Chevalier de Mornac | Page 7

Joseph Marmette
terre de l'oubli.
[Note 8: Les Sauvages d��signaient ainsi les gouverneurs fran?ais. Ce nom qui signifiait grande montagne et qui ��tait la traduction sauvage de celui de Montmagny, s'��tendit ensuite �� tous les gouverneurs qui succ��d��rent celui-l��.]
Mornac regardait avec surprise le camp des Sauvages. De l��gers flocons de fum��e blanche montaient en spirale par le haut des wigwams, dont les pans d'��corce de bouleau se paraient de peintures bizarres repr��sentant les insignes du ma?tre qui l'habitait. La plupart des animaux du pays, depuis l'ours et le loup jusqu'�� la loutre et le rat-musqu��, y d��filaient paisiblement sous les yeux surpris du Fran?ais. A la porte des cabanes, les hommes, �� moiti�� nus, fourbissaient leurs armes, fa?onnaient des fl��ches ou repassaient des peaux d'animaux r��cemment tu��s. Plus loin, des jeunes gens s'exer?aient �� sauter ou �� lancer des fl��ches. Ici, les vieilles femmes s'occupaient des appr��ts du frugal repas du matin, tandis que de plus jeunes ber?aient un nourrisson dans leurs bras nus en chantant un air triste et doux. Quelques jeunes filles, attir��es par le passage des arrivants, se tenaient tout pr��s de la palissade qui entourait le fort des Hurons. Leur oeil ardent et noir brillait entre les pieux de l'enceinte, en se fixant sur le chevalier de Mornac, dont la bonne mine et la fi��re moustache faisaient battre bien vite le coeur de plus d'une d'entre elles.
Le galant gentilhomme r��vait d��j�� la conqu��te de ces yeux noirs, dont le trait de flamme transperce, lorsque Boisdon ouvrit �� ses h?tes la porte de l'auberge.
Comme le lecteur ne tiens gu��re aux d��tails du d��jeuner de l'h?tellerie Boisdon, nous le prierons de nous suivre au second ��tage de la taverne du Baril-d'Or, o�� Boisdon avait conduit le chevalier, dans une chambre dont la fen��tre donnait sur la grande place de l'��glise.
Il pouvait ��tre dix heures. R��confort�� par un d��jeuner substantiel, o�� le bon vin n'avait certes pas fait d��faut, Mornac se tenait accoud�� sur la tablette de la fen��tre ouverte et regardait au dehors.
Ses yeux, apr��s s'��tre promen��s sur le coll��ge des J��suites, dont le long mur de fa?ade, perc�� d'une double rang��e de crois��es, descend vers la rue de la Fabrique, erraient sur l'embouchure de la rivi��re Saint-Charles; l'espace sur lequel s'��l��vent aujourd'hui le s��minaire et l'Universit��-Laval, ainsi que toutes les maisons comprises entre les remparts, les rues de la Fabrique et Saint-Jean et l'H?tel-Dieu, n'existant pas encore �� cette ��poque. Tout ce vaste terrain, jusqu'�� la gr��ve, ��tait encore la propri��t�� des h��ritiers du sieur Guillaume Couillard, ��poux de Guillemette H��bert, fille du premier colon de Qu��bec. M. Couillard ��tait mort l'ann��e pr��c��dente, le 4 mars 1663, et sa veuve demeurait dans l'unique maison qui s'��levait sur la propri��t��. [9] Ce n'est que quelques ann��es plus tard que Mgr de Laval devait acheter ce terrain pour y fonder un s��minaire.
[Note 9: Il y a une couple d'ann��es que M. l'abb�� Laverdi��re a trouv��, pr��s de la porte qui conduit du Grand-S��minaire au jardin, les ruines du mur de fondation de cette maison.]
Il y avait quelque temps que Mornac laissait errer ses regards de la rivi��re Saint-Charles au fleuve et du fleuve aux grandes montagnes du Nord qui se coloraient d'une teinte bleu-rougeatre sous le soleil de cette matin��e d'automne, quand un bruit de voix et un mouvement inusit�� appel��rent l'attention de l'��tranger sur la grande place.
Une trentaine de personnes, des enfants et des jeunes gens, suivaient un groupe de dix hommes bizarrement accoutr��s, sur lesquels la curiosit�� du chevalier se concentra.
Leur t��te ��tait nue et leurs cheveux, ras��s sur le haut du front, ��taient relev��s sur le crane et r��unie en une touffe du milieu de laquelle s'��chappait une plume d'aigle. Leur visage dont les pommettes saillantes et le teint cuivr�� indiquaient les enfants de la race aborig��ne de l'Am��rique septentrionale, ��tait curieusement bariol�� de couleurs ��clatantes. L'un avait le nez point en bleu, l'autre en rouge, on troisi��me en jaune; un quatri��me avait toute la figure noire comme de la suie, l'exception du menton, des oreilles, et du front, de sorte qu'on l'aurait cru masqu��. D'autres avaient de simples lignes de couleurs diverses, qui leur couraient en zig-zag sur le front, le nez et les joues. Leur cou, le buste et les bras ��taient nus et aussi tatou��s de couleurs voyantes, qui repr��sentaient les insignes de leur tribu et de leurs exploits. Des colliers de grains de porcelaine et de griffes d'ours, de loup et d'aigle entouraient leur cou et retombaient sur leur poitrine nue. Une peau de daim, dont le bas ��tait d��coup�� en frange leur enserrait la ceinture, ou reposaient le tomahawk, ainsi que le couteau �� scalper, et descendait jusqu'au genou. La jambe et le pied ��taient couverts d'un bas-de-chausses aussi en peau de daim, dont la couture disparaissait sous une frange aux longues d��coupures s'agitant
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