froid, je souris et je dis: ?Ce n'est pas ici un flatteur: ce sont l�� des conseillers qui me convainquent de ce que je suis en me le faisant sentir.? On peut retirer de doux fruits de l'adversit��; telle que le crapaud horrible et venimeux, elle porte cependant dans sa t��te un pr��cieux joyau[16]. Notre vie actuelle, s��par��e de tout commerce avec le monde, trouve des voix dans les arbres, des livres dans les ruisseaux qui coulent, des sermons dans les pierres, et du bien en toute chose.
[Note 16: C'��tait une opinion re?ue, du temps de Shakspeare, que la t��te d'un vieux crapaud contenait une pierre pr��cieuse, ou une perle, �� laquelle on attribuait de grandes vertus.]
AMIENS.--Je ne voudrais pas changer cette vie: Votre Grace est heureuse de pouvoir ��changer les rigueurs opiniatres de la fortune en une existence aussi tranquille et aussi douce.
LE VIEUX DUC.--Allons, irons-nous tuer quelque venaison? Cependant cela me fait de la peine que ces pauvres cr��atures tachet��es, bourgeoises par naissance de cette cit�� d��serte, voient leurs flancs arrondis perc��s de ces pointes fourchues dans leurs propres domaines.
PREMIER SEIGNEUR.--Aussi, monseigneur, cela chagrine beaucoup le m��lancolique Jacques; il jure que vous ��tes en cela un plus grand usurpateur que votre fr��re ne l'a ��t�� en vous bannissant. Aujourd'hui, le seigneur Amiens et moi, nous nous sommes gliss��s derri��re lui, au moment o�� il ��tait couch�� sous un ch��ne, dont l'antique racine perce les bords du ruisseau qui murmure le long de ce bois; au m��me endroit est venu languir un pauvre cerf ��perdu que le trait d'un chasseur avait bless��; et vraiment, monseigneur, le malheureux animal poussait de si profonds g��missements, que dans ses efforts la peau de ses c?t��s a failli crever; ensuite de grosses larmes[17] ont roul�� piteusement l'une apr��s l'autre sur son nez innocent; et dans cette attitude, la pauvre b��te fauve, que le m��lancolique Jacques observait avec attention, restait immobile sur le bord du rapide ruisseau, qu'elle grossissait de ses pleurs.
[Note 17: Dans l'ancienne mati��re m��dicale, les larmes du cerf mourant ��taient r��put��es jouir d'une vertu miraculeuse.]
LE VIEUX DUC.--Mais qu'a dit Jacques? N'a-t-il point moralis�� sur ce spectacle?
PREMIER SEIGNEUR.--Oh! oui, monseigneur, il a fait cent comparaisons diff��rentes; d'abord, sur les pleurs de l'animal qui tombaient dans le ruisseau, qui n'avait pas besoin de ce superflu. ?Pauvre cerf, disait-il, tu fais ton testament comme les gens du monde; tu donnes �� qui avait d��j�� trop.? Ensuite, sur ce qu'il ��tait l�� seul, isol��, abandonn�� de ses compagnons velout��s: ?Voil�� qui est bien, dit-il, le malheur s��pare de nous la foule de nos compagnons.? Dans le moment, un troupeau sans souci et qui s'��tait rassasi�� dans la prairie, bondit autour de l'infortun�� et ne s'arr��te point pour le saluer: ?Oui, disait Jacques, poursuivez, gras et riches citoyens; c'est la mode: pourquoi vos regards s'arr��teraient-ils sur ce pauvre malheureux, qui est ruin�� et perdu sans ressource?? C'est ainsi que Jacques, par les plus violentes invectives, attaquait la campagne, la ville, la cour, et m��me la vie que nous menons ici, jurant que nous ��tions de vrais usurpateurs, des tyrans et pis encore, d'effrayer les animaux et de les tuer dans le lieu m��me que la nature leur avait assign�� pour patrie et pour demeure.
LE VIEUX DUC.--Et l'avez-vous laiss�� dans cette m��ditation?
SECOND SEIGNEUR.--Oui, monseigneur, nous l'avons laiss�� pleurant et faisant des dissertations sur le cerf qui sanglotait.
LE VIEUX DUC.--Montrez-moi l'endroit; j'aime �� ��tre aux prises avec lui, lorsqu'il est dans ces acc��s d'humeur; car alors il est plein d'id��es.
SECOND SEIGNEUR.--Je vais, monseigneur, vous conduire droit �� lui.
SC��NE II
Appartement du palais du duc usurpateur.
FR��D��RIC entre avec des SEIGNEURS de sa suite.
FR��D��RIC.--Est-il possible que personne ne les ait vues? Cela ne peut pas ��tre: quelques tra?tres de ma cour sont d'intelligence avec elles.
PREMIER SEIGNEUR.--Je ne puis d��couvrir personne qui l'ait aper?ue. Les dames, charg��es de sa chambre, l'ont vue le soir au lit, et le lendemain, de grand matin, elles ont trouv�� le lit vide du tr��sor qu'il renfermait, leur ma?tresse.
SECOND SEIGNEUR.--Monseigneur, on ne trouve pas non plus le paysan peu gracieux[18] dont Votre Altesse avait coutume de s'amuser si souvent. Hesp��rie, la fille d'honneur de la princesse, avoue qu'elle a entendu secr��tement votre fille et sa cousine vantant beaucoup les bonnes qualit��s et les graces du lutteur qui a vaincu derni��rement le robuste Charles, et elle croit qu'en quelque endroit que ces dames soient all��es, ce jeune homme est s?rement avec elles.
[Note 18: Roynish du mot fran?ais rogneux.]
FR��D��RIC.--Envoyez chez son fr��re; ramenez ici ce galant; s'il n'y est pas, amenez-moi son fr��re, je le lui ferai bien trouver; allez-y sur-le-champ, et ne vous lassez point de continuer les d��marches et les perquisitions, jusqu'�� ce que vous m'ayez ramen�� ces folles ��chapp��es.
(Ils sortent.)
SC��NE III
Devant la maison d'Olivier.
Entrent ORLANDO et ADAM, qui se rencontrent.
ORLANDO.--Qui est l��?
ADAM.--Quoi! c'est vous, mon jeune
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