(tressaillant): Cet homme?. . .
LIGNIERE (qui commence a etre gris, clignant de l'oeil): He! he!. . . --Comte de Guiche. Epris d'elle. Mais marie A la niece d'Armand de Richelieu. Desire Faire epouser Roxane a certain triste sire, Un monsieur de Valvert, vicomte. . .et complaisant. Elle n'y souscrit pas, mais de Guiche est puissant: Il peut persecuter une simple bourgeoise. D'ailleurs j'ai devoile sa manoeuvre sournoise Dans une chanson qui. . .Ho! il doit m'en vouloir! --La fin etait mechante. . .Ecoutez. . .
(Il se leve en titubant, le verre haut, pret a chanter.)
CHRISTIAN: Non. Bonsoir.
LIGNIERE: Vous allez?
CHRISTIAN: Chez monsieur de Valvert!
LIGNIERE: Prenez garde: C'est lui qui vous tuera! (Lui designant du coin de l'oeil Roxane): Restez. On vous regarde.
CHRISTIAN: C'est vrai!
(Il reste en contemplation. Le groupe de tire-laine, a partir de ce moment, le voyant la tete en l'air et bouche bee, se rapproche de lui.)
LIGNIERE: C'est moi qui pars. J'ai soif! Et l'on m'attend --Dans les tavernes!
(Il sort, zigzaguant.)
LE BRET (qui a fait le tour de la salle, revenant vers Ragueneau, d'une voix rassuree): Pas de Cyrano.
RAGUENEAU (incredule): Pourtant. . .
LE BRET: Ah! je veux esperer qu'il n'a pas vu l'affiche!
LA SALLE: Commencez! Commencez!
Scene 1.III.
Les memes, moins Ligniere; De Guiche, Valvert, puis Montfleury.
UN MARQUIS (voyant de Guiche, qui descend de la loge de Roxane, traverse le parterre, entoure de seigneurs obsequieux, parmi lesquels le vicomte de Valvert): Quelle cour, ce de Guiche!
UN AUTRE: Fi!. . .Encore un Gascon!
LE PREMIER: Le Gascon souple et froid, Celui qui reussit!. . .Saluons-le, crois-moi.
(Ils vont vers de Guiche.)
DEUXIEME MARQUIS: Les beaux rubans! Quelle couleur, comte de Guiche? 'Baise-moi-ma-mignonne' ou bien 'Ventre-de-biche'?
DE GUICHE: C'est couleur 'Espagnol malade'.
PREMIER MARQUIS: La couleur Ne ment pas, car bientot, grace a votre valeur, L'Espagnol ira mal, dans les Flandres!
DE GUICHE: Je monte Sur scene. Venez-vous? (Il se dirige, suivi de tous les marquis et gentilshommes, vers le theatre. Il se retourne et appelle): Viens, Valvert!
CHRISTIAN (qui les ecoute et les observe, tressaille en entendant ce nom): Le vicomte! Ah! je vais lui jeter a la face mon. . . (Il met la main dans sa poche, et y rencontre celle d'un tire-laine en train de le devaliser. Il se retourne): Hein?
LE TIRE-LAINE: Ay!. . .
CHRISTIAN (sans le lacher): Je cherchais un gant!
LE TIRE-LAINE (avec un sourire piteux): Vous trouvez une main. (Changeant de ton, bas et vite): Lachez-moi. Je vous livre un secret.
CHRISTIAN (le tenant toujours): Quel?
LE TIRE-LAINE: Ligniere. . . Qui vous quitte. . .
CHRISTIAN (de meme): Eh! bien?
LE TIRE-LAINE: . . .touche a son heure derniere. Une chanson qu'il fit blessa quelqu'un de grand, Et cent hommes--j'en suis--ce soir sont postes!. . .
CHRISTIAN: Cent! Par qui?
LE TIRE-LAINE: Discretion. . .
CHRISTIAN (haussant les epaules): Oh!
LE TIRE-LAINE (avec beaucoup de dignite): Professionnelle!
CHRISTIAN: Ou seront-ils postes?
LE TIRE-LAINE: A la porte de Nesle. Sur son chemin. Prevenez-le!
CHRISTIAN (qui lui lache enfin le poignet): Mais ou le voir!
LE TIRE-LAINE: Allez courir tous les cabarets: Le Pressoir D'Or, la Pomme de Pin, la Ceinture qui craque, Les Deux Torches, les Trois Entonnoirs,--et dans chaque, Laissez un petit mot d'ecrit l'avertissant.
CHRISTIAN: Oui, je cours! Ah! les gueux! Contre un seul homme, cent! (Regardant Roxane avec amour): La quitter. . .elle! (Avec fureur, Valvert): Et lui!. . .--Mais il faut que je sauve Ligniere!. . .
(Il sort en courant.--De Guiche, le vicomte, les marquis, tous les gentilshommes ont disparu derriere le rideau pour prendre place sur les banquettes de la scene. Le parterre est completement rempli. Plus une place vide aux galeries et aux loges.)
LA SALLE: Commencez.
UN BOURGEOIS (dont la perruque s'envole au bout d'une ficelle, pechee par un page de la galerie superieure): Ma perruque!
CRIS DE JOIE: Il est chauve!. . . Bravo, les pages!. . .Ha! ha! ha!. . .
LE BOURGEOIS (furieux, montrant le poing): Petit gredin!
RIRES ET CRIS (qui commencent tres fort et vont decroissant): Ha! ha! ha! ha! ha! ha!
(Silence complet.)
LE BRET (etonne): Ce silence soudain?. . . (Un spectateur lui parle bas): Ah?
LE SPECTATEUR: La chose me vient d'etre certifiee.
MURMURES (qui courent): Chut!--Il parait?. . .--Non!. . .--Si1--Dans la loge grillee.-- Le Cardinal!--Le Cardinal?--Le Cardinal!
UN PAGE: Ah! diable, on ne va pas pouvoir se tenir mal!. . .
(On frappe sur la scene. Tout le monde s'immobilise. Attente.)
LA VOIX D'UN MARQUIS (dans le silence, derriere le rideau): Mouchez cette chandelle!
UN AUTRE MARQUIS (passant la tete par la fente du rideau): Une chaise!
(Une chaise est passee, de main en main, au-dessus des tetes. Le marquis la prend et disparait, non sans avoir envoye quelques baisers aux loges.)
UN SPECTATEUR: Silence!
(On refrappe les trois coups. Le rideau s'ouvre. Les marquis assis sur les cotes, dans des poses insolentes. Toile de fond representant un decor bleuatre de pastorale. Quatre petits lustres de cristal eclairent la scene. Les violons jouent doucement.)
LE BRET (a Ragueneau, bas): Montfleury entre en scene?
RAGUENEAU (bas aussi): Oui, c'est
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