Correspondance, 1812-1876 - Tome 2 | Page 8

George Sand
haute consid��ration.
GEORGE SAND.

CLV
A M. ALEXIS DUTEIL, A LA CH?TRE
Gen��ve, septembre 1836.
Je passe mon temps fort agr��ablement �� Gen��ve, mon cher ami. Je te raconterai cela en d��tail, au coin du feu. J'ai �� peine le temps de dormir. Mais je veux te dire que j'ai re?u ta lettre et que je te remercie mille fois de t'occuper de ton camarade absent et de ne pas n��gliger ses affaires, qu'il n��glige si bien.
Et la vendange! cher Dyonisius? Songe �� la vendange! songe �� te faire du vin blanc potable. Ne n��glige pas un point aussi important.
Je serai �� Nohant dans les premiers jours d'octobre. Je pars d'ici le 30. Je m'arr��terai �� Lyon. Je te porte du bon tabac �� priser, et force cigarettes.
Adieu, bon vieux; dis �� ta femme que je l'aime; aimez-moi, tous deux. A bient?t!
Mes mioches se portent �� merveille. Ils supportent la fatigue h��ro?quement. Ursule n'est pas de m��me.[1] Elle ��tait tr��s ��pouvant��e l'autre jour de se trouver dans un village appel�� Martigny. Elle se croyait �� la Martinique et ne se consolait que dans l'espoir d'en rapporter de bon caf�� (historique).
Je suis ici: l'objet de la curiosit�� publique. Je ne fais pas un pas, je ne dis pas un mot qui n'en fasse faire et dire mille. N��anmoins on en est �� la bienveillance pour moi, c'est la mode pr��sentement.
Adieu, et me ama.
[1] Ursule Josse, femme de chambre de George Sand.

CLVI
A MADAME D'AGOULT, A GEN��VE
Lyon, le 3 octobre 1836.
Chers enfants,
Je suis �� Lyon le bec dans l'eau. Je voulais partir sur-le-champ en recevant cette jolie lettre; mais je n'ai trouv�� de places dans les diligences que pour le 3, c'est-��-dire pour aujourd'hui. Cela fait que j'enrage.
Au lieu de passer encore, pr��s de vous, quelques-uns de ces beaux, jours qu'on cherche tant et qu'on attrape si peu, je suis dans la plus b��te de toutes les villes du royaume, flanant avec madame Montgolf?er et _un tas de particuliers que je ne connais ni d'Eve ni d'Adam._ Ils m'ont trimball��e �� Fourvi��res. N'y allez jamais! _il est bien p��nible_ et il n'est pas _bien joli._ Puis ils m'ont men��e au Gymnase, entendre piauler et piailler madame***, qui est, comme vous savez, toute pointue. Hier, ils m'ont assassin��e en me faisant entendre _Guillaume Tell_, abominablement ��corch�� et massacr�� par le plus plat orchestre et les plus, ignobles chanteurs que j'aie jamais entendus.
Cela, au reste, m'a fait du bien, en ce sens que je me suis r��concili��e avec les th��atres d'Italie, que je m��prisais beaucoup trop. Si la seconde ville de France chante si faux et si salement, sans offenser personne, il faut rendre hommage aux villes de cinqui��me et sixi��me ordre de l'Italie. On y chante juste, et, si on y a mauvais go?t, on y a du chic, de l'��lan et du toupet.
Aujourd'hui, on m'a fait d?ner dans un restaurant tr��s burlesque. On entre dans une cuisine, on monte �� talons un escalier plein d'immondices, et on arrive �� une petite chambre fort sale, o�� on vous sert cependant un tr��s bon d?ner. Ce soir, nous sommes rentr��s chez madame Montgolf?er, et un monsieur--que vous connaissez, �� ce qu'on dit,--m'a chant��, sans aucune esp��ce de voix, deux ou trois morceaux de Schubert que je ne connaissais pas. J'ai devin�� que cela devait ��tre tr��s beau.
La _Montgolfi��re_ me para?t une excellente femme un peu atteinte par la cancanerie, l'investigation et la curiosit�� provinciales, brodant un peu, amplifiant pas mal, et jugeant parfois �� c?t��; du reste, proclamant et pratiquant des sentiments tr��s ��lev��s, et poss��dant des facult��s et des qualit��s qui n'ont manqu�� que d'un peu plus de d��veloppement. Je la crois tr��s sinc��rement z��l��e pour Franz et tr��s d��vou��e �� vous. Elle est charmante pour moi. G��vaudan, qui m'avait quitt��e �� moiti�� chemin pour prendre une route plus courte, a reparu tout �� coup hier sur mon horizon m��lancolique. Il pr��tend ��tre rappel�� �� Lyon par sa caisse de cigares, qu'il faut recevoir et payer. _As you like it, all is well that ends well,_ et beaucoup d'autres proverbes shakespeariens qui ne changeront rien �� nos positions respectives. Je suis charm��e de le voir, il prom��ne mes _Piffoels_[1] pendant que je travaille le matin �� notre fameuse relation[2], mais je crois qu'il fait _much ado about nothing._
Bonsoir, mes bons et chers enfants. Aimez-moi seulement la moiti�� de ce que je vous aime, et ce sera beaucoup. Je n'ai pas le droit de vous en demander davantage. Vous vous occupez tant le coeur et l'esprit l'un et l'autre, qu'il ne reste pas une part de premi��re qualit�� pour les rustres de mon esp��ce, gens solitaria et th��rapeutique. Mais cela ne m'emp��che pas de vous mettre en premi��re ligne dans mes affections, sans me soucier de ?l'��quilibre de la vie morale et intellectuelle?.
Fazy[3] m'a envoy�� le cachet. Je ne vous
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