pour 35 paroisses et 61,091 feux. Paris avait alors en superficie à peu près le dixième de sa superficie actuelle: il est probable que sa population était aussi le dixième de la population d'aujourd'hui et qu'elle s'élevait à près de 100,000 habitants.
[Note 18: Le marc d'argent valait à cette époque 55 sous 6 deniers tournois.]
§ VIII.
Paris sous Jean et Charles V.--Troisième enceinte de Paris.--étienne Marcel.
Après la sédition de