Henri III et sa Cour | Page 2

Alexandre Dumas, père
mon p��re, ��coutez...Votre profonde retraite, vos travaux scientifiques, vous laissent peu de temps pour suivre les intrigues de la cour...Et, d'ailleurs, vos yeux, habitu��s �� lire dans un ciel pur, perceraient mal l'atmosph��re ��paisse et trompeuse qui l'environne.
RUGGIERI
Pardon, ma fille!...les bruits du monde arrivent parfois jusqu'ici: je sais que le roi de Navarre et le duc d'Anjou ont fui la cour et se sont retir��s, l'un dans son royaume, l'autre dans son gouvernement.
CATHERINE
Qu'ils y restent; ils m'inqui��tent moins en province qu'�� Paris... Le caract��re franc du B��arnais, le caract��re irr��solu du duc d'Anjou, ne nous menacent point de grands dangers; c'est plus pr��s de nous que sont nos ennemis...Vous avez entendu parler du duel sanglant qui a eu lieu, le 27 avril dernier, pr��s la porte Saint-Antoine, entre six jeunes gens de la cour; parmi les quatre qui ont ��t�� tu��s, trois ��taient les favoris du roi.
RUGGIERI
J'ai su sa douleur; j'ai vu les magnifiques tombeaux qu'il a fait ��lever �� Qu��lus, Schomberg et Maugiron; car il leur portait une grande amiti��...Il avait promis, assure-t-on, cent mille livres aux chirurgiens, en cas que Qu��lus v?nt en convalescence...Mais que pouvait la science de la terre contre les dix-neuf coups d'��p��e qu'il avait re?us?...Antraguet, son meurtrier, a du moins ��t�� puni par l'exil...
CATHERINE
Oui, mon p��re...Mais cette douleur s'apaise d'autant plus vite, qu'elle a ��t�� exag��r��e. Qu��lus, Schomberg et Maugiron ont ��t�� remplac��s par d'Epernon, Joyeuse et Saint-M��grin. Antraguet repara?tra demain �� la cour; le duc de Guise l'exige, et Henri n'a rien �� refuser �� son cousin de Guise. Saint-M��grin et lui sont mes ennemis. Ce jeune gentilhomme bordelais m'inqui��te. Plus instruit, moins frivole surtout que Joyeuse et d'Epernon, il a pris sur l'esprit de Henri un ascendant qui m'effraye...Mon p��re, il en ferait un roi.
RUGGIERI
Et le duc de Guise?
CATHERINE
En ferait un moine, lui...Je ne veux ni l'un ni l'autre...Il me faut un peu plus qu'un enfant, un peu moins qu'un homme...Aurais-je donc abatardi son coeur �� force de volupt��s, ��teint sa raison par des pratiques superstitieuses, pour qu'un autre que moi s'emparat de son esprit et le dirigeat �� son gr��?...Non; je lui ai donn�� un caract��re factice, pour que ce caract��re m'appart?nt...Tous les calculs de ma politique, toutes les ressources de mon imagination ont tendu l��...Il fallait rester r��gente de la France, quoique la France e?t un roi; il fallait qu'on p?t dire un jour: ?Henri III a regn�� sous Catherine de M��dicis...? J'y ai r��ussi jusqu'�� pr��sent...Mais ces deux hommes!...
RUGGIERI
Eh bien, Ren��, votre valet de chambre, ne peut-il pr��parer pour eux des pommes de senteur, pareilles �� celles que vous envoyates �� Jeanne d'Albret, deux heures avant sa mort?...
CATHERINE
Non...Ils me sont n��cessaires: ils entretiennent dans l'ame du roi cette irr��solution qui fait ma force. Je n'ai besoin que de jeter d'autres passions au travers de leurs projets politiques, pour les en distraire un instant; alors je me fais jour entre eux; j'arrive au roi, que j'aurai isol�� avec sa faiblesse, et je ressaisis ma puissance...J'ai trouv�� un moyen. Le jeune Saint-M��grin est amoureux de la duchesse de Guise.
RUGGIERI
Et celle-ci?...
CATHERINE
L'aime aussi, mais sans se l'avouer encore �� elle-m��me, peut-��tre...Elle est esclave de sa r��putation de vertu...Ils en sont �� ce point o�� il ne faut qu'une occasion, une rencontre, un t��te-��-t��te, pour que l'intrigue se noue; elle-m��me craint sa faiblesse, car elle le fuit...Mon p��re, ils se verront aujourd'hui; ils se verront seuls.
RUGGIERI
O�� se verront-ils?
CATHERINE
Ici...Hier, au cercle, j'ai entendu Joyeuse et d'Epernon lier, avec Saint-M��grin, la partie de venir faire tirer leur horoscope par vous...Dites aux deux premiers ce que bon vous semblera sur leur fortune future, que le roi veut porter �� son comble, puisqu'il compte en faire ses beaux-fr��res...Mais trouvez le moyen d'��loigner ces jeunes fous...Restez seul avec Saint-M��grin; arrachez-lui l'aveu de son amour; exaltez sa passion; dites-lui qu'il est aim��, que grace �� votre art, vous pouvez le servir; offrez-lui un t��te-��-t��te. (Montrant une alc?ve cach��e dans la boiserie) La duchesse de Guise est d��j�� l��, dans ce cabinet si bien cach�� dans la boiserie, que vous avez fait faire pour que je puisse voir et entendre au besoin, sans ��tre vue. Par Notre-Dame! il nous a d��j�� ��t�� utile, �� moi pour mes exp��riences politiques, et �� vous pour vos magiques op��rations.
RUGGIERI
Et comment l'avez-vous d��termin��e �� venir?...
CATHERINE, ouvrant la porte du passage secret
Pensez-vous que j'aie consult�� sa volont��?
RUGGIERI
Vous l'avez donc fait entrer par la porte qui donne dans le passage secret?
CATHERINE
Sans doute...
RUGGIERI
Et vous avez song�� aux p��rils auxquels vous exposiez Catherine de Cl��ves, votre filleule!...L'amour du Saint-M��grin, la jalousie du duc de Guise...
CATHERINE
Et c'est justement de cet amour et de cette jalousie que j'ai besoin...M. de Guise irait trop loin, si nous ne l'arr��tions pas. Donnons-lui de l'occupation...D'ailleurs, vous connaissez ma maxime:
Il faut tout tenter et faire, Pour son ennemi d��faire.
RUGGIERI
Ainsi, ma fille, vous avez consenti ��
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