nous allions coucher à Bourdeaux, le Curé pensoit qu'il le disse par risee, veu qu'il y avoit pres de cent lieues, neantmoins ce, apres estre assis tous ensemble, ils se mirent à sommeiller, au reveil du Curé, environ les six heures du soir, il se trouve aux portes de Bourdeaux avec ces Espagnols. Estant enquis de ses amis qu'il avoit fait, il monstre ses actes faites du mesme jour dans Dole, nul ne peut croire ce fait, il asseure au contraire, un Conseiller de Bourdeaux en fust adverty, il voulut s?avoir comment cela s'estoit passé, il declare les trois Espagnols & la femme qu'ils menoient, on fouille leurs bagages, ou se trouve plusieurs livres, caracteres, billets cires, cousteaux, parchemins, & autres denrees servant à magie, ils sont examinez, ils confessent le tout, & plus que l'on ne leur demandoit, disant entre autres, d'avoir fait par leurs malheureuses oeuvres, perir les fruits de la terre, aux endroits où leur plaisoit, d'avoir fait mourir plusieurs personnes & bestail, & estoient resoluts sans ceste descouverte de faire plusieurs maux du costé de Bourdeaux, la Cour leur fit leur procez extraordinaire, qui leur fut prononcé le premier Mars, mil six cens dix, en la maniere que s'ensuit:
Extraict des Registres de la Cour de Parlement.
Veu par la Cour les chambres assemblees, le procez Criminel & extraordinaire par les Conseillers à ce deputez, à la Requeste du Sieur Procureur general du Roy en ce qui resulte à l'encontre de Diego Castalin, natif de Boquo en Espaigne, & de Francesco Ferdillo natif de Lina en Castille, & de Vincentio Torrados natif de Madril, & de encores Catalina Fiosela, natifve de Còlonasos, les conclusions du sieur Procureur general du Roy: ouys & interrogez par ladite Cour, lesdits accusez sur les enchantemens, magies, sorcileges, & autres oeuvres diabolique, & plusieurs autres crimes à eux imposez, tout consideré dit a esté, que ladite Cour a declaré & declare, lesdits Diego Castalin, Francesco Ferdillo, & Vincentio Torrados, & encore Catalina Fiosella, deu?ment attaints & convaincus des crimes de magies, sorcileges, & autres pernicieuses oeuvres malheureuses & diaboliques. Et pour reparation desquels crimes, les a ladite Cour condamné & condamne à estre prins mené par l'executeur de la haute justice, en la place du marché au porc, & este conduit sur un buscher pour illec estre bruslez tous vifs, & leurs corps estre mis en cendres, ensemble leur liures, caracteres, cousteaux parchemins, billets, & autres servant à magie. Donné à Bourdeaux en Parlement, le 1. Mars 1610.
Estant sur le buscher ils declarent plusieurs malheureuses oeuvres diaboliques qu'ils exer?oient par art de Magie, & dirent qu'ils avoient apris ledit art à Toledos en Espaigne, ou ordinairement s'en faisoit escole publique, & que par le moyen de ceste fanatique science, ils avoient puissance de faire perir plusieurs personnes, bestail & porter beaucoup de dommages aux fruicts de la terre, aussi ils confesserent d'avoir voulu entrer dans la Rochelle, ce qui ne leur fut permis & n'y alloyent à autre fin, sinon pour faire par leur diabolique science perir plusieurs personnes: disant que quand ils vouloyent avec certaines poudres qu'ils brusloient ils infectoient la?r, tellement que plusieurs personnes attaints de ceste mauvaise & pernicieuse odeur mouroient subitement.
L'espagnolle qui les suyvoit nommee Catalina Fiosela, dit & confessa une infinité de meschancetez par elle exercez entre autres par ses malheureux Sorcilleges, elle avoit fait avorter une infinité de femmes enceintes, & d'avoir infecté avec certaines poisons plusieurs fontaines, puits, & ruisseaux, & aussi d'avoir fait mourir plusieurs bestail, & d'avoir fait par ses charmes tumbé pierres & gresles sur les biens & fruits de la terré: apres sa confession elle fut incitee a crier mercy à Dieu, ce que jamai ne voulut faire: ainsi fut la fin de ces maudits Magiciens, lesquels estant possedez du diable meurent sans aucune contrition de leurs fautes & pechez.
Voila qui doit servir d'example à plusiers personnes qui s'estudient à la Magie, d'autres si tost qu'ils ont perdu quelque chose s'en vont au devin, & sorciers, & ne considerent pas qu'allant vers eux, ils vont vers le Diable, & quittent leur Dieu & Createur pour suivre l'ennemy & le prince des tenebres.
Mais qu'en vint il à la fin? une ruine miserable, comme il est arrivé à ces pauvres malheureux: car Dieu qui est jaloux de son honneur, & de sa gloire, ne permet pas que ces tours de Babel, qui ont esté edifiees par cet arrogant & superbe qui ne tasche qu'à obscurcir sa gloire, puissent durer long temps, & des aussitost qu'il commence à s'ennuyer de ces crimes trop odieux, du premier mouvement qu'il remue sa main pour les accabler, tout cela s'en va en poudre, & n'en sort qu'une confusion miserable de ceux qui s'y sont arrestez. Voire encore ce qui devroit effrayer d'avantage leurs imaginations, il fait d'ordinaire, que
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