Comme il vous plaira | Page 2

William Shakespeare
prince. Les emprunts que le po?te a faits au romancier sont assez nombreux; mais le caract��re de Jacques, ceux de Touchstone et d'Audrey sont de l'invention de Shakspeare.
Le docteur Malone suppose que c'est en 1600 que fut ��crite la com��die de Comme il vous plaira; c'est une de celles qui ont le plus enrichi les recueils d'extraits ��l��gants; on y remarquera le fameux tableau de la vie humaine: Le monde est un th��atre, etc., etc.

COMME IL VOUS PLAIRA
COM��DIE

PERSONNAGES
LE DUC, vivant dans l'exil. FR��D��RIC, fr��re du duc, et usurpateur de son duch��. AMIENS, } seigneurs qui ont suivi JACQUES,} le duc dans son exil. LE BEAU, courtisan �� la suite de Fr��d��ric. CHARLES, son lutteur. OLIVIER, } JACQUES, }fils de sir Rowland des ORLANDO, }Bois. ADAM, }serviteurs d'Olivier. DENNIS,} TOUCHSTONE, paysan bouffon. SIR OLIVIER MAR-TEXT, vicaire. CORIN, } SYLVIUS, }bergers. WILLIAM, paysan, amoureux d'Audrey. PERSONNAGE REPR��SENTANT L'HYMEN. ROSALINDE, fille du duc exil��. C��LIE, fille de Fr��d��ric. PH��B��, berg��re. AUDREY, jeune villageoise. SEIGNEURS A LA SUITE DES DEUX DUCS, PAGES, GARDES-CHASSE, ETC., ETC.
La sc��ne est d'abord dans le voisinage de la maison d'Olivier, ensuite en partie �� la cour de l'usurpateur, et en partie dans la for��t des Ardennes.

ACTE PREMIER
SC��NE I
Verger, pr��s de la maison d'Olivier.
Entrent ORLANDO ET ADAM.
ORLANDO.--Je me rappelle bien, Adam; tel a ��t�� mon legs, une mis��rable somme de mille ��cus dans son testament; et, comme tu dis, il a charg�� mon fr��re, sous peine de sa mal��diction, de me bien ��lever, et voil�� la cause de mes chagrins. Il entretient mon fr��re Jacques �� l'��cole, et la renomm��e parle magnifiquement de ses progr��s. Pour moi, il m'entretient au logis en paysan, ou pour mieux dire, il me garde ici sans aucun entretien; car peut-on appeler entretien pour un gentilhomme de ma naissance, un traitement qui ne diff��re en aucune fa?on de celui des boeufs �� l'��table? Ses chevaux sont mieux trait��s; car, outre qu'ils sont tr��s-bien nourris, on les dresse au man��ge; et �� cette fin on paye bien cher des ��cuyers: moi, qui suis son fr��re, je ne gagne sous sa tutelle que de la croissance: et pour cela les animaux qui vivent sur les fumiers de la basse-cour lui sont aussi oblig��s que moi; et pour ce n��ant qu'il me prodigue si lib��ralement, sa conduite �� mon ��gard me fait perdre le peu de dons r��els que j'ai re?us de la nature. Il me fait manger avec ses valets; il m'interdit la place d'un fr��re, et il d��grade autant qu'il est en lui ma distinction naturelle par mon ��ducation. C'est l��, Adam, ce qui m'afflige. Mais l'ame de mon p��re, qui est, je crois, en moi, commence �� se r��volter contre cette servitude. Non, je ne l'endurerai pas plus longtemps, quoique je ne connaisse pas encore d'exp��dient raisonnable et s?r pour m'y soustraire.
(Olivier survient.)
ADAM.--Voil�� votre fr��re, mon ma?tre, qui vient.
ORLANDO.--Tiens-toi �� l'��cart, Adam, et tu entendras comme il va me secouer.
OLIVIER.--Eh bien! monsieur, que faites-vous ici?
ORLANDO.--Rien: on ne m'apprend point �� faire quelque chose.
OLIVIER.--Que gatez-vous alors, monsieur?
ORLANDO.--Vraiment, monsieur, je vous aide �� gater ce que Dieu a fait, votre pauvre mis��rable fr��re, �� force d'oisivet��.
OLIVIER.--Que diable! monsieur occupez-vous mieux, et en attendant soyez un z��ro.
ORLANDO.--Irai-je garder vos pourceaux et manger des carouges avec eux? Quelle portion de patrimoine ai-je follement d��pens��e, pour en ��tre r��duit �� une telle d��tresse?
OLIVIER.--Savez-vous o�� vous ��tes, monsieur?
ORLANDO.--Oh! tr��s-bien, monsieur: je suis ici dans votre verger.
OLIVIER.--Savez-vous devant qui vous ��tes, monsieur?
ORLANDO.--Oui, je le sais mieux que celui devant qui je suis ne sait me conna?tre. Je sais que vous ��tes mon fr��re a?n��; et, selon les droits du sang, vous devriez me conna?tre sous ce rapport. La coutume des nations veut que vous soyez plus que moi, parce que vous ��tes n�� avant moi: mais cette tradition ne me ravit pas mon sang, y e?t-il vingt fr��res entre nous. J'ai en moi autant de mon p��re que vous, bien que j'avoue qu'��tant venu avant moi, vous vous ��tes trouv�� plus pr��s de ses titres.
OLIVIER.--Que dites-vous, mon gar?on?
ORLANDO.--Allons, allons, fr��re a?n��, quant �� cela vous ��tes trop jeune.
OLIVIER.--Vilain[1], veux-tu mettre la main sur moi?
[Note 1: Vilain, coquin et homme de basse extraction, les deux fr��res lui donnent chacun un sens diff��rent.]
ORLANDO.--Je ne suis point un vilain: je suis le plus jeune des fils du chevalier Rowland des Bois; il ��tait mon p��re, et il est trois fois vilain celui qui dit qu'un tel p��re engendra des vilains.--Si tu n'��tais pas mon fr��re, je ne d��tacherais pas cette main de ta gorge que l'autre ne t'e?t arrach�� la langue, pour avoir parl�� ainsi; tu t'es insult�� toi-m��me.
ADAM.--Mes chers ma?tres, soyez patients: au nom du souvenir de votre p��re, soyez d'accord.
OLIVIER.--Lache-moi, te dis-je.
ORLANDO.--Je ne vous lacherai que quand il me plaira.--Il faut que vous m'��coutiez. Mon p��re vous a charg��, par son testament, de
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