Henri III et sa Cour | Page 6

Alexandre Dumas, père
… deux fois, avant de damner trois gentilshommes des premi?res maisons de France?
D'EPERNON
Joyeuse a raison, et nous sommes trop bons chr?tiens!...
RUGGIERI
Rassurez-vous, messieurs, je suis aussi bon chr?tien que vous.
D'EPERNON
Puisque tu nous assures que ta sorcellerie n'a rien de commun avec l'enfer, eh bien, voyons, que te faut-il, ma t?te ou ma main?...
RUGGIERI
Ni l'une ni l'autre; ces formalit?s sont bonnes pour le vulgaire; mais, toi, jeune homme, tu es plac? assez au-dessus de lui pour que ce soit dans un astre brillant entre tous les astres que je lise ta destin?e...Nogaret de la Valette, baron d'Epernon...
D'EPERNON
Comment! tu me connais aussi, moi?...Au fait, il n'y a rien l… d'?tonnant...Je suis devenu si populaire!
RUGGIERI, reprenant
Nogaret de la Valette, baron d'Epernon, ta faveur pass?e n'est rien aupr?s de ce que sera ta faveur future.
D'EPERNON
Vive Dieu! mon p?re, et comment irai-je plus loin?...Le roi m'appelle son fils.
RUGGIERI
Ce titre, son amiti? seule te le donne, et l'amiti? des rois est inconstante...Il t'appellera son fr?re, et les liens du sang le lui commanderont.
D'EPERNON
Comment! tu connais le projet du mariage...?
RUGGIERI
Elle est belle, la princesse Christine! Heureux sera celui qui la poss?dera!
D'EPERNON
Mais qui a pu t'apprendre?...
RUGGIERI
Ne t'ai-je pas dit, jeune homme, que ton astre ?tait brillant entre tous les astres?...Et maintenant … vous, Anne d'Arques, vicomte de Joyeuse; … vous que le roi appelle aussi son enfant.
JOYEUSE
Eh bien; mon p?re, puisque vous lisez si bien dans le ciel, vous devez y voir tout le d?sir que j'ai de rester dans cet excellent fauteuil, si toutefois cela ne nuit pas … mon horoscope...Non? Eh bien, allez, je vous ?coute.
RUGGIERI
Jeune homme, as-tu song? quelquefois, dans tes r?ves d'ambition, que la vicomte de Joyeuse p–t ?tre ?rig?e en duch?;...que le titre de pair qu'on y joindrait te donnerait le pas sur tous les pairs de France, except? les princes du sang royal, et ceux des maisons souveraines de Savoie, Lorraine et Cl?ves?...Oui...Eh bien, tu n'as fait que pressentir la moiti? de ta fortune...Salut … l'?poux de Marguerite de Vaudemont, soeur de la reine!...Salut au grand amiral du royaume de France!...
JOYEUSE, se levant vivement
Avec l'aide de Dieu et de mon ?p?e, mon p?re, nous y arriverons. (Lui donnant sa bourse) Tenez, c'est bien mal r?compenser la pr?diction de si hautes destin?es; mais c'est tout ce que j'ai sur moi.
D'EPERNON
De par Dieu! tu m'y fais penser, et moi qui oubliais...(Il fouille … son escarcelle) Eh bien, des drag?es … sarbacane, voil… tout...Je ne pensais plus que j'avais perdu … la prime jusqu'… mon dernier philippus...Je ne sais ce que devient ce maudit argent; il faut qu'il soit tr?pass?...Vive Dieu! Saint-M?grin, toi qui es ami de Ronsard, tu devrais bien le charger de faire son ?pitaphe...
SAINT-MEGRIN
Il est enterr? dans les poches de ces coquins de ligueurs...Je crois qu'il n'y a plus gu?re que l… qu'on puisse trouver les ?cus … la rose et les doublons d'Espagne...Cependant il m'en reste encore quelques-uns, et si tu veux...
D'EPERNON, riant
Non, non, garde-les pour acheter de l'ell?bore; car il faut que vous sachiez, mon p?re, que, depuis quelque temps, notre camarade Saint-M?grin est fou...Seulement, sa folie n'est pas gaie...Cependant, il vient de me donner une bonne id?e...Il faut que je vous fasse payer mon horoscope par un ligueur...Voyons, sur lequel vais-je vous donne un bon?...Aide-moi, duc de Joyeuse. Ce titre sonne bien, n'est-ce pas? Voyons, cherche...
JOYEUSE
Que dis-tu de notre ma?tre des comptes, La Chapelle-Marteau?...
D'EPERNON
Insolvable...En huit jours, il ?puiserait les tr?sors de Philippe II.
SAINT-MEGRIN
Et le petit Brigard?...
D'EPERNON
Bah!...un pr?vot de boutiquiers! il offrirait de s'acquitter en cannelle et en herbe … la reine.
RUGGIERI
Thomas Cruc??...
D'EPERNON
Si je vous prenais au mot, mon p?re, vos ?paules pourraient garder pendant quelque temps rancune … votre langue...Il n'est pas endurant.
JOYEUSE
Eh bien, Bussy Leclerc?
D'EPERNON
Vive Dieu....un procureur...Tu es de bon conseil, Joyeuse...(A Ruggieri) Tiens, voil… un bon de dix ?cus noble rose. Fais bien attention que la noble rose n'est pas d?mon?tis?e comme l'?cu sol et le ducat polonais, et qu'elle vaut douze livres. Va chez ce coquin de ligueur de la part de d'Epernon et fais-toi payer; s'il refuse, dis-lui que j'irai moi-m?me avec vingt-cinq gentilshommes et dix ou douze pages...
SAINT-MEGRIN
Allons, maintenant que ton compte est r?gl?, je te rappellerai qu'on doit nous attendre au Louvre...Il faut rentrer, messieurs; partons!
JOYEUSE
Tu as raison; nous ne trouverions plus de chaises … porteurs.
RUGGIERI, arr?tant Saint-M?grin
Comment! jeune homme, tu t'?loignes sans me consulter!...
SAINT-MEGRIN
Je ne suis pas ambitieux, mon p?re; que pourriez-vous me promettre?
RUGGIERI
Tu n'es pas ambitieux!...Ce n'est pas en amour du moins.
SAINT-MEGRIN
Que dites-vous, mon p?re! Parlez bas!
RUGGIERI
Tu n'es pas ambitieux, jeune homme, et, pour devenir la dame de tes pens?es, il a fallu qu'une femme r?unit dans son blason les armes de deux maisons souveraines, surmont?es d'une couronne ducale...
SAINT-MEGRIN
Plus bas, mon p?re, plus bas!
RUGGIERI
Eh bien, doutes-tu encore de la science?
SAINT-MEGRIN
Non...
RUGGIERI
Veux-tu partir encore sans me consulter?
SAINT-MEGRIN
Je le devrais, peut-?tre...
RUGGIERI
J'ai cependant bien des r?v?lations … te faire.
SAINT-MEGRIN
Qu'elles viennent du ciel ou de l'enfer, je
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